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la loi, à force d'en remodeler le contenu, en ont
ensemble profondément altéré la nature (I) et
sérieusement compliqué le mécanisme (II).

L'essentiel
- La donation-partage par actes séparés et la donation-partage de quotesparts indivises ont sérieusement altéré la nature de l'acte.

I. l'altération de la nature
de la donation-partage

Cette altération de la nature de la donation-par- Le mécanisme de la donation-partage s'est trouvé compliqué par la réalitage est triple 4.
sation, en pratique, de donations-partages conjonctives ou cumulatives, et
p a r l a c o n s é c r a t i o n , e n l é g i s l a t i o n , d e d o n a t i o n s - p a r t a g e s 3. partager et avantager. En premier lieu, le partage d'ascendant a, de longue date, cessé d'être
transgénérationnelles.
un pur partage pour revêtir une dimension libérale.
Instrument d'une libéralité autant que d'un parAinsi, d'ailleurs, s'expliquent la terminologie en
tage, il est devenu un acte mixte, hybride. Or
usage et le régime de l'institution. La terminolochacun sait que, d'un acte juridique composite,
gie en usage : les descendants sont copartagés,
le régime juridique est souvent malaisé à définir.
et non copartageants. Le régime de l'institution :
c'est parce qu'il est l'œuvre du de cujus que le
partage se forme dès l'acceptation de son lot par
l'un des présomptifs héritiers, qu'il n'exige pas de
ceux-ci la capacité de partager, qu'y sont interdites, par crainte des abus d'autorité, des clauses
autorisées dans des partages amiables, telles jadis
les clauses dérogatoires à l'égalité en nature 2, ou
aujourd'hui les clauses excluant l'indexation des
soultes payables à terme (C. civ., art. 1075-4),
ou encore que sa révocation à l'égard de l'un des
copartagés laisse subsister les allotissements des
autres 3.

La pratique avait préparé cette évolution en apposant aux donations-partages la clause dite d'excédent de lot, aux termes de laquelle, si l'un des
lots s'avérait d'une valeur supérieure à celle des
autres, la différence serait acquise à son bénéficiaire par préciput et hors part. Visant à évincer le
risque d'une rescision pour lésion, la clause n'en
consolidait pas moins les partages inégaux. La
doctrine, avec René Savatier, justifia cette évolution en observant que le de cujus, autorisé à partager sa propre succession, était par ailleurs libre
d'avantager tel de ses enfants dans la limite de
la quotité disponible, de sorte qu'il n'y avait pas
lieu de le faire « entrer de force (...) dans la prison
des règles du partage » 5. La loi de 3 juillet 1971
consacra cette mutation avec éclat en supprimant
la sanction de la lésion dans le partage d'ascendant, ne laissant à l'enfant sous-alloti que la seule
action en réduction pour atteinte à la réserve. Le
partage cessa ipso facto d'être enfermé dans une
fonction purement répartitive pour désormais
revêtir clairement une dimension libérale. La
donation n'était plus seulement l'instrument du
partage ; la donation-partage devenait donation
autant que partage.

À cet égard, la réforme du 23 juin 2006 n'a point
transformé l'institution. Elle en a simplement
élargi le domaine. Auparavant, la loi considérait
que le partage d'une succession était l'affaire
des successeurs, amiablement accordés ou judiciairement départagés, et non celle du de cujus.
Et si, par exception, elle permettait à l'ascendant
de faire entre ses descendants ce qu'elle refusait à tout autre de faire entre ses héritiers, c'est
parce qu'elle y voyait une heureuse résurgence
d'autorité parentale, un acte éclairé de magistrature domestique. Depuis 2006, l'institution
est banalisée : toute personne peut procéder au
partage de sa succession entre ses héritiers quels
qu'ils soient. Les partages d'ascendants sont ainsi
devenus les libéralités-partages. Mais la donationpartage et le testament-partage restent un acte
où s'exprime l'autorité du de cujus. Simplement,
ce n'est plus l'autorité d'un ascendant, c'est celle
d'un propriétaire.
2. L'institution n'en a pas moins connu une profonde évolution depuis le Code Napoléon. Même
si elle n'a cessé d'être un partage décidé par le
de cujus, la pratique notariale, la jurisprudence et

La même observation vaut pour le testamentpartage. La règle de l'article 1079 du Code civil,
suivant laquelle « le testament-partage ne produit
que les effets d'un partage » et « ses bénéficiaires
ont qualité d'héritier », sonnait faux dès lors que,
de deux enfants copartagés, l'un pouvait être
valablement alloti du double de l'autre. Aussi la loi
du 23 juin 2006 l'a-t-elle heureusement corrigée :
le texte énonce désormais que « le testament-partage produit les effets d'un partage » et il ne dit
plus que ses bénéficiaires ont la qualité d'héritier.

(2) Cass. req., 18 août 1859 : DP 1859, 1, p. 410
(3) Cass. 1 re civ., 4 juill. 2006, n° 04-16272 : Bull. civ. I, 
n° 146 ; JurisData n° 2006-034410 ; RTD civ. 2007, p. 614, 
obs. M. Grimaldi

(4) C'est sur la donation-partage que brevitatis causa l'on 
raisonnera à titre principal.
(5) R. Savatier, « Les libertés de l'ascendant en matière de 
donation-partage et les limites techniques de la notion de 
partage d'ascendant » : Defrénois 1952, p. 25, n° 27036

fa m i l l e - patrim o ine - D EF RÉN OIS - N° 7 - 15 avr il 2014

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