Defrénois - La Revue du notariat n° 7-2014 - 32

B. Au terme d'une donationpartage transgénérationnelle
14. La réorganisation de l'œuvre libérale, autrefois possible dans la seule donation-partage, l'est
aujourd'hui dans celle transgénérationnelle. Et
c'est là encore par renvoi que l'article 1078-7 procède en énonçant que « les donations-partages
faites à des descendants de degrés différents
peuvent comporter les conventions prévues par
les articles 1078-1 à 1078-3 ».
15. Nul doute qu'à ce titre ascendant dona-

teur 21 et enfant donataire peuvent mettre au
lot du second une donation reçue par lui du
premier. Mais il se peut aussi qu'ascendant donateur et petit-enfant donataire conviennent d'une
incorporation 22. L'incorporation permet en
effet en pareille hypothèse de prendre sur la part
de réserve de la souche ce qui ne pouvait l'être
jusque-là que sur le disponible, tout en continuant à exclure le rapport.

En pratique
Dans le cas d'une semblable incorporation
convenue entre ascendant donateur et petitenfant donataire, une condition s'ajoute à celle
traditionnellement requise pour l'incorporation : non plus seulement le consentement du
donataire - le petit-fils - mais aussi celui de
l'enfant qui s'efface - le fils. Car si un petitenfant, qui n'est pas héritier présomptif, peut
être alloti sur la part de réserve de son auteur,
c'est à la condition que ce dernier y consente
(C. civ., art. 1078-4 et 1078-5, al. 2).
16. À ceci s'ajoutent les hypothèses d'incorpora-

tion par changement d'attributaire. C'est admettre,
comme dans la donation-partage, que la donation autrefois faite à un enfant soit mise au lot d'un
autre enfant. C'est aussi et surtout admettre que
la donation autrefois faite à la première génération vienne allotir en tout ou partie la seconde. La
lettre du texte ne s'y prête certes pas davantage
que dans le cas de la donation-partage ordinaire
(v. supra n° 13), voire moins encore ; car s'il peut
(21) Car c'est uniquement, on le sait, dans la ligne directe
descendante qu'est admise la donation-par t ag e
transgénérationnelle.
(22) A. Thurel, « La réincorporation transgénérationnelle » : JCP N 2012, 1203, n° 24

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s'agir d'allotir un « gratifié », il peut aussi s'agir
d'allotir un petit-enfant non encore gratifié, tandis
que son auteur, qui s'efface, l'a été. Aussi faut-il,
au-delà de la lettre, en appeler une nouvelle fois
à l'esprit des textes. Admettre le glissement vertical d'un allotissement au sein d'une souche (le
petit-fils étant alloti de la donation faite au fils),
c'est donner ses effets au mécanisme même de
la donation-partage transgénérationnelle en permettant qu'un enfant consente à s'effacer au profit de sa descendance. Permettre une translation
oblique (le neveu étant alloti de la donation faite
à l'oncle), voire horizontale (le cousin l'étant de
celle faite à la cousine), c'est transposer à la donation-partage transgénérationnelle la modification
par changement d'attributaire que l'on s'accorde
à admettre dans la donation-partage ordinaire
(v. supra n° 13), moyennant le consentement de
l'enfant représenté.
17. À partir de là, la liste des possibilités est celle,
variée, des donations-partages transgénérationnelles. L'effacement peut être le fait d'un ou plusieurs enfants ; profiter à un ou plusieurs de leurs
enfants ; et porter sur tout ou partie de l'allotissement. Cette dernière faculté, au demeurant, se
dédouble. Elle peut s'entendre quantitativement,
l'enfant s'effaçant pour une partie de la libéralité et en étant alloti pour le reste. Mais elle doit
aussi pouvoir s'entendre qualitativement : ainsi
de l'enfant gratifié en propriété, qui consentirait
à l'allotissement de ses propres enfants tout en
souhaitant conserver l'usufruit des biens donnés ;
ainsi de celui gratifié en nue-propriété, qui se
réserverait un usufruit destiné à s'ouvrir au décès
de son auteur 23.
18. Du reste, les facultés d'incorporation ouvertes
pour des libéralités en ordre dispersé le sont aussi
pour celles qui ont déjà fait l'objet d'un partage
anticipé, le partage d'ascendant réalisé entre les
enfants étant repensé au profit de tout ou partie
des petits-enfants aux termes d'une donation-partage transgénérationnelle qui l'incorpore. L'hypothèse et l'éventualité d'une incorporation seulement partielle de la donation-partage, limitée à
certains lots, ont été détaillées dans les colonnes
de cette Revue aux termes de développements
auxquels on renverra 24.
19. On s'en tiendra simplement à quelques rap-

pels sur les effets d'une incorporation avec glissement au sein d'une souche d'une génération
(23) E. Naudin et M. Iwanesko, « La donation transgénérationnelle, une alternative à la donation par le nu-propriétaire de la nue-propriété ? » : JCP N 2012, 1390. Comp. :
F. Fruleux, « Réincorporations transgénérationnnelles et
usufruits successifs » : JCP N 2011, 1213, nos 38 et s.
(24) M. Grimaldi et R. Gentilhomme, « Rendre transgénérationnelle une donation-partage antérieure » : Defrénois
30 sept. 2011, p. 1344, n° 40094
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