LA LETTRE TERRITORIALE DE L’AGENCE DE L’EAU SEINE-NORMANDIE - BASSE NORMANDIE - N°13 - Novembre 2015 - 5

Parole à...

PIERRE AUBRIL

Maire de Ravenoville

lectivités à prendre en main la gestion du trait
de côte, en se plaçant à la bonne échelle géographique, mais aussi temporelle. Cela implique une
vision partagée et une perspective à long terme »,
résume Manuel Sarraza. Grâce à LiCCo et à
l'appel à projets régional, les élus locaux ont
désormais les clés pour envisager l'avenir,
« une boîte à outils leur permettant d'examiner
l'ensemble des scénarios envisageables », selon
le chargé de mission. Les collectivités ayant
répondu à l'appel à projets « Notre littoral
pour demain » bénéficieront de formations
organisées par l'Institut régional du développement durable de Basse-Normandie (IRD2).
Les territoires des côtes Est et Ouest du
Cotentin, et le Pays de Coutances ont déjà
suivi ce cycle de formations.
Enfin, pour élaborer leurs stratégies, les porteurs de projets pourront recevoir une subvention de la Région, à hauteur de 50 % de leurs
dépenses, dans la limite de 40 000 euros par
territoire. D'autres financements, dont ceux
de l'Agence de l'eau, seront également mobilisables.

S'informer pour agir
À la Maison de la nature et de l'estuaire, à Sallenelles, on a pris le parti de l'humour. L'exposition « Debout les vaches, la mer monte ! » qui
s'y tient jusqu'en décembre 2015 aborde avec
le sourire la question du réchauffement climatique et de son impact sur le littoral normand
et l'estuaire de l'Orne. Le ton est léger mais le
contenu, qui s'inscrit dans le prolongement

du projet LiCCo, a été élaboré avec la participation des organismes scientifiques régionaux
compétents : le Centre d'études et de recherche
sur les risques et les vulnérabilités, le Groupe
d'étude des milieux estuariens et littoraux
de Normandie, le Laboratoire universitaire
d'histoire quantitative, le Conservatoire du
littoral... qui étaient les partenaires scientifiques du programme LiCCo.
Au Val de Saire, à Saint-Pierre-Église, Fermanville ou Cosqueville, un cycle de conférences
organisé par le Conservatoire du littoral et la
communauté de communes de Saint-PierreÉglise propose, jusqu'à décembre, de retracer
l'histoire de ce territoire littoral, du paléolithique à nos jours. Une mise en perspective
indispensable pour imaginer l'avenir du Val de
Saire d'ici à 2050. Les mêmes intervenants
scientifiques du LiCCo sont à nouveaux
sollicités.
Il ne s'agit pas d'accepter ou non le changement : il n'y a guère le choix. Il faut s'y préparer.
Si les estimations diffèrent sur l'appréciation
de la hausse du niveau marin en Manche, le
constat de l'accélération générale de cette
hausse depuis deux décennies est sans équivoque. Or des variations même faibles ont des
impacts forts sur les profils des rivages. Le
changement climatique risque de s'accompagner d'une augmentation en fréquence et
en intensité des événements météo-marins
extrêmes, comme les tempêtes. Ce n'est
qu'en anticipant le risque qu'il sera possible
d'en limiter les impacts.

« L'intérêt global doit
primer sur les intérêts
locaux ou partisans »
J'ai été associé au programme LiCCo sur
le secteur de la baie des Veys en qualité
de maire de Ravenoville et de vice-président
de la communauté de communes de la baie
du Cotentin. Notre littoral, en zone basse,
a toujours été vulnérable et a évolué. Les
activités humaines ont voulu figer le cordon
littoral, ce qui a impliqué la réalisation de
nombreux ouvrages de protection tels que
des digues et des vannages. Alors que l'État
s'est désengagé de l'entretien de ces
ouvrages, la question de leur pertinence se
pose de manière accrue du fait de la probable
élévation des eaux. Il n'est plus possible de
gérer localement ces ouvrages, une politique
globale est nécessaire : nous sommes tous
intimement liés les uns aux autres, y compris
avec les communes situées en bord de
rivière. Une des questions fondamentales est
de savoir qui sera en charge de cette politique
littorale. Aujourd'hui, la défense contre la
mer incombe aux petits syndicats de
propriétaires fonciers. Ce n'est clairement
pas la bonne échelle. Il faut inventer une
gouvernance plus vaste. Sur la baie des Veys,
nous sommes quatre communautés de
communes. Nous devons travailler ensemble,
de manière concertée. L'intérêt global doit
primer sur les intérêts locaux ou partisans.
Nous ne pourrons pas défendre pied à pied le
trait de côte, il faudra faire des choix et
laisser, par endroits, la mer gagner du
terrain. Je suis aussi exploitant agricole,
j'élève des vaches laitières dans une zone
qui pourrait être submergée. Peut-être que
dans vingt-cinq ans, mon fils y fera pâturer
des moutons de pré-salé. Nous devons rester
humbles et accepter de nous adapter. »

Aller plus loin :
* Le site du projet LiCCo : www.licco.eu
* Sur www.rolnp.fr, les lettres d'information
« Côtes et Mer » présentent clairement les enjeux
et les perspectives du littoral normand.
* Renseignements sur l'exposition
« Debout les vaches... la mer monte » : www.cpiedvdo.fr,
et sur les conférences au val de Saire :
www.conservatoire-du-littoral.fr ou 02 31 15 29 97

NOVEMBRE 2015

- AGENCE DE L'EAU SEINE-NORMANDIE : BASSE-NORMANDIE -

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