À PARIS - N°68 - Hiver 2018-2019 - 22

Reportage photos : Emilie Chaix / Mairie de Paris

22 * G R A N D A N G L E

Vue sur Paris depuis le potager sur le toit de l'Opéra Bastille (12e).

L'agriculture urbaine
essaime à Paris

Impensable il y a quelques années, l'agriculture urbaine prend racine petit à
petit dans les immeubles parisiens. Cette nouvelle pratique, qui répond au
besoin d'espaces verts et d'une consommation de produits issus de circuits
courts, marque aussi un changement profond de la conception de la ville.

I

ls poussent au Cachemire, sur les
plateaux d'Iran, dans l'Atlas
marocain... et désormais dans le
13e arrondissement de Paris.
À quelques minutes à pied du parc
Montsouris, 35 000 bulbes de safran
viennent d'éclore pour la première
fois cet automne sur le toit du
Monopr i x de la r ue Dav iel .
L' équ iva lent d 'u n terra i n de
football ! En quelques semaines, les
locataires des immeubles attenants
ont vu le revêtement noirâtre du toit
se transformer en un parterre de
petites fleurs mauves. Le résultat
de l'expérimentation éphémère d'un
agriculteur utopiste ? Pas le moins
du monde. Outre le fait que la
célèbre épice était déjà cultivée au
Moyen Âge en Île-de-France, la
safranière de la rue Daviel fait partie
d 'u n v a s t e m o u v e m e n t d e
développement de l'agriculture
urbaine à Paris.
30 hectares d'ici à 2020
Au cœur de cette dynamique de
végétalisation du bâti, il y a l'appel
à projets Parisculteurs. Cette mise
À P A R I S - Hiver 2018-2019

à disposition de bâtiments publics
ou de partenaires de la Ville va
permettre la création, d'ici à 2020,
de 30 hectares d'espaces agricoles,
soit la superficie des parcs des
Buttes-Chaumont et de Belleville
r é u n i s . Av e c u n o b j e c t i f
environnemental aux multiples
facettes  : sensibilisation à une

«  L'avantage
en ville, c'est
qu'il ne gèle
pas. Par ailleurs,
l'ensoleillement
sur un toit est
optimal.  »

consommation en circuit court,
développement de la biodiversité,
rég u lation de la température
ambiante, rétention des eau x
pluviales, etc.
Affairé à ses tomates sur le toit de
l'Opéra Bastille (12e), Frédéric
Madre, ingénieur écologue et
responsable du potager de 2 500 m2

qui trône depuis cet été sur le
bâtiment, abonde en ce sens : « Ce
qui nous motive, c'est de créer de la
biodiversité, de participer aux
trames vertes essentielles pour la
faune, tout autant que de faire
tampon en cas de fortes pluies en
captant une partie de l'eau. » Mais
les bénéfices de la végétalisation des
toits ne s'arrêtent pas là. Grâce à
l'isolation thermique qu'il procure,
son potager offre par exemple à
l'Opéra plus de fraîcheur en cas de
fortes chaleurs.
Paniers bios pour l'Opéra
Les toits de Paris sont-ils pour
aut a nt compat ible s ave c le s
contraintes de l'agriculture, de
surcroît bio ? « L'avantage en ville,
c'est qu' il ne gèle pas, explique
l ' i n gé n i e u r. Pa r a i l l e u r s ,
l'ensoleillement sur un toit est
optimal. Le fait d'être en hauteur,
plus en prise avec le vent, nous
protège également des maladies qui
touchent les plantes. » Résultat : à
l'occasion des premières récoltes cet
autom ne , l a pro duc t ion f ut
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