Repères - N°44 / Janvier 2020 - Le magazine de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire - 7

FAITS ET PERSPECTIVES
PROCESS
EPR de Flamanville :
les anomalies de réalisation des soudures
Le problème de soudures concerne les tuyauteries principales d'évacuation de la vapeur du circuit secondaires de l'EPR. Elles
traversent l'enceinte de confinement, composée de deux parois. Huit soudures de traversée d'enceinte sont localisées au
niveau de tuyauteries situées entre les deux parois.

Générateurs de vapeur

Enceinte interne

Enceintes interne
et externe de
confinement

Tuyauteries de
vapeur principales

Cœur de réacteur
Soudures de traversée d'enceinte numérotées de 1 à 8
Les tuyauteries de vapeur principales (VVP), en exclusion de rupture,
comportent 66 soudures, dont 8 au niveau de la double enceinte de confinement du réacteur.
Ces soudures présentent des écarts de réalisation.

choix du métal d'apport utilisé pour leur
réalisation. L'exploitant propose de réaliser
des essais sur maquette et d'expertiser une
soudure jugée représentative pour justifier l'acceptabilité de celles du circuit VVP.

L'exclusion de rupture :
une démarche plus stricte
Pour les experts, le problème ne peut être
traité aussi facilement. Ces tuyauteries et
leurs soudures sont en « exclusion de rupture ». Il s'agit d'une démarche qui assure
- par la mise en œuvre de dispositions à la
conception, fabrication et exploitation -
qu'une rupture de tuyauterie est suffisamment improbable pour qu'elle puisse ne pas
être étudiée. Cet événement est dit « exclu ».
L'objectif de la justification de l'exclusion est
d'apporter la garantie du maintien de l'intégrité des tuyauteries pendant la durée de vie
de l'installation. Cela nécessite un haut niveau de qualité de réalisation. Usuellement,
cette démarche ne s'applique qu'aux gros

équipements des réacteurs, dont la cuve, les
générateurs de vapeur, le pressuriseur et les
volutes des pompes primaires.
Pour l'EPR de Flamanville, l'électricien a
proposé à l'ASN que l'exigence d'exclusion
de rupture soit aussi appliquée aux tuyauteries de vapeur principales. C'est une première en France. Ce choix conduit à ne pas
installer de dispositifs qui limiteraient les
conséquences d'une rupture de tuyauteries.
« EDF ne prévoyait pas de renoncer à la démarche d'exclusion de rupture mais ne respectait pas les exigences qu'il avait retenues
pour la justifier, explique Olivier Loiseau,
responsable du service en charge du dossier
à l'Institut. Or ces exigences ont été acceptées
par l'Autorité de longue date. Ce revirement
méritait un examen approfondi. »

Revenir aux règles de l'art
L'IRSN mobilise trois personnes à temps
plein pour réaliser une expertise approfondie du dossier. Bernard Monnot et Julie

Tuyauterie

Fourreau

Enceinte externe

Krochmaluk, spécialistes en métallurgie, réalisent un important travail documentaire.
En février 2018, Julie Krochmaluk passe
deux jours à Flamanville lors d'une inspection pour participer à un examen approfondi des spécifications d'approvisionnement, fiches d'écart et fiches de contrôle.
« En retraçant l'historique de la fabrication,
on s'aperçoit que des écarts apparaissent dès
2013, souligne-t-elle. Le fabricant n'indique
pas aux sous-traitants les spécifications liées à
l'exclusion de rupture. Des produits d'apport
différents de ceux utilisés lors de la construction du parc électronucléaire EDF sont retenus, alors qu'ils ne respectent pas l'ensemble
des exigences du référentiel de construction
(RCC-M). Ces écarts ne donnent pas lieu à
une remise en cause des options techniques
retenues. » L'Institut rend un avis en avril
2018. Il pointe les insuffisances du système
de surveillance. Il souligne le manque de rigueur des prestataires, mettant en cause la
culture de sûreté.
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