Repères - N°43 / Octobre 2019 - Le magazine de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire - 12

Salle de commande du dispositif d'essai Epicur.

L'iode voyage sous des formes
chimiques diverses dont la dangerosité
et le comportement varient.
puis dans l'enceinte de confinement. L'activité portée
par l'iode provient surtout de l'isotope « 131 », supposé être de l'iode moléculaire, un gaz composé uniquement de deux atomes d'iode. Or, à Fukushima, les
instruments de mesure ont aussi détecté une grande
quantité d'iode 131 gazeux organique, lié à des atomes
de carbone. Quand la transformation s'est-elle opérée ?

Des réactions inattendues
dans le circuit primaire
Dans la continuité du programme Phébus, le programme Chip2 s'est focalisé sur le circuit primaire.
Vidé de son eau liquide, il constitue, par ses conditions
de pression et de température, un milieu spécifique
peu étudié. De nombreux éléments chimiques issus ou
non de la fusion du cœur s'y côtoient. Leurs réactions
ont été étudiées séparément à Cadarache (Bouchesdu-Rhône) sur plusieurs bancs instrumentaux. Les
dépôts obtenus ont été analysés à l'Institut des sciences
moléculaires de l'université de Bordeaux, équipé d'outils de microspectroscopie optique très précis.

À LIRE

500

fois plus

En Europe, en
conditions normales
d'exploitation,
l'industrie
pharmaceutique
rejette environ 500
à 1 000 fois plus
d'iode 131 que les
réacteurs nucléaires.

1. Avec une demi-vie de 8,02
jours, son activité est divisée
par seize en un peu plus d'un
mois.
2. Chimie de l'iode dans le
circuit primaire (Chip).

La transformation
de l'iode dans
l'atmosphère
mieux comprise
www.irsn.fr/R43

Page 12 - Repères N° 43 - octobre 2019

3. International Source
Term Program (ISTP) puis
Source Term Evaluation and
Mitigation (Stem).
4. Accident Source Term
Evaluation Code (Astec).
5. Réseau appelé NUGENIA/
Ascom.

« Nous suspections le césium de jouer un rôle clé, car
il peut former avec l'iode un aérosol inorganique très
stable, l'iodure de césium, explique Sophie Sobanska,
chargée de recherche au CNRS. Nos résultats
montrent que l'iode est littéralement pris de vitesse par
d'autres éléments issus de la fusion du cœur, notamment le molybdène. Ce phénomène contribuerait à la
formation de l'iode moléculaire. »

Que se passe-t-il dans l'enceinte ?
L'Institut s'est aussi intéressé à l'enceinte de confinement3. À Cadarache, un irradiateur de recherche,
-Epicur, est capable d'en reproduire fidèlement les
conditions accidentelles. « Au départ, nous pensions
que les peintures époxy recouvrant les murs et les équipements étaient responsables de la formation d'iode
organique, se souvient Juliette Colombani, chercheuse en chimie à l'IRSN. Elles attirent naturellement
l'iode. Et dans des conditions élevées de rayonnement,
d'humidité et de chaleur, elles peuvent se dégrader, libérant de l'iode lié à du carbone. » Lors des essais, l'iode
moléculaire est déposé sur des supports peints, puis
soumis aux rayonnements gamma. Dans toutes les
conditions étudiées, une quantité modérée d'iode
organique est produite. Après quelques heures, la
réaction s'arrête presque totalement. Les quantités
mesurées à Fukushima ne s'expliquent donc pas par
ce phénomène.
Les soupçons se portent à présent sur les composés
organiques volatils comme le méthane, produit issu
de la décomposition des polymères - câbles électriques, peintures... Un nouveau projet de recherche
est à l'étude.

Un logiciel simule tous les scénarios
Les campagnes d'essais alimentent et améliorent les
modèles informatiques de simulation. Le code Astec4
développé par l'IRSN est utilisé par les partenaires du
réseau de recherche de la Commission européenne

Réacteur chimique pour la production d'iode gazeux
sur l'installation Persée destinée à mieux comprendre
les pièges à iode.

DOSSIER

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