Expertises des Systèmes d'information - Juin 2022 - N°480 - Le mensuel du droit de l'informatique et du multimédia - 235

DOCTR INE
DONNÉES
Mémoire numérique :
enjeux et perspectives
La mémoire numérique peut être définie comme
le stockage de données sur de nombreux supports
de notre vie quotidienne, allant du téléphone
mobile à l'ordinateur de bureau1
. Si ce terme était
jusqu'alors plutôt utilisé pour désigner l'open data
en matière de décisions judiciaires2
, il est intéressant
de l'envisager plus largement à la fois pour
des données numériques mais aussi comme
preuve essentielle à la caractérisation d'infractions
pénales.
L
a mémoire numérique est
au cœur d'enjeux des plus
importants,
à
savoir
la
protection de la vie privée3
mais aussi la préservation de l'ordre
public. Elle a été mise en valeur
à l'occasion d'une table ronde
au cours de la 8ème édition des
confluences pénales de l'Ouest4
qui s'est déroulée en mars dernier
à Angers.
La mémoire numérique est à la
fois saisie par
l'amnésie et par
l'hypermnésie. Son ambiguïté est
réelle puisqu'elle peut et doit dans
certains cas être oubliée, cachée,
mais elle est aussi attaquée et dans
ce cas, il faut essayer pour caractériser
des infractions pénales d'en
retrouver au moins des lambeaux.
Il convient ainsi d'aborder en
premier lieu les situations dans
lesquelles la mémoire numérique
peut être effacée ou atténuée, puis
les cas où, bien qu'elle soit attaquée,
le législateur a mis en place des
procédures pour que les services
d'enquête puissent la capter quand
elle revèle des éléments de preuve
indispensables pour caractériser
des infractions.
Le maintien de données concernant
une personne peut lui nuire et c'est
pourquoi le règlement général sur
la protection des données (RGPD)
a introduit un droit à l'oubli dans
un objectif de protection des
citoyens. Le droit à l'effacement
s'exerce dans les conditions prévues
à l'article 17 du règlement (UE)
2016/679 du 27 avril 2016. Le droit à
l'oubli correspond à « la possibilité
offerte à toute personne concernée
par un traitement de ses données à
caractère personnel, d'en demander
l'effacement et/ou le déréférencement
si le responsable du traitement
est un moteur de recherche ».
En pratique, certaines sociétés
commerciales proposent de faire
déréférencer quelques-unes des
traces que l'on souhaite voir
disparaître du web. Mais en réalité,
elles ne font que les masquer en
ajoutant d'autres données qui vont
prendre le dessus sur les données
gênantes dans la liste des résultats
sur les moteurs de recherche. Il
devient seulement plus difficile de
les trouver. Quant au droit à l'oubli
EXPERTISES JUIN 2022
La mémoire numérique
oubliée et atténuée
promis par Google, il consiste juste
à ne pas afficher les sites gênants
mais ils existent toujours ; ce droit
à l'oubli semble donc bien illusoire
comme le fait remarquer JeanGabriel
Ganascia, président du
comité d'éthique du CNRS.
Le législateur européen a assorti
le droit à l'effacement de plusieurs
limites énoncées à l'article 17 du
RGPD. Ainsi, le droit à l'oubli peut
être limité face à d'autres intérêts
comme le droit à la liberté d'expression
et d'information5
.
La mémoire numérique
attaquée et recherchée
L'actualité relative à la cybercriminalité
-la plupart du temps des
cyberattaques visant
et donc la mémoire numériquedémontre
une hausse constante du
phénomène. Ainsi en 2021, ce fléau
a coûté plus de 6 000 milliards de
dollars, soit 5 700 milliards d'euros
au plan mondial6
. Les Etats, le
secteur privé, les entreprises et les
particuliers sont des cibles régulières,
si bien que des stratégies de
cybersécurité se mettent en place
progressivement.
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les données
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