SIGMAG - N°34 - Octobre 2022 - 3

ÉDITO
© Peter H
LA GOUTTE D'EAU
L
a prise de conscience est-elle enfin là ? Il faut avouer que
printemps et été nous ont offert deux saisons de tous les
excès. Par endroit, la nature a été débordante avec des
submersions, pluies et inondations aussi impressionnantes que
mortelles. Ainsi, au Pakistan, pays pour plus d'un tiers submergé,
plus de 1.100 personnes sont décédées et un million de maisons
ont été détruites. Ailleurs, les températures ont joué avec les
extrêmes. Comme moi, vous l'avez bien lu : 53 degrés atteints
en Iran !?! Vous vous rendez compte que, pour prévenir les
risques sanitaires, un arrêté de 2005 impose qu'un ballon d'eau
chaude soit réglé « entre 50 et 60 degrés » et qu'au robinet de
salle de bain, l'eau ne doit pas dépasser les 50 pour éviter
brûlures et surconsommations énergétiques. Respirer à 53
degrés tient de la science-fiction. Enfin, tenait... Car même les
experts sont à un point où ils n'estiment plus nécessaire de
qualifier les épisodes caniculaires « d'exceptionnels », tant ils
sont entrés dans la (nouvelle) norme. Finies les deux ou trois
nuits à suer, quand il faut désormais compter en semaine(s). Si
je passe sur le calibre des grêlons et les trombes marines,
arrêtons-nous sur cette sécheresse qui s'est durablement
installée... Une des conséquences est le retrait des sols argileux.
Résultat : murs de maisons fissurés, terrasses soulevées et
jardins ouverts. Vous pouvez imaginer que lors d'un dîner aux
GéoDataDays, on m'a montré les photos d'impressionnantes
crevasses, plutôt que d'agréables souvenirs de vacances !
Autre effet du changement climatique, les cours d'eau se
sont radicalement asséchés, au point de faire réapparaitre
des « pierres de la faim ». Ces roches gravées d'une date sont
effrayantes. Normalement, elles reposent au fond des rivières et
restent donc invisibles. « Si vous me voyez, pleurez », indique celle
retrouvée dans le lit de l'Elbe : un funeste avertissement datant
de 1616 ! En France, sur les réseaux sociaux, c'est probablement
le cliché à Saint-Florent-Le-Viel d'un des bras de la Loire qui a
fait le plus parler. Certains climatosceptiques ont tenté de justifier
qu'il y avait bien de l'eau dans l'autre bras, l'électrochoc était là.
D'autant que les exemples se sont multipliés dans les Gorges du
Verdon, au Lac du Broc dans le Mercantour. Mais aussi à la source
de la Tamise, au bord du Rhin et à Turin, où le Pô ben, il était pô là...
Voilà donc la goutte d'eau qui fait déborder le vase de nos
consciences verdoyantes encore bien tranquilles. Alors il faut
le reconnaitre, nous entamions déjà tous quelques efforts sans
que le Président nous le réclame. Mais sincèrement, qui n'a pas
3
un chouïa abusé de la clim cet été ? Et puis, Emmanuel Macron, il
a du la voir, négligemment posée sur un coin de table au conseil
de défense sur l'énergie, l'énorme douloureuse prévue pour le
prochain hiver. L'injonction reste probablement plus économique
qu'écologique, mais nous allons tous devoir nous serrer la
ceinture et sortir les p'tites laines. Parce que, comme dit la pub :
« Là, on est mal »...
En plus de ces injonctions personnelles, il va falloir que vous
nous aidiez, avec votre casquette de pro. Dans de précédents
SIGMAG, nous avions évoqué la coûteuse porosité des réseaux
d'eau et la subtilité du maillage des lignes électriques. Nous
avions aussi relaté à travers divers reportages SIGTV.FR la
manière dont, grâce à des applications cartographiques, il est par
exemple possible de détecter et juguler des fuites. Maintenant les
cadastres solaires doivent être banalisés pour inciter l'installation
optimale de panneaux photovoltaïques. La mise en place de
réserves d'eau de pluie ou de ruissellement doit pouvoir reposer
sur des études fiables pour en garantir le bon fonctionnement
sans nuire aux nappes phréatiques. Sur un autre registre, il
devient indispensable d'inclure une gestion de l'ensemble des
risques, par exemple pour prévenir les feux de forêt dans tous les
territoires. La « surprise » face à tant d'incendies de massifs en
Bretagne ou dans le Nord ne peut plus se renouveler. Ce seront
des thèmes abordés lors du Géo événement [Live+] SIG 2022,
en plus de celui des jumeaux numériques dont vous allez de
plus en plus entendre parler. Car l'agilité des services SIG doit
être de mise. Aux travaux d'analyse de données et de production
cartographique, les géomaticien(ne)s vont devoir accentuer
leurs efforts de communication et participer à l'éducation des
populations. Aussi, comptez sur nous pour vous y aider.
Bonne lecture de ce 34e numéro de SIGMAG !
Nous entamions déjà tous
quelques efforts sans que le
Président nous le réclame. Mais
sincèrement, qui n'a pas un
chouïa abusé de la clim cet été ?
XAVIER FODOR
RÉDACTEUR EN CHEF SIGMAG SIGTV.FR
SIGMAG
https://www.sigtv.fr/ https://www.sigtv.fr/
SIGMAG - N°34 - Octobre 2022

Table des matières de la publication SIGMAG - N°34 - Octobre 2022
