SIGMAG - N°31 - Décembre 2021 - 19

ENQUÊTE
permet aussi de visualiser les
données et de tester les outils déjà
disponibles. À titre d'exemple très
parlant, l'application de GéoAnalyse
GESDEC permet de déf inir un
périmètre d'étude pour effectuer
une analyse du contexte géologique
et obtenir rapidement une synthèse
des conditions d'implantation d'un
projet. Les initiatives et projets
autour du sous-sol se multiplient,
y compris avec la contribution
d 'orga nismes de r e c herc he
et d'entreprises (voir encadré
TopoSub). Il est donc urgent de
prendre du recul pour appréhender
les besoins de l'ensemble des
partenaires concernés et fédérer
une vision commune de l'utilisation
des données du sous-sol. « La
demande en connaissance du
sous-sol est de plus en plus
forte, constate Laurent Niggeler,
responsable de la Direction de
l'information du territoire. Nous
devons avoir une vision d'ensemble,
entre géologie, géothermie ou bien
encore cadastre souterrain, pour
la partager avec tous les acteurs.
Car dans le sous-sol, il y a aussi
des silos » ! D'autant qu'à côté des
aspects purement techniques, il
faut aussi prendre en compte les
nombreux aspects juridiques, que
ce soit pour les restrictions du droit
des sols ou l'obligation de relevé
des réseaux pour laquelle une
ordonnance est prévue à l'horizon
2024. Dans le cadre de la stratégie
de la Géoinformation Cantonale, la
DIT vient donc d'être chargée de
préparer, avec les acteurs genevois,
une étude pour définir le contenu
d'un système d'information multi
thèmes du sous-sol.
Si la modélisation géologique garde
ses spécificités et requiert des outils
dédiés, la gestion des données du
sous-sol fait appel à de nombreux
principes et méthodologies que l'on
retrouve dans les SIG, le BIM mais
aussi le big data et même l'IoT. Il est
alors tentant de se projeter dans
le concept de jumeau numérique
pour l'appl iquer au sous-sol .
Depuis plusieurs années, ces
questions sont au cœur du projet
national MINnD (modélisation
d'informations interopérables
pour des infrastructures durables).
Son objectif est de faciliter la
t r a n s fo rma t i o n n umé r iq u e
QUAND SPÉLÉOLOGIE ET SIG S'ASSOCIENT
En juin 2018l, les pluies de la mousson ont piégé une équipe de 12
garçons et leur entraîneur dans une grotte isolée en Thaïlande, à
proximité de la frontière avec le Myanmar. L'opération de sauvetage,
largement médiatisée, a nécessité une connaissance approfondie du
milieu sous terrain et de son environnement. Une équipe d'experts
a donc été constituée par le Département des ressources minérales
(DMR) en collaboration avec Esri Thailand et la société GIS Ltd., au sein
de Geohazard Operation Center.
Pour créer un modèle virtuel de la grotte, l'équipe a utilisé des relevés
effectués en 1987 par l'association pyrénéenne de spéléologie lors d'une
mission en Asie du Sud-Est. Ces cartes complétées par des travaux
de spéléologues anglais en 2012 et 2016 été vectorisées pour servir
de référentiel. Sur ces bases, l'équipe SIG a étudié toutes les solutions
possibles, de la dérivation des eaux de surface à la recherche des
meilleures options de forage pour pouvoir secourir le groupe.
Les ingénieurs ont travaillé contre la montre pour calculer le bassin, la
direction de l'écoulement et l'accumulation d'eau à l'aide d'un modèle
numérique créé à partir d'images aériennes. L'équipe a ainsi trouvé
deux points d'infiltration pour chacune de ces zones de drainage. Enfin,
les données des capteurs sur les niveaux d'eau et d'oxygène à l'entrée
de la grotte, à 300 et à 1.500 m ont aussi été exploitées. Les mises à jour
temps réel de la carte ont montré la profondeur actualisée de l'eau et la
qualité de l'air, alertant les sauveteurs des conditions changeantes. Elle
a également surveillé les flux radar météorologiques pour anticiper le
volume de pluie tombant sur la zone. Toutes ces données ont permis de
guider les plongeurs et ainsi sauver l'équipe au bout de 18 jours.
d a n s l e d é v e l o p p eme n t d e s
infrastructures et la planification
durable. Les travaux se concentrent
particulièrement sur l'extension
du modèle des IFC pour prendre
e n c ompte l e d oma i n e d e s
infrastructures (ponts, rail, tunnels)
et l ' inté gr at io n d es d onné es
environnementales au sens large, y
compris souterraines. Avec le projet
GEOL_BIM, la Suisse expérimente
aussi l'intégration des données
géologiques spatiales (modèles
3D, monde SIG) aux informations
détaillées des bâtiments (monde
BIM). Le Service géologique national
de Swisstopo et la haute école
spécialisée du Nord-Ouest de la
Suisse FHNW sont responsables
de la mise en œuvre, sous la
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direction de l'Association suisse
des géologues CHGEOL. Le projet a
débuté en mars 2020 et devrait être
achevé au printemps 2022.
Enfin, à l'heure où l'Europe lance
le programme Destination Earth
(DestinE) pour créer d'ici dix ans
un jumeau numérique de la Terre
avec un focus sur le changement
cl imat ique, le sous-sol reste
encore largement à défricher et les
enjeux sont tout aussi importants.
Il s'agit bien d'une nouvelle frontière
qu'il faut continuer à explorer en
rassemblant les compétences
et les acquis de nombreuses
dis c ipl ines , au premier pl an
desquel les les SIG jouent un
rôle essentiel .
Michel Bernard
SIGMAG
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