La revue RH&M - N°91 - Octobre 2023 - 17

de l'ensemble des salariés ?
Quelle est votre implication ?
J'ai un avis qui peut un peu choquer sur
le sujet. Pour moi, ce n'est pas l'incarnation
du DG qui compte, c'est l'incarnation
de l'entreprise. Lorsque c'est le DG
qui porte le sujet, qui brille à travers le
sujet et sur le terrain, ce n'est pas toujours
bien ressenti. Je pense qu'il faut
faire attention à ce que ce ne soit pas
personnalisé. Mon implication, oui elle
est réelle, parce que j'en suis convaincu,
mais je ne veux pas que ce soit moi, je
veux que ce soit clairement l'entreprise.
Quand on parle de SAUR, tout de suite,
on connecte avec nos plans d'action,
ce que l'on fait, nos investissements, la
R&D, c'est ça qui m'intéresse. Quand un
élu ou même un étranger pense SAUR,
il pense transition écologique, transition
hydrique, je le vois comme ça.
Deuxièmement, une entreprise qui
devient une entreprise à mission, mais
qui ne gagne pas d'argent, ça ne fonctionne
pas. La protection de la ressource,
la transition hydrique, ce sont
des sujets qui nous tiennent à cœur qui
sont dans l'entreprise aujourd'hui, on
en parle partout. Mais on a des actions
derrière. Nous avons des contrats qui
commencent à sortir avec des économies
d'eau et nous commençons à négocier ce
genre de choses.
On est dans une phase transitoire. C'està-dire
qu'avant, on gérait des tuyaux. Là,
on est en train de dire qu'on va faire en
sorte que vos nappes ou la ressource
soient préservées pour les générations
à venir.
C'est un autre mode de pensée, mais
quand vous réfléchissez en termes de
management et de leadership, vous
pouvez engager les jeunes générations.
Le tuyau, ça ne les fait pas rêver. Il faut
vraiment amener un changement de
culture et c'est une façon aussi de pousser
l'innovation.
Quels enseignements tirez-vous
de la raison d'être en matière
d'impact ? Est-ce que d'ores et
" Il faut assimiler la raison d'être à un
changement culturel. Il ne faut pas
assimiler la raison d'être à un slogan. "
déjà, vous sentez une bonne
évolution en matière de confiance,
d'attractivité, voire d'impact sur
le business ?
Je pense qu'il y a trois dimensions.
Premièrement une dimension psychologique.
On est passé d'un système
d'abondance où personne ne se posait
de questions à aujourd'hui une prise
de conscience. Aujourd'hui, pouvoirs
publics, collectivités, monde agricole,
industriel, ont compris que l'eau ce n'est
pas un élément inépuisable. Et nous,
SAUR, nous avons été assez plutôt précurseurs
sur le sujet.
Deuxièmement, d'un point de vue opérationnel,
nous sommes capables de
démontrer que nous savons économiser
la ressource. On est capable de produire
de la pomme de terre à l'île de Ré avec de
l'eau réutilisée, parce qu'on a la technologie.
On est capable peut-être demain
de faire des bâtiments autonomes en
eau. Ce sont des sujets d'innovation qui
sont proof of concept d'une raison d'être.
Et bien sûr, il y a l'aspect financier. Et
pourquoi le financier est important ?
Parce que, si le monde de la finance ne
participe pas à ces évolutions, on ne fera
pas de transition hydrique. Les fonds
d'investissement, aujourd'hui, on le
voit quand on négocie les changements
d'actionnaires ou quand on cherche du
refinancement, on ne parle pas de raison
d'être, on parle de KPI. Ce qui est
important, c'est de démontrer que la raison
d'être nous a amenés à des actions
concrètes sur le terrain. Aujourd'hui, on
est capable de le faire parce que quand
vous êtes face à des banquiers, ils disent
montrez-nous la réalité des choses.
Quand on fait une réunion aujourd'hui
avec des banquiers ou des investisseurs,
le rôle de Marie est aussi important que
le rôle du directeur financier ou du directeur
marketing. Il y a une évolution complète
sur ces sujets-là.
En revanche, lorsque l'on doit aligner
quatre ministères sur un sujet, obtenir
37 signatures sur un projet d'eau réutilisable,
c'est assez complexe mais on ne
se décourage pas.
Dans cette perspective, comment
le Conseil d'administration
s'aligne-t-il sur votre raison ? Quel
est l'impact sur la gouvernance ?
On a une chance inouïe chez Saur, c'est
que nos actionnaires, depuis quatre
ans, étaient Suédois, très sensibilisés
à ces sujets-là. Nous avons un comité
trimestriel sur ces sujets, avec Marie et
ses équipes et maintenant les nouveaux
actionnaires hollandais sont aussi très
sensibles à ces sujets. Nous avons un
support total de l'actionnariat. Voire, ils
nous poussent à avancer sur des solutions
concrètes.
Comment faire en sorte que
l'ensemble des collaborateurs
incarne cette raison d'être ?
C'est le plus difficile et c'est pour cela que
nous avons voulu faire cette approche en
partant des collaborateurs. On a engagé
un mouvement culturel de changement
de l'entreprise à travers « Mission
Water ». Il y a eu adhésion au projet, on
a modifié notre marque, actualisé notre
logo et rafraîchit notre communication.
On fait percoler tous ces éléments au
sein de l'organisation. Je serai très heureux
lorsqu'un technicien sur le terrain
parlera avant tout d'économie d'eau et
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