La revue RH&M - N°91 - Octobre 2023 - 12

LE GRAND ENTRETIEN
mation à l'initiative du salarié, ce
compte personnel de formation a pris
une autre dimension. Je crois que c'est
devenu un outil considéré comme un
nouveau levier d'émancipation et
d'autodétermination par les actifs.
Aujourd'hui, on a plus de 6 millions
de comptes activés sur le CPF. C'est
dire l'ampleur de la mobilisation. Et
la vraie réussite, c'est que parmi les
personnes qui mobilisent le CPF, on
trouve principalement des ouvriers et
des employés, et à 50% des femmes ;
alors qu'auparavant il y avait 70% de
cadres.
On va maintenant se projeter
un peu sur l'avenir. Quels
seraient pour vous les projets
vers lesquels vous souhaiteriez
intervenir ou faire bouger les
lignes ?
Vous savez, je suis extrêmement attachée
au dialogue social. Et la formation
professionnelle est éminemment
liée au paritarisme et au dialogue
social. Donc, l'idée pour moi, c'est de
concerter. Il y a un agenda social qui
va être organisé notamment sur les
questions de reconversion.
Ce sera le prochain grand chantier car
nous avons de nombreux dispositifs
de transition professionnelle et ils sont
souvent complexes et peu mobilisés,
cela concerne 0,3% des actifs. Comment
peut-on faire de la reconversion
professionnelle une réalité qui soit
agile, réalisable, financée, et lisible
pour tous ? C'est pourquoi actuellement,
nous réfléchissons à ce qu'on
appelle la « validation des acquis de
l'expérience » inversée, qui est une
formation en situation de travail suivie
par un accompagnateur VAE pour,
à l'issue, obtenir un diplôme tout en
étant rémunéré.
Longtemps, les entreprises m'ont dit :
« Mais si nous avons les personnes
motivées, nous saurons les former ».
Je les ai donc pris au mot et je leur
dis : « je vous suis, identifiez les personnes
que vous avez envie de former
au métier, et avec un accompagnateur
VAE, vous pourrez former cette personne
en situation de travail ».
Oui, regarder ce qui bloque
sur une mesure existante
et lever les freins.
En effet, par ailleurs, j'ai deux grands
chantiers, dont le premier est le passage
au million d'apprentis. L'enjeu
est d'installer l'apprentissage comme
une modalité de formation initiale. Et
à cette fin, il faut réfléchir avec tous les
acteurs sur son modèle économique.
Tout cela est lié avec notre cause
nationale portée par le président de la
République, qui est celle de la réforme
des lycées professionnels.
C'est donc là qu'on peut
constater l'intérêt de votre
rattachement aux deux
ministères.
Exactement. Et ça, c'est tout le pan du
travail qui est préparé avec le ministre
de l'Éducation nationale et de la Jeunesse,
Gabriel Attal, sur la découverte
des métiers au collège avec l'implication
des professeurs de lycées professionnels
mais aussi l'implication du
monde économique.
Dernière question : les lecteurs
de RH&M sont des professionnels
de la fonction RH, des DRH.
Aujourd'hui, qu'attendez-vous
des DRH ? Puis globalement, que
souhaiteriez-vous leur dire ?
Déjà, je voudrais insister sur la place du
DRH qui, pour moi, est centrale dans
les enjeux stratégiques de l'entreprise.
Ils ont toute leur part à prendre dans
la réussite de l'entreprise. Dire aussi
à quel point ils sont pour moi de vrais
relais de déploiement de politiques,
mais aussi d'alertes, de propositions
et de remontées d'informations. Je
voudrais insister également sur le fait
que j'ai besoin d'eux dans le cadre de
la réforme des lycées professionnels
pour mieux impliquer les entreprises
dans la découverte des métiers et ainsi
faciliter les orientations qualitatives
vers les bonnes filières.
J'ai aussi besoin que les entreprises
s'engagent dans l'identification des
mentors. Je souhaite déployer le mentorat
dans les lycées professionnels
sur toute la France. Je souhaite également
qu'ils s'engagent dans la qualité
de la formation du maître d'apprentissage
et du tuteur. C'est la clé pour que
ces dispositifs de formation des plus
jeunes soient réellement de qualité.
Puis, nous aurons à travailler
ensemble sur le CPF. Les entreprises
coconstruisent la démarche de formation
dans laquelle s'engage le salarié.
En contrepartie, l'entreprise va
abonder. Cela permet de travailler un
projet professionnel autour de cette
formation.
Ce sont pour moi les différents axes
sur lesquels nous devons conjointement
avancer avec les DRH dans les
prochains mois pour affiner les outils
à déployer et améliorer l'engagement
des entreprises en lien avec l'Éducation
nationale, et notamment les
lycées professionnels.
P.12 | OCTOBRE 2023 | N°91 LA REVUE RH&M
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