La revue RH&M - N°87 - Octobre 2022 - 47

confiance et maintenir le « flow
state » des collaborateurs. Cette
notion décrit le moment où une
personne est en mesure de consacrer
toute son attention à la tâche
à accomplir (Frimousse, 2022). La
sur-sollicitation des collaborateurs,
à travers des appels vidéos, des
messages, des e-mails a été vécue
par les collaborateurs comme une
pression qui les empêche de se
concentrer. Ainsi, dans un contexte
d'incertitudes et d'organisation
hybride, protéger et ne plus perturber
s'impose (Frimousse, 2021).
L'organisation hybride nécessite le
déploiement d'un « management
augmenté », capable à ce titre de
faire preuve d'une maturité durable.
Les recherches font ressortir la
nécessité de renforcer deux capacités
associées : savoir créer un cadre
de confiance susceptible d'octroyer
une réelle aptitude d'agir à leurs
collaborateurs et être capable de
les challenger, de les soutenir et de
les appuyer (Bouchez 2022). Elles
montrent également l'importance
de la bienveillance perçue (Diard,
2022)
L'impact sur la diversité
et l'inclusion
La crise sanitaire a entrainé de nouvelles
fractures dans les organisations.
La pérennisation du travail
hybride présente des enjeux en
termes d'inclusion. Comment traiter
équitablement les emplois éligibles
ou non au télétravail ? Comment
éviter que les femmes subissent
le désavantage d'une organisation
de travail hybride qui accentuerait
« l'invisibilité féminine en entreprise
» ? Une enquête de l'INED
(2021) lors du premier confinement
montrait que la crise sanitaire avait
exacerbé des inégalités de genre.
L'étude de Deloitte (2022) portant
sur 5000 femmes de 10 pays
différents, montre l'inquiétude des
femmes quant à l'impact du travail
hybride sur leurs carrières. Pour
Belghiti-Mahut une organisation de
travail hybride choisie et flexible et
une organisation figée et imposée,
n'a pas les mêmes conséquences ni
des bénéfices similaires selon les
catégories de salariés et leur genre
(Belghiti-Mahut, 2022).
De nouvelles pistes
de recherche
De nouvelles recherches pourront
apporter des connaissances praticables
permettant de relever les
défis de l'hybride, et lever les obstacles
rencontrés : difficultés pour
intégrer, superviser et évaluer les
personnels, déficit de communication
horizontale et de travail coopératif,
effacement de la frontière
vie privée / vie professionnelle,
renforcement du sentiment d'isolement
au travail (avec les risques
induits sur le plan psychologique),
circulation des connaissances institutionnelles
et maintien de la
culture de l'entreprise et éviter que
le format hybride ne fournisse un
terrain fertile au développement
des silos et réseaux relationnels
cloisonnés et inefficaces, en créant
des potentielles expériences et
cultures à plusieurs vitesses (Bouchez,
2022). Pour inscrire le fonctionnement
hybride dans la culture
interne, il faut considérer ce « nouveau
» mode de travail comme
un changement organisationnel à
piloter (Autissier, 2022). Quelles
sont les politiques RH en matière
de conduite de changement et de
développement des compétences
managériales à acquérir pour gérer
efficacement à distance et veiller
au respect de la vie privée des salariés
? comment parvenir à assurer
une cohésion en interne et instaurer
une culture basée sur la confiance
qui viendra remplacer le management
par le contrôle du travail à
distance ? Comment engager la responsabilité
sociale de l'entreprise
dans ce processus de changement
afin de redonner du sens au travail
et faire de la quête de cet équilibre
vie personnelle-vie professionnelle
une préoccupation centrale pour le
management ?
1. Les recherches sur les formes d'organisations hybrides mêlant
logiques de marché et logiques sociales, logiques de l'État, du marché
et de la société civile, logiques scientifiques et de marché, présentent
également d'importants apports théoriques et managériaux
(Boubakary, 2022, Bruna, 2022)
Références :
* D. AUTISSIER, J.-M. PERETTI, C.-H. BESSEYRE
des HORTS et al. (2022), Les nouvelles organisations
hybrides : organisation et travail
en mode présentiel/distanciel, MA éditions.
* D. AUTISSIER, J.-M. PERETTI, C.-H. BESSEYRE
des HORTS et al. (2021), Travail et organisation
hybride, MA éditions.
* S. BELGHITI-MAHUT (2022), « Le futur du travail
des femmes est-il hybride ? » in Question(s)
de management, N°40, p. 127.
* J.P. BOUCHEZ (2022), « L'hybridation qualitative
et durable du travail » in Question(s) de
management, N°40, p. 130.
* B. BOUBAKARY (2022), « Modes opératoires
des organisations hybrides : analyse théorique
des logiques institutionnelles concurrentes »,
in Question(s) de management, N°40, pp 75-88.
* M.-G. BRUNA (2022), « Quelques thèses récentes
sur le travail et l'organisation hybrides »,
in Question(s) de management, N°40, pp 153-154.
* P. CALIGIURI, H. De CIERI, D. MINBAEVA,
A. VERBEKE & A. ZIMMERMANN (2020),
« International HRM insights for navigating
the COVID-19 pandemic: Implications for future
research and practice », in Journal of International
Business Studies, volume 51, pp 697-713
* S. DIARD, V. HACHARD et D. LAROUTIS (2022),
« Bienveillance perçue et télétravail en confinement :
une influence sur les risques psychosociaux ? »
in Question(s) de management, N°40, pp 107-120.
* S. FRIMOUSSE et J.-M. PERETTI (2022),
« Travail et organisation hybrides en question(s) »,
in Question(s) de management, N°40, pp 121-152.
* S. FRIMOUSSE et J.-M. PERETTI (2021),
« Les croyances managériales dans le cadre
de l'organisation hybride », in Question(s)
de management, N°37, 105-136.
* M. ZESHAN (2021), « Revitalization of control based
HRM system in a digitalized context »,
thèse de Doctorat en Sciences de Gestion, soutenue
le 12-07-2021 à l'Université Paris 1.
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