La revue RH&M - N°87 - Octobre 2022 - 42

Performance sociale
Conseils en droit social
Rachat des jours de repos par le salarié :
l'accord écrit s'impose !
NICOLAS
MANCRET
Avocat Associé,
JEANTET - AVOCATS
Lorsqu'il s'agit de racheter des jours
de repos, comme cela est prévu légalement
pour les collaborateurs au forfait
annuel en jours, l'article L. 3121-59 du
Code du travail impose de conclure un
avenant avec chaque salarié, afin de
déterminer le nombre de jours maximum
susceptible d'être travaillés et
la majoration salariale de ce temps
de travail, laquelle ne peut être inférieure
à 10%. Mais parfois, le salarié va
travailler au-delà du nombre de jours
prévus par la convention de forfait,
sans formaliser le moindre accord avec
son employeur.
E
n cette période de tension
sur le pouvoir d'achat, la
possibilité offerte au salarié
de racheter les jours de RTT
qu'il n'aura pas utilisés afin
de les monétiser est essentielle. À cet
égard, la loi du 16 août 2022 prévoit la
faculté pour le salarié, avec l'accord de
son employeur de monétiser les jours
de RTT sur l'année. L'article 5 de la loi
dispose que les heures correspondant
à la monétisation des jours de RTT ne
s'imputent pas sur le contingent annuel
d'heures supplémentaires, légal
ou conventionnel.
Une question centrale demeure : si
tous les jours de RTT sont monétisés et
donc non chômés, le salarié va travailler
au-delà des 1607 heures annuelles,
ce qui peut conduire à autre risque : le
dépassement de la durée annuelle de
travail et la demande de paiement des
heures supplémentaires.
C'est cette situation qui a donné lieu
à une illustration jurisprudentielle
récente. En l'espèce, un salarié d'une
banque avait travaillé au-delà des 209
jours prévus par la convention de forfait
et réclamait le paiement immédiat
et avec majoration, de ce dépassement
du temps de travail, ce que son employeur
refusait.
Le salarié ayant obtenu gain de cause
devant la Cour d'appel, la banque a
engagé en vain un pourvoi devant la
Cour de cassation. La Chambre sociale
(Cass. Soc. 6-7-2022 n° 20-15.656
F-D) après avoir constaté l'absence
d'accord écrit entre les parties, a relevé
que le salarié avait dépassé en
2013 le nombre de jours prévu par sa
convention de forfait en jours sans que
l'employeur ne mette rien en œuvre
pour éviter la surcharge de travail.
Les juges en ont déduit que cette
situation faisait ainsi ressortir un accord
implicite de l'employeur pour la
réalisation de ces jours de travail supplémentaires
et qu'en conséquence, le
" Lorsqu'il s'agit
de racheter des jours
de repos, comme cela est
prévu légalement pour les
collaborateurs au forfait
annuel en jours, l'article
L. 3121-59 du Code du
travail impose de conclure
un avenant avec chaque
salarié, afin de déterminer
le nombre de jours
maximum susceptible
d'être travaillés et la
majoration salariale de
ce temps de travail. "
salarié était fondé à se faire payer avec
une majoration (10% en l'espèce), les
jours de travail accomplis au-delà du
forfait.
Cette décision est intéressante car
elle illustre les précautions que l'employeur
doit prendre lorsque le salarié
travaille au-delà de l'horaire institué
par la convention de forfait, et le
risque à devoir monétiser ce temps de
travail si le salarié en fait la demande.
On rappellera donc que l'article L312159
du Code du travail impose de
conclure un avenant pour l'année en
cours et précise que cet accord ne peut
pas être reconduit de manière tacite
pour les exercices suivants.
P.42 | OCTOBRE 2022 | N°87 LA REVUE RH&M
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