La revue RH&M - N°87 - Octobre 2022 - 25

d'accéder à ces postes. Mais il est un
fait, ça n'est pas encore le cas. Dans ce
monde en profonde mutation, interroger
la capacité des femmes à être nommées
pour leurs compétences et espérées pour
des qualités développées en lien avec
leur état de minoritaire (Moscovici S.) :
conscience affûtée de la nécessité de
procéder autrement, de valoriser le capital
humain, d'être citoyenne du monde.
L'interpellation du système est globale
et pour aller au- delà des mots, chaque
individu et notamment chaque femme
nommée ou à nommer a un rôle à jouer
pour que le capitalisme inclusif et responsable
devienne réalité !
Que disent-elles ?
L'activité professionnelle comme
clé de réalisation personnelle et
collective. L'exercice d'une activité
professionnelle est directement liée à la
capacité de réalisation personnelle, individuelle
et collective. C'est une « source
d'épanouissement intellectuel, elle me
permet de progresser » ; « c'est une
source de plaisir et de fierté car je réalise
des choses ». Leur activité leur donne une
identité sociale forte. Un quart à peine
cite le fait de « subvenir à ses besoins et
procurer une sécurité financière », mais
elles sont nombreuses à citer la nécessité
de « permettre de concilier vie professionnelle
et vie privée ». Or, les verbatims
démontrent une difficulté à cet égard qui
peut expliquer le refus de nomination à
un poste executive. Cependant, un tel
refus apparait plus souvent lié à un choc
de valeurs.
Il m'est arrivé de dire non
à un poste executive ! Il n'y a pas tant
de refus de promotions : 19% c'est très
inférieur aux résultats d'autres sondages
récents mais on atteint 44% de refus,
lorsqu'on évoque une nomination à des
fonctions exécutive - celles qui nous intéressent
relativement à la loi Rixain ! Si
des raisons de famille et personnelles
sont évoquées, ce ne sont pas les motivations
majoritaires. Elles évoquent : un
autre projet de vie (56%), l'anticipation
d'une charge de travail supplémentaire
« celle de trop » (28%) et des problèmes
de Santé (1 sur 5 - c'est beaucoup !). La
difficulté à accepter une mobilité géographique
est citée à 73%. Or, pour accéder
à une fonction de dirigeante, cette expérience
« ailleurs » a de l'importance. La
question de la double carrière du couple
interfère ici et l'accompagnement par
l'entreprise de l'expatriation est une
demande exprimée dans l'enquête. Pourtant,
ce sont des raisons liées à un choc
de valeurs qui sont prégnantes dans les
résultats. Les répondantes évoquent un
décalage entre valeurs mises en œuvre et
discours politique.
Que changeraient elles avec
une baguette magique ?
Elles demandent un processus de recrutement
« vraiment » équitable pour les
postes de direction avec des actions de
sensibilisation aux biais cognitifs de genre
des recruteurs internes ou externes, un
accompagnement à la prise de fonction
et plus largement de la carrière et, l'accès
au réseau business mixte qui aide à
trouver des conseils et mentors et dont
elles se sentent souvent écartées. Il y a
encore trop de recrutements internes réalisés
sur la base du réseau des dirigeants,
alors que les groupes mettent en place des
programmes talents ; ils ne les exploitent
pas assez.
Elles évoquent l'arrêt de la culture présentéiste,
et une organisation du travail
qui permet d'assumer des fonctions de
haut niveau avec un équilibre des temps
de vie ; l'égalité de rémunération est citée
comme prérequis.
Enfin, l'engagement du dirigeant est ce
qui rend crédible toute la politique de
l'entreprise. Le CEO se doit d'être inspirant
et visionnaire, donner l'impulsion et
promouvoir les valeurs de l'entreprise.
Comex et Conseil (CA/CS) sont aussi
concernés pour que la culture change
vraiment. Si la parité est affichée sur les
murs sans se vivre pleinement au quotidien,
elle n'a aucun sens.
Les entreprises ont la main pour changer
le monde : inclure, diversifier, être miroir
de leur clientèle. Les rémunérations
variables doivent dépendre pour tous
les managers de l'atteinte des objectifs
paritaires comme de ceux sur le climat
et désormais la biodiversité, les mesures
sociétales liées au devoir de vigilance.
Cela dépasse les exigences de compliance
ESG. C'est de performance (court-terme),
de pérennité (moyen-terme) et de mission
(long terme) qu'il s'agit, même si
toutes n'adoptent pas un statut d'entreprise
à mission, toutes sont interrogées
sur leur raison d'être. Le système change
et les femmes comme elles sont décidées
à accompagner, permettre ou forcer ce
changement.
1. MÉTHODOLOGIE DE L'ÉTUDE
Cette étude réalisée à partir d'une
enquête originale a pour objectif de
clarifier les demandes qu'expriment
désormais les femmes dirigeantes en
France, alors même que les politiques
publiques dont la Ioi Rixain du 24
décembre 2021 incitent fortement
les entreprises à plus de mixité des
espaces de pouvoir.
L'enquête s'est déroulée entre juillet
2021 et février 2022 à partir d'un
questionnaire élaboré en utilisant
les connaissances et les ressentis
d'un groupe de travail et divers
études, rapports et documents.
Celui-ci a été adressé au collectif
des certifiées Women Board Ready
- ESSEC, échantillon de295 femmes
aux beaux parcours professionnels
en entreprises ou comme indépendantes,
issues d'environnements et
de secteurs différents et dotées d'une
conscience affutée sur ces questions
de gouvernance après leur formation,
donc un vivier ciblé particulièrement
apte à tester nos hypothèses.
103 réponses ont été obtenues, un
score qui démontre l'intérêt du sujet.
Plus d'informations :
www.academia.edu/80171918/
WP_CERESSEC_CEDE_ESSEC_
Viviane_de_Beaufort_2022_avec_le_
collectif_WOMEN_BOARD_READY_ESSEC
LA REVUE RH&M N°87 | OCTOBRE 2022 | P.25
https://www.academia.edu/80171918/WP_CERESSEC_CEDE_ESSEC_Viviane_de_Beaufort_2022_avec_le_collectif_WOMEN_BOARD_READY_ESSEC
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