La revue RH&M - N°81 - Avril 2021 - 51

CHRONIQUE du MANAGEMENT STRATÉGIQUE

Concilier flexibilité et collectif,
une injonction contradictoire ?
Il faut être flexible, agile, réactif... mais
est-ce possible quand on veut aussi
être participatif, collaboratif, impliquer les parties prenantes, etc.
Le collaboratif, le collectif,
le participatif, une recette
anti-flexibilité
Décider seul, c'est risqué mais facile. Demander les avis des autres,
arriver à la prise en compte d'avis
divers pour prendre une décision,
c'est (peut-être) plus sûr mais c'est
long et complexe et parfois cela
conduit au risque du compromis
inefficace.
C'est toutefois en général positif
et il vaut mieux passer du temps
avant une décision que de passer
un temps fou après la décision
pour calmer le jeu, expliquer,
modifier, voire abandonner. Mais
incontestablement on est loin de la
réactivité et de la flexibilité.
Les parties prenantes,
essentielles mais antisimplicité
La prise en compte de points de
vue divers est devenue essentielle,
et chacun veut avoir son mot à
dire. L'arrivée de parties prenantes, qu'on ignorait allègrement

il y a peu, complique la situation.
L'entreprise doit désormais tenir
compte de ses actionnaires, ses
employés, ses fournisseurs, ses
clients et du régulateur mais aussi
de son environnement social et
écologique. Les associations, les
villes, les ONG veulent être entendues. Et il n'y a aucune raison
que cela s'arrête. Autrement dit,
les décisions se prendront de plus
en plus lentement. Et les parties
prenantes se plaindront de plus en
plus de la lenteur, des rigidités, du
manque de flexibilité, etc.
À titre d'exemple, dans les
Conseils d'Administration, faut-il
plus de femmes, plus de salariés,
plus d'ONG, pour mieux représenter leurs voix, etc. ? Tous veulent
être représentés et nul n'est illégitime à l'être quand on a décidé de
respecter les parties prenantes et
la diversité.
La confiance et la délégation
comme solutions ?
Il ne semble pas y avoir d'échappatoire à la prise en compte des
points de vue divers, et c'est probablement tant mieux. Mais cela
ne veut pas dire qu'il ne peut y
avoir de souplesse dès lors que l'on
accepterait que les « autorités »

DOMINIQUE TURCQ
Président d'Institut Boostzone, auteur de « Le Management
Augmenté », Boostzone - 2013 et « Travailler à l'ère
post-digitale », Dunod - 2019.
Dominique.turcq@boostzone.fr
Vous pouvez retrouver ce billet et le commenter en vous rendant
sur le blog de l'Institut Boostzone :
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en charge des décisions soient
considérées comme correctement
informées des diverses forces en
présence. Ce n'est pas simple mais
c'est le principe de la démocratie
participative et de la confiance. Un
Conseil d'Administration ou un
comité d'éthique par exemple ne
pourra jamais représenter toutes
les parties prenantes de façon
physique par une équité mathématique (faut-il n % de l'un et m %
de l'autre ?) mais on peut espérer
qu'il saura tenir compte des enjeux
de tous, compte tenu des circonstances, grâce à divers mécanismes
d'écoute, de contrôle et d'information, afin que ses décisions soient
considérées comme sages ou à
tout le moins acceptables.
La confiance se donne à des dirigeants qui vont prendre des
décisions pour les autres, par
charisme, par autorité naturelle,
par statut, parfois par démocratie,
etc. mais elle est aussi une sorte
de légitimité permettant alors la
flexibilité et les décisions rapides
car alors l'autorité « représente »
le collectif et peut décider.
Certes, si la confiance est rompue ou si les décisions sont trop
éloignées de ce qui est acceptable
par tous, alors il faut des mécanismes de révocation, comme en
politique où l'on a des élections.
En d'autres termes, la confiance
est essentielle, et la sanction doit
être possible quand ceux qui l'ont
donnée se sentent trahis.
La flexibilité est d'abord un enjeu
de gouvernance avant d'être un
enjeu de management.

LA REVUE RH&M N°81 | AVRIL 2021 | P.51
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