La revue RH&M - N°81 - Avril 2021 - 30

STRATÉGIE

Où se cachent les trois familles
de signaux faibles de sortie
de crise pour les DRH
Un signal faible est un fait paradoxal qui inspire réflexions.
Paradoxal, c'est-à-dire contre
la doxa, la parole commune.
La crise de la Covid décrit trois
familles, trois doxas, où les DRH
vont capter les signaux faibles
cachés.
Pourquoi les signaux
faibles sont cachés
Nous sommes pleins de contradictions. On appelle cela des biais. En
voici quelques exemples. L'ampoule
LED consomme moins d'énergie
que les ampoules à incandescence :
puisqu'elles consomment moins,
elles sont bien plus allumées et au

Philippe CAHEN
Conférencier prospectiviste
Dernier livre : Méthode & Pratiques de la prospective
par les signaux faibles - Édition Kawa

P.30 | AVRIL 2021 | N°81 LA REVUE RH&M

final consomment autant avec une
plus grande difficulté de recyclage.
La voiture individuelle pollue et est
devenue l'objet flagrant de remise en
cause, pourtant les consommateurs
abandonnent les petites voitures
(classe A) au profit de grosses (SUV)
bien plus polluantes. Au niveau mondial, le numérique consomme à peine
plus d'électricité que la climatisation
mais cette dernière a une croissance
supérieure. Le numérique est un
sujet, pas la climatisation.
De ces exemples, retenons que l'opinion est versatile, souvent dirigée par
l'information, que l'émotion prime
sur la raison, et que la science n'est
pas synonyme de preuve pour le plus
grand nombre. Ce qui semble démontré n'est pas nécessairement la vérité.
Ce que l'on croit être un signal faible
est souvent la partie visible de l'iceberg. Le signal faible est caché sous
le niveau de l'eau, nous ne le voyons
pas. Il reste donc à imaginer. Et nous
avons le droit à l'erreur !
Les signaux faibles
du confinement
Le premier confinement, 17 mars 12h
au 11 mai 0h, a été une sidération.
Un million de touristes et travailleurs étrangers ont quitté la France.
Les DRH ont dû solutionner l'équipement informatique à domicile, le
télétravail lorsque c'était possible et
aussi le cafouillage sur l'ouverture
possible de certaines entreprises.
Dans l'urgence, voire la panique,
le télétravail - comme d'ailleurs le
téléenseignement - s'est plutôt bien
installé. Parmi les emplois les plus

mal payés, on a relevé des emplois
indispensables de « deuxième
ligne ». La hiérarchie de la grille de
salaire n'était pas la hiérarchie de la
présence physique indispensable,
ni celle des compétences lorsqu'il
faut s'organiser via un écran. La
hiérarchie des compétences a été
bousculée. D'une part il y a eu cette
nouvelle approche commerciale et/
ou technique des marchés pour beaucoup en berne, notamment comment
continuer à faire des affaires à distance. D'autre part, il y a eu cette
nécessité d'une approche technologique des clients et des équipes
dont les agendas se sont retrouvés
submergés de « calls », appels téléphoniques ou téléréunions. Si le télétravail a fonctionné ces deux mois, il
n'est pas LA solution du travail de
demain. En revanche, les bureaux
doivent se réorganiser pour favoriser les échanges et non les boxes solitaires, casque audio sur les oreilles.
Comment conserver et entretenir le
contact avec les équipes et maintenir
la motivation ou le moral alors que
certains, terrorisés par la maladie,
ne sont pas sortis de chez eux pendant deux mois, voire plus. En avril
2020, RH&M avait publié un article
que j'avais rédigé en février, regroupant symboliquement les effectifs
entre les solastalgiques - ceux qui
étaient enfermés mentalement dans
leurs certitudes négatives - et les
résilients - ceux qui « surfaient » sur
les événements sans perdre leur ligne
de conduite. Je mettais en garde
contre les risques psychosociaux. La
réflexion s'est avérée pertinente.

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