ParaMag - N°400 - Octobre 2020 - HO6

HISTORIQUE

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HISTORIQUE

Record battu, James Williams triomphe le 8 mars 1938.

James Williams installé dans l'avion du
capitaine Michy le 8 mars 1938, pour établir
son record à 11.400 mètres. Il salue le public
de la main avant le départ.

tuer au cours d'un saut à 7000 mètres. Les
mains gelées, il n'aurait pas pu ouvrir son
parachute...
Le 8 mars 1938, à Chartres, Williams
embarque à bord du Mureaux 117 R2 piloté
par le capitaine Michy lui-même. Il est
équipé de vêtements chauffants électriques
connectés à l'avion, et qu'il devra débrancher avant de sauter. L'équipement
comprend un harnais Lemercier type 414 et
un ensemble type 412 se composant d'un
parachute dorsal, ainsi que d'un parachute
ventral qu'il n'utilisa pas. Une bouteille
d'oxygène est logée dans une poche latérale
du parachute de secours, pour la chute.
Barographe
plombé,
chronomètres,
témoins, tout est prévu pour valider le futur
record.
Lorsque Williams enjambe la carlingue de
l'avion, par - 55 ° C, il est à 11.420 mètres
au-dessus du niveau de la mer, et le terrain
d'aviation de Chartres est à 155 mètres d'altitude. Il s'est déconnecté du circuit de
chauffage de bord, a assuré son masque sur
sa bouteille individuelle d'oxygène, et se
lance dans le vide. La chute se passe bien,
Williams est calme, il contrôle son altimètre, consulte son chronomètre, vérifie la
bouteille d'oxygène. Après 170 secondes et
11.175 mètres de chute libre, Williams
cisaille la corde d'ouverture du parachute. Il
n'est plus qu'à 90 mètres du sol, il passera à
peine 17 secondes sous son parachute
ouvert. Mais le record du monde est largement battu, et en beauté !
Le jour même, Williams décrit ses sentiments pour La Vie Aérienne : "Le seul

moment où j'ai éprouvé un peu d'émotion
est celui où j'ai ouvert le parachute. On a
beau dire que la soie s'ouvrira et que la
corde tiendra, ça vous fait toujours quelque
chose. Et comme toujours, j'ai fermé les
yeux pour l'ouverture du parachute. Tout a
bien marché, j'ai rouvert les yeux pour ne
pas rater mon atterrissage."
Avec James Williams, ou plutôt Jean Niland,
la France prend pied subitement dans le
duel aérien qui jusque-là opposait principalement les parachutistes russes et
américains. Le record de James Williams
tiendra sept ans. Il ne sera battu qu'aprèsguerre, le 25 septembre 1945, par le Russe
Romaniouka : 12.000 mètres de chute, et le
signe tangible que, la guerre étant finie, les
hostilités sportives entre Russes et
Américains pouvaient reprendre.

MORT DE

L'HOMME-OISEAU
Le 20 août 1938, le Miroir du Monde titre :
"La mort de l'Homme-Oiseau". Au cours du
20ème siècle, de Clem Sohn à Patrick de
Gayardon, il faudra bien s'habituer à ce titre
récurrent. L'article de 1938 prend un ton
désespéré : "James Williams est mort.
Inconcevable accident qui mit fin à la carrière audacieuse d'un de nos plus audacieux
parachutistes..."
En effet, l'affaire est dramatique à plus d'un
point. Le 14 août précédent, au meeting
aérien de Lons-le-Saunier, l'exhibition du
recordman parachutiste est présentée
comme le clou du spectacle. D'autant que le
célèbre James Williams devra commenter en
pleine chute son 350ème saut pour les spectateurs,
au
moyen
d'un
appareil
radiophonique. Avant de quitter l'avion à
1000 mètres du sol, Williams parle aux spectateurs, leur décrit l'attraction à laquelle ils
vont assister. Le public l'entend grâce à des
haut-parleurs disposés autour du terrain.
Puis il s'élance de l'avion, emportant avec
lui le poste de radio portatif. Un appareil qui,
jusqu'à la seconde de l'écrasement, a
retransmis au public les dernières paroles de
James Williams. Sans que l'on sache pour-

quoi, le parachute ne s'ouvre qu'à dix mètres
du sol, il est bien trop tard... À pleine vitesse,
James Williams vient s'écraser, presque aux
pieds de sa femme, venue l'admirer. C'est la
consternation générale, et toute la presse
française s'en fera l'écho.
Le caractère tragique de son accident
occulta le fait que quelques semaines plus
tard, le Ministre de l'Air devait confier officiellement à James Williams, ou plutôt au
champion français Jean Niland, la direction
d'un stage de formation d'infanterie de l'air,
ceux que l'on appellera plus tard "les Paras".
La France mettait ainsi à contribution la
science et l'expérience de son hommeoiseau pour la formation et le
développement de ses troupes d'élite. Tout
comme le fera l'Angleterre deux ans plus
tard avec un autre acrobate aérien et
homme-oiseau célèbre avant-guerre, Harry
Ward. Quant au petit parisien Jean Niland, il
ne se débarrassera jamais de son nom de
scène et de gloire, James Williams, qui lui
est resté chevillé au corps tant dans les
chroniques historiques que dans les
archives officielles.
Du moins jusqu'à ce que la mémoire du
peuple parachutiste n'oublie complètement
celui qui fut le premier homme-oiseau français à s'élancer d'un avion avec des ailes ■

Bibliographie :
LA VIE AÉRIENNE - 1935 / 1938
LES AILES - 1936 / 1938
LE MIROIR DU MONDE - 1938
L'AÉRONAUTIQUE - 1938
L'AIR - 1943
PARACHUTISTES - 1946
HISTOIRE DU PARACHUTISME
- RENÉ CHANCEREL - 1952
HISTOIRE DE L'AÉRONAUTIQUE
- CHARLES DOLLFUS ET HENRI
BOUCHÉ - PARIS 1942
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