ParaMag - N°400 - Octobre 2020 - HO2

HISTORIQUE

21/07/06

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HISTORIQUE

James Williams de retour d'un saut.

James Williams au début de sa carrière,
équipé d'un parachute à ceinture large,
sans parachute de secours.
Carte postale / collection Francis Heilmann.

WILLIAMS,

LE PARACHUTISTE
ACROBATE AÉRIEN

Ce qu'il y a de curieux avec ce "James
Williams", c'est qu'il parlait le français
avec le plus pur accent parisien. D'où sortait donc ce Williams ? La réalité est celle
d'une décennie ambiguë, administrative
et tatillonne, qui encensait à la fois une
aviation française glorieuse et lui mettait
des bâtons dans les ailes dès que cela était
possible. Enfant de Paris et au physique et
au caractère, à la fois sérieux et blagueur,
Jean Niland avait 19 ans - il est né le 19
mai 1910 à Paris - quand lui vint la vocation de l'aviation. Comme il était peu
fortuné et qu'il ne pouvait se payer le brevet de pilote d'avion, encore moins
l'avion, il se demandait bien ce qui lui
vaudrait un jour d'être aviateur.
La chance lui sourit sous la forme d'un
parachute. En 1928, il se trouve à
Commentry, un meeting d'aviation qu'il
n'aurait pas voulu manquer. Lors du meeting devaient aussi se produire deux
parachutistes. Au dernier moment, l'un
des deux fait défaut. Les organisateurs
commencent à s'affoler, et demandent un
volontaire pour remplacer le défaillant. Se
rendant compte de l'animation qui
régnait près d'un hangar, Jean Niland
s'approche, pose quelques questions. Puis
subitement, il dit : "Présent !". Par cette
interpellation décidée, il vient de jouer sa
destinée. Mais pour le moment, c'est surtout l'homme qui manquait au meeting.
L'organisateur, agissant avec une certaine
légèreté - mais le temps pressait et le
public s'impatientait - ne s'inquiéta pas de
l'âge du néophyte, de sa majorité ou de sa
minorité. Il le prit sur-le-champ, l'équipa
avec un parachute, lui donna quelques
rapides conseils, lui montra du geste comment il fallait faire. Et lui dit : "Allez,
ouste... et rapidement." À 500 mètres de

hauteur, le pilote poussa le jeune Jean
Niland dans le vide. Pour la première et
unique fois en parachute, il eut un
moment d'émotion. Il sauta tout en fermant les yeux, une habitude qu'il
conservera toute sa vie, et en rejetant la
tête en arrière. Trois secondes après, il
tirait sur la corde d'ouverture du parachute, qui s'ouvrit.
Sa vocation était née, mais il n'était pas
encore "James Williams". Il le devint rapidement, parce que mineur, et n'ayant pas
d'autorisation administrative, il ne pouvait pas s'exhiber en public et être
officiellement Jean Niland. Niland aurait
pu être inquiété et poursuivi. Williams
échappait, comme supposé Anglais, à
toute ingérence administrative. Mais une
fois la machine médiatique lancée, difficile de l'arrêter. C'est donc sous ce nom
étranger qu'il fera toute sa carrière,
comme amateur de 1929 à 1931, puis
comme professionnel jusqu'en 1938.
Quant à l'Administration, satisfaite de ce
subterfuge qui arrangeait tout le monde,
elle le laissa en paix...
Devenu fonctionnaire du Ministère de
l'Air en 1938, il tentera tardivement de
reprendre son nom d'état-civil, mais pour
la presse et le grand public, il restera toujours le célèbre James Williams.
Malheureusement, au début des années
30, le simple saut en parachute est une
attraction usée aux yeux du public, trop
souvent vue. On le fait savoir à Williams.
En attendant de trouver mieux, ayant pratiqué la culture physique et la
gymnastique, il se révéla comme acrobate,
faisant la roue avec un trapèze sous l'avion,
et le poirier fourchu avec ses mains sur les
ailes de l'avion en plein vol. Bien, mais
insuffisant. Déjà ces exercices aussi lassaient un public toujours plus exigeant. Il
fallait de plus en plus fort, nécessité fait loi.
Chez Lemercier, le constructeur de para-

chutes, Williams exerça son talent et ses
talents. Il allait pratiquer le "parachutisme
scientifique", aussi bien devant les
membres de la section technique que
devant le public qui allait le voir tomber du
ciel et n'ouvrir le parachute qu'après
quelques secondes. Présenter la chute libre
comme un spectacle tout autant qu'une
expérience, alors qu'elle ne constituait
jusque-là qu'un motif de record, c'était une
réelle innovation.
Il s'essaya d'abord au meeting de
Strasbourg de mai 1935, où il réussit un
saut dans le vide de 10 secondes, puis un
autre de 15 secondes avant de couper la
corde du parachute. Cela représentait des
chutes libres d'environ 700 et 1000
mètres. Williams réédita son exploit au
meeting de Bordeaux, un mois après, en
juin 1935 : 10 secondes pour 700 mètres
de chute, puis 21 secondes. Le public
apprécia, et le commentaire du journaliste
de la Vie Aérienne présent au meeting ne
l'en dissuada pas : "Cela fait toujours frémir de voir un homme dégringoler du ciel
de 1500 mètres, puis de le voir presque
instantanément se balancer au-dessous
d'un parachute qui apparaît immense."
Puisque l'effet est garanti, Williams va
continuer à chuter.

PREMIER

RECORD À

4000

Le premier brevet de parachutiste français
est créé en mars 1936, et délivré par équivalence à 27 parachutistes pouvant justifier de
21 descentes en parachute. Jean Niland, dit
James Williams, est de ceux-là et reçoit le
brevet n° 2. À cette époque, pas de meeting
aérien sans descentes en parachute, mais la
concurrence est sévère. À l'affiche étaient
des noms connus : Williams, Vincent, André,
Vassard, Denois, et la française Edith Clarck,
qui comme Niland-Williams portait en
public un nom anglo-saxon, et représentait
le parachutier Aviorex.

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