ParaMag - N°397 - Juin 2020 - 56

FLASH-BACK

Ministère de la défense) la mise en œuvre
d'un «programme d'essais constructeur»
pour tester le modèle élaboré à Paris.
Six lancers de mannequins sont effectués
qui confirment le bon fonctionnement
du matériel. Bon fonctionnement qui
n'étonne personne, car Dominique Marcu
avait essayé lui-même le parachute, ce
qui est plutôt rare pour un constructeur.

Juin20:397
paramag.fr

Illustration ci-dessous
Dans le dernier numéro de Chute Magazine,
en juin 1978, ce dessin illustrait les textes sur le
Dauphin et sur la réglementation de certification
des parachutes sportifs. Il mettait en scène avec
humour l'avenir hypothétique, mais prometteur,
d'un jeune chef d'entreprise, nouvellement lancé
dans la fabrication de parachute : Dominique
Marcu. Au passage, celui-ci faisait ainsi preuve
de son sens de l'humour, étant aussi le directeur
de la publication pour Chute Magazine !

L'histoire pourrait s'arrêter là, ou presque,
puisqu'il ne reste à ce moment-là qu'à
demander au CEV, via le STAé, de procéder aux essais de sécurité d'emploi,
seuls valables pour obtenir l'attestation
du même nom, avant l'homologation.
Mais l'ironie du sort veille. La SEDPA
s'englue dans le goudron d'un imprévisible dépôt de bilan. Tout arrêter ?
Impensable. Les investissements d'études
ont été lourds et les commandes de
Dauphin affluent. Parachutes de France
décide d'investir à nouveau pour
fabriquer le Dauphin «à la maison».
Parachutes de France remet au STAé ,
mais cette fois sous son nom, la demande
d'essais pour homologation.
Impossible, répond l'administration, vous
n'êtes pas fabricant. Fabricant, oh que
si, puisque les statuts de Parachutes
de France l'ont indiqué de tout temps.
Cela ne suffit pas, vous n'êtes pas agréé.
Rien d'étonnant, rétorque Parachutes
de France, puisque l'agrément n'existe
pas ; mais puisque vous semblez y tenir,
agréez-moi donc. Impossible, nous
n'avons pas de textes, adressez-vous
à Véritas. Consulté, le Bureau Véritas
répond pour confirmer l'inexistence
d'un quelconque texte réglementant les
normes d'agrément des ateliers de fabrication des parachutes sportifs.
Un véritable dialogue de sourds.

ensemble de celui qui fabriquera la bête !
Pendant ce temps, les Dauphin
s'achètent avant même d'être fabriqués.
Les acheteurs, mis au courant de la
situation confuse, ne doutent pas de la
victoire du bon sens. Un défenseur de
l'ordre établi dépose une plainte au nom
du Sous-secrétariat à la Jeunesse
et aux Sports. Motif à ce jour inconnu.

Le blocage
L'affaire s'enlise. Au plan administratif
s'entend, car au plan pratique, Icarius,
l'EIS (École Interarmées de Sports,
ex-bataillon de Joinville) et quelques
autres dauphinisent à tour de bras
et à tour-tour-salto. Côté fédéral,
la position se bâtardise. Coincée dans la
triple mâchoire des exigences des
utilisateurs de pointe, la crainte de
déplaire aux Instances et le mur de
l'information occulte, orientée ou
quasi-néante, la tête a bien du mal à
se garder. D'un côté, c'est l'impopulaire
obéissance-sclérose à une Administration
qui ne saute pas, de l'autre les risques
d'une liberté technique encore peu
pratiquée en France, mais dont le
progrès ne peut se passer. On veut être
prudent, mais on prend quelquefois de
gros risques sans le savoir, là où le
copinage scabreux s'insère en filigrane.
On s'interroge, étonné. Ils veulent
le Dauphin ? Alors qu'on leur donne !
Dans l'affolement on envisage même
de réunir les constructeurs pour décider

DU DAUPHIN AU REQUIN

Par Dominique Marcu
La première réglementation de certification des parachutes sportifs
J'ai créé Parachutes de France en 1973 avec Jean Guntzberger et Rod Murphy.
Un vent de libéralisation, voire de contestation, soufflait sur cette époque
parachutiste. En France, bien qu'enfermés dans un carcan par les dirigeants de
l'époque, le matériel et les mentalités demandaient à évoluer.
Lors d'un voyage aux USA durant l'été 1976, avec Patrick Elbaz, nous avons visité le fabricant américain Guardian Parachutes. Je lui ai acheté les plans d'un
sac-harnais tout dans le dos. Rentrés en France, nous nous sommes
mis à l'œuvre et nous avons créé le Dauphin, sur cette base.
En 1978, après la saisie des gendarmes lors de la Coupe du monde de VR à
Reims (N.d.l.r. : voir article d'Yves-Marie Guillaud «La France, elle m'a laissé
tomber»), nous avons compris que le Dauphin ne survivrait pas aux «pulsions
gendarmiques» fédérales et à la réglementation française de l'époque...
Ou plutôt à l'absence de réglementation sur les parachutes sportifs, car c'est
de ça qu'il s'agissait. Loin de renoncer, nous avons posé cette question au
directeur de la branche certification du STAé: «Vous ne pouvez pas à la fois
nous interdire de produire des parachutes sportifs, et ne pas nous donner les
règles à suivre pour obtenir une certification». Acculé, le directeur a délégué
l'affaire à son adjoint, lequel nous a demandé de lui écrire une proposition de
réglementation de certification. Ce qui fut fait et, le document ayant été jugé
satisfaisant, il a été publié tel quel par le STAé : la première réglementation
de certification des parachutes sportifs était née !
Le Requin a pris la suite du Dauphin, avec quelques évolutions, mais les deux
modèles étaient presque identiques. C'était surtout un nouveau nom commercial, car avec Guy Sauvage, directeur de la communication chez Parachutes
de France, nous pensions avoir été trop gentils dans l'affaire du Dauphin,
et nous avons décidé d'être plus agressifs avec la version Requin.

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