ParaMag - n°312 - Mai 2013 - 12

COURIER DES LECTEURS

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TRIBUNE LIBRE SUR
L'ORGANISATION
SOCIALE DU
PARACHUTISME

Je m'appelle Vincent Haubourg, je suis
parachutiste professionnel et gérant de
la SARL FL140 Parachutisme basée en
Rhône-Alpes En 2008, trois ans après
avoir passé le parapro et exercé un peu
en France et en Suisse, je me suis installé
à proximité de chez moi, en région RhôneAlpes, non sans rencontrer des difficultés.
Dès le départ, l'expérience de mon
passé dans le sport (accompagnateur en
montagne, élève moniteur de ski de
fond, moniteur multisports formé au
CREPS de Montpellier, pisteur nordique)
et dans l'industrie (cordiste, technicien
en faisceaux hertziens), m'a amené à
me poser des questions sur l'organisation de notre activité, car elle me semble
assez lointaine par certains aspects de
ce qui est la règle dans d'autres activités.
J'y retrouvais un peu ce que j'avais vécu
en montagne, sauf qu'à l'époque les
structures lourdement organisées avaient
des salariés et seuls les moniteurs du
bureau des accompagnateurs étaient
indépendants. Je ne m'en suis pas
formalisé, j'ai démarré mon activité avec
l'idée de former ab initio mes personnels,
l'un deviendra je l'espère parapro dans
deux ou trois ans, un autre a dû arrêter,
nos plieurs sont encore avec nous.
Je me suis alors retrouvé à devoir recruter
du personnel et, comme toute la profession est organisée de la même manière,
j'ai fait appel à des travailleurs indépendants ; toutefois j'ai contacté les URSSAF (anonymement) pour connaître la
légalité du montage. On m'a expliqué à
Lyon et Grenoble que c'est illégal !
Grand moment de solitude.

Mai13:312
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12

En 2012, la donne change : le code de
la sécurité sociale est durci fortement,
les gérants comme moi, ou n'importe
quel chef de centre associatif ou professionnel, se retrouvent à devoir porter une
responsabilité sur leur patrimoine
propre. Autrement dit, si l'amende est
telle qu'on fasse faillite, on payera en
plus de nombreuses années durant !
Face à cet arsenal répressif, face aux
signaux envoyés par les différents
organismes représentatifs qui ont soit
précisé le cadre d'exercice, soit proposé
des montages divers et variés, il semblait
important d'obtenir des réponses claires,
argumentées, crédibles et sans faille.
On ne traite pas trois ans de prison
et 225.000 euros d'amende à la légère,
en tout cas pas moi.

En début mars 2013, j'ai donc enfin fait
le pas, en partie pour éclairer une
personne qui souhaitait être employée,
en partie pour enfin avoir une réponse
écrite, claire et précise d'une administration et pas seulement des réponses
orales d’homologues. Nous sommes
d’accord qu’en cas de contrôle ou accident,
je serais seul devant l'administration.
Dans le même temps, j'ai interrogé la
DGAC sur des éléments connexes à cette
question, notamment sur la possibilité
de scinder notre activité (vendre des titres
de transport à des tiers qui développent
leur activité sur une DZ par exemple).
En date du 20 mars 2013, l'URSSAF de
Grenoble a répondu (voir liens Internet),
son courrier intitulé "Rescrit social" a
déjà largement circulé. Les points clés
sont simples : la relation de travail ne
dépend pas de la volonté des parties,
vouloir être indépendant ne suffit pas,
le cadre juridique ne compte pas,
seules les conditions d'exercice de fait
définissent la relation de travail,
c'est l'état de la loi à ce jour.
En résumé, c'est "qui fait quoi et comment"
qui détermine la subordination.
Dans notre cas, l'activité a lieu dans un
cadre organisé et réglementé, et l'administration précise que l'autonomie
technique et pédagogique existe, mais
ne remet pas en cause la subordination.
Les personnels, au moins dans le cadre
décrit, doivent être salariés.
Ensuite, l'autre objet de mon questionnement a lui aussi obtenu une réponse,
à savoir : «Peut on permettre à un tiers
de développer son activité au sein d'une
exploitation ?». En clair, "a-t-on le droit,
en tant qu’exploitant, de vendre des titres
de transport ?" Selon la réponse faite en
date du 25 mars 2013 par Mr Patrick
Gandil, directeur général de l’Aviation civile
(voir liens Internet) ce n'est pas possible.
Et ça ne va pas non plus dans le sens de
la réglementation européenne à venir.
D'autres que moi se sentiront certainement mieux à même de décortiquer ces
courriers, de les détailler et d'y chercher
des signes et des mystères divins...
Pour ma part, j'aimerais plutôt me pencher
sur les conséquences pour notre activité,
sans épiloguer sur la portée réelle des
ces éléments, j’irai de bonne foi dans le
sens de l'administration.
Partons ici du postulat que ce qui s'applique à moi s'appliquera peut-être aux
autres, quelles solutions adopter ?
Ce ne sont pas les contrats qui manquent,
même pour une activité aussi flexible
que la nôtre, du CDI au CDD en passant
par l'intérim, le temps partiel, le CDI
intermittent à venir. Il reste à faire jouer

la créativité sociale centre par centre,
c'est une simple question de volonté.
Pourquoi ne pas en profiter pour mettre
en place une convention collective, une
politique de formation, un accès pour
tous à la Caisse de retraite du personnel
naviguant ?
J'ai entendu souvent des grands cris
d'orfraie face au terme "salariat", bien
souvent au-delà de la liberté d'exercice
(il suffit de créer une DZ pour être totalement libre, pour celui à qui cela tient
vraiment à cœur et qui ne souhaite dépendre
de personne). Des questions de coûts
sociaux et fiscaux sont mises en avant.
Je pense que toutes les professions aimeraient moins de charges, moins d'impôts,
toutefois il n'y a que deux voies dans cette
démarche : mener un lobbying légal,
ou prendre des chemins de traverse…
Il appartient à chacun de bien choisir.
Nous avons aussi la liberté de fixer nos tarifs
pour qu'ils prennent en compte nos coûts,
seule réponse que nous donnera légitiment l'État face à ces questionnements.
Salarier les personnels des centres, ne
serait-ce pas les protéger ? Créer une
véritable équipe pérenne à l'écoute des
clients et des élèves, mettre en place un
parcours de formation, un parcours
professionnel, une protection sociale.
J'ai décidé pour ma part d'associer les
personnels de mon entreprise, à travers
un plan de participation aux bénéfices,
à travers des contrats de formation avec
dédite de formation pour les futurs
professionnels dont nous prenons en
charge les sauts et la formation, à travers
une valorisation du personnel administratif et des pilotes qui sont aussi essentiels
à la vie d'une exploitation.
Les prochains pas seront une mutuelle
d'entreprise, très probablement. La logique
est totalement différente, j’admets que
c'est probablement un choc culturel,
quoi qu'il en soit, j'ai pour ma part lu la loi
et agis dans le sens qu'elle m’impose.
Et j’espère à travers cette tribune avoir
permis la diffusion d’une information
et permis peut-être le début d’une
réflexion sereine.
Vincent Haubourg ■

LIEN
WEB
Courrier de l'URSSAF de Grenoble intitulé
"Rescrit social", daté du 20 mars 2013 :
http://paramag.fr/contenus/download/
URSSAF_20_03_2013.pdf
Courrier de Mr Patrick Gandil, directeur général
de l’Aviation civile, daté du 25 mars 2013 :
http://paramag.fr/contenus/download/
DGAC_25_03_2013.pdf
http://paramag.fr/contenus/download/URSSAF_20_03_2013.pdf http://www.paramag.fr http://paramag.fr/contenus/download/DGAC_25_03_2013.pdf
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