ParaMag - n°308 - Janvier 2013 - 39

Amélie Tirman

> MONDIAL 2012

Nous savions que nos adversaires les Golden Knights avaient beaucoup progressé cette année grâce à des conditions d’entraînement exceptionnelles dont elles bénéficient aux États-Unis. Nous estimions que nos deux équipes étaient au même niveau. Nous étions capables de faire de super-sauts, mais d’autres moins bons, comme ce fut le cas à la dernière coupe du monde à Prostejov où l’on perd contre les Knights. Dans notre phase finale de préparation, et à Dubaï, nous n’avons pas hésité à dire et redire au briefing tout ce qui paraissait important autant que ce qui paraissait logique et acquis. Nous ne voulions rien regretter à cause d’un oubli. Nous savions que la bataille allait être dure, mais le moral était bon. Nous étions déterminées à passer à l’attaque. Jusqu’à la 7ème manche, vous êtes à moins 1 point derrière les US. Comment avez-vous trouvé la force de rester accrochées ? Quel fut votre remède pour bien gérer la pression ? Amélie : Après avoir passé une manche, nous nous concentrions rapidement sur le saut suivant. Nous regardions la vidéo du saut qui venait d’être fait une ou deux fois, puis nous passions à la suite. Pour chacune des manches, Marin avait préparé les vidéos de la sortie et des blocs correspondants et réalisés durant l’entraînement. Cette compilation nous permettait de nous souvenir des pièges et erreurs à éviter. Ensuite, nous briefions debout et sur les planches. Cette routine nous permit de rentrer dans le saut suivant et de nous en imprégner. Nous regardions les scores tombés et nous rebriefions encore le saut suivant, afin de toujours nous projeter dans le futur immédiat. Au tournant de notre compétition, les choses se sont vite enchaînées, car nous sommes parties pour la 8ème manche sans connaître les scores de la 7ème qui fut une contre-performance pour

Phoebus Communication pour la FFP

ParaMag : Suite au remplacement de Laurence alors que vous êtes dans la dernière ligne droite avant Dubaï, comment avez-vous vécu ce changement brutal de situation ? Amélie : Après la regrettable blessure de Laurence, nous avions encore deux stages d’entraînement d’avion et un stage en soufflerie, soit 110 sauts et 2 heures de tunnel avec Sophie qui remplaçait Laurence. Nous avons principalement consacré ce temps pour caler les sorties et les blocs avec Sophie qui s’est adaptée rapidement. On a vite réalisé qu’elle était toujours au top niveau.

Après la tension, la joie enfin pour Sophie et Amélie après le jugement de la 10ème manche.

nous. Nous sommes donc parties en «aveugle» mais déterminées pour faire un bon 8ème saut afin d’effacer le précédent. Cette 8ème manche fut la seule de la compète avec trois blocs, et durant l’année nous n’avions pas été très bonnes sur les sauts à trois blocs. Marin nous a dit avant la compétition qu’il fallait essayer de faire plus de 17 sur un saut à trois blocs. Avec les blocs 20, 9 et 15, cela nous semblait impossible. Alors nous avons visualisé le meilleur saut possible, nous sommes imprégnées d’agressivité et, en l’air, on s’est transcendées ! Nous réalisions 19 points et on plantait les Knights qui avaient fait 17 et qui, par conséquent, étaient maintenant derrière nous à 1 point. Juste avant que nous partions pour cette 8ème manche, les Team4Speed étaient proclamés champions du monde, après une compétition assez difficile. Cela nous a également donné un bon coup de boost ! C’est à la 9ème manche que vous assenez le coup vraiment douloureux aux Knights. Vous faites 30 et elles 26. Vous passez à 5 points devant elles. Que s’est-il passé ? Amélie : Nous savions que nous étions plus rapides que les Knights, mais nous avions fait trop de fautes sur quelques manches précédentes. La 9ème manche était un saut qui déroule, il fallait tout donner et montrer là que nous étions les plus rapides. Juste après la phase de sortie, j’ai eu la certitude que le saut allait dérouler. Au fil des premiers points qui s’enchaînaient, je sentais dans l’équipe une confiance grandissante. Ce sont des instants furtifs mais magiques au sein d’une équipe de haut niveau.

Au sol, en amont, le feeling était excellent sur les planches, lorsque nous préparions cette 9ème manche. Ca déroulait alors que nous avions le soutien du clan français. La magie avait commencé là, sur les planches, avec le profond soutien de Marin, Jérémie et Laurence qui nous avaient suivies pas à pas dans la préparation de ce saut. Puis, avant le départ, tous les autres Français sont venus nous frapper dans la main. Manu Sarrazin, qui était retenu, a même couru jusqu’à l’embarquement pour nous encourager. Après l’affichage du 30 officiel, alors que les Américaines avaient fait 26, j’ai senti la joie m’envahir, mais je l’ai tout de suite refoulée afin de plonger une dernière fois dans la concentration pour la 10ème manche. Je me suis souvenue de notre 3ème manche au championnat du monde précédent en Russie. Nous avions battu le record du monde de nombre de points. Je débordais de joie. Gary Smith (coach d’Hayabusa) m’avait félicitée en me disant, juste après, que ce n’était pas fini, qu’il fallait rester concentrée même si la compétition semblait gagnée pour nous. Depuis, je suis son conseil, manche après manche. Tu es deux fois championne du monde. Quelle émotion as-tu ressenti à l’annonce de ce deuxième titre, comparativement à ce que tu as ressenti pour le premier ? Amélie : J’ai d’abord pensé à Sophie qui est une super championne, et que j’admire énormément. Quand nous nous sommes embrassées, la brillance de son regard traduisait tellement de bonheur. J’étais profondément heureuse pour elle aussi. Je lui suis infiniment reconnaissante pour tout ce qu’elle a fait pour moi et le VR féminin. J’étais contente de ne pas être la seule double championne

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