NEOMA Alumni Mag - N°35 - Juin 2023 - 58

ASSO - TRIBUS -
CLUB FINANCE - 18 avril 2023
REPORTING PERFORMANCE
DURABLE : QUELS ENJEUX
POUR LES FINANCIERS ?
FIN 2022, PLUS DE 35 PAYS EUROPÉENS LÉGIFÉRAIENT SUR LA FORME DU REPORTING ESG.
LA CORPORATE SUSTAINABILITY REPORTING DIRECTIVE (CSRD) ENTRE EN VIGUEUR.
D'AUCUNS PARLENT D'UNE NOUVELLE COMPTABILITÉ, VOIRE D'UN VIRAGE DANS LA
GOUVERNANCE DES ENTREPRISES. CINQ EXPERTS REPRÉSENTANT LES DIRECTIONS
FINANCIÈRES ET DE DÉVELOPPEMENT DURABLE D'ENTREPRISES, AUDIT, INSTITUTION
FINANCIÈRE ET SYSTÈMES D'INFORMATION, RAPPELLENT LES GRANDS ENJEUX À VENIR.
Anne-Claire Ducrocq
(PGE 02)
Head of ESG Reporting de BNP
Paribas
Juliette Gaussem (PGE 11)
Global Head ESG Reporting de
Signify
Le 5 janvier 2023, la Corporate Sustainability
Reporting Directive (CSRD) est entrée en vigueur.
Elle remplace ainsi la Non Financial Reporting
Directive (NFRD), qui encadrait jusque-là les
déclarations de performance extra-financière des
sociétés européennes. Cette nouvelle directive
étend à plus de 50 000 entreprises l'obligation de
fournir des informations sociales et environnementales
de leurs activités. Contre 11 700 précédemment
! Elle augmente également le nombre
d'indicateurs sur lesquelles elles devront reporter,
soit désormais 1 144 données. Celles-ci devront
être détaillées selon un principe de double matérialité,
matérialité financière et matérialité d'impact.
Et figurer dans le rapport de gestion annuel dans
une section spécifique. La directive s'appliquera de
manière progressive. En 2024, les grandes entreprises
cotées (de plus de 500 salariés) ouvrent le
bal. Elles devront récolter les informations pour les
publier début 2025 avec le rapport de vérification.
Les plus petites sont concernées à partir de 2027.
Et les entreprises de pays tiers qui opèrent en
Europe en 2028.
Isabelle Tracq-Sengeissen
(PGE 90)
Associée chez EY
L'ENJEU DU VOLUME ET DE LA QUALITÉ
DES DONNÉES
Pour les financiers, il s'agit d'abord de « définir ce
qui est vert ». « Il va falloir avant tout nous donner
les outils pour identifier les activités qui sont profitables
à la transition et à la durabilité, rappelle
Anne-Claire Ducrocq (PGE 02), du groupe BNP
Paribas. C'est d'autant plus important pour nous
qui devons non seulement agréger les chiffres,
mais aussi accompagner l'économie dans la transition.
» Les banques sont en effet en attente de
données fiables pour diriger leurs capitaux vers
des projets durables. Avantage de cette nouvelle
directive : la standardisation des indicateurs sur
des normes européennes. Car l'objectif est bien de
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développer un système de reporting unique grâce
à une connectivité entre états financiers et états de
durabilité. Ce qui est une bonne nouvelle :
« Jusqu'ici, chaque entité avait ses indicateurs et
ses méthodes de calcul. C'était assez difficile, poursuit
Anne-Claire Ducrocq. En cela, ce nouveau
reporting est une opportunité énorme pour les
entreprises qui veulent financer l'économie verte. »
Un point de vue que partage Jules Pigassou,
Co-Founder & CEO de SustainSoft. « L'enjeu des
données, c'est d'abord le volume. Aujourd'hui, les
investisseurs travaillent avec un jeu de données
limité. C'est ensuite la qualité de ces données :
sont-elles crédibles, et comment évaluer cette crédibilité
? Enfin, il faudra comparer ces données
entre elles, et pour cela construire un vocabulaire
commun. »
UN NOUVEAU MÉTIER POUR
LES FINANCIERS
Pour réaliser ce reporting, les équipes devront raisonner
en double matérialité, c'est-à-dire en évaluant
d'une part les risques d'un point de vue
financier, et d'autre part les impacts sur l'environnement
et la société. « Cela nous pousse à avoir
une approche systémique en évaluant à la fois les
impacts de l'activité sur toute la chaîne de valeur
et les interdépendances qui conditionnent l'activité
de l'entreprise. Nous devrons nous acculturer »,
note Thomas Huaut (PGE 96), associé chez EY.
Dans le cas du groupe L'Oréal par exemple, on est
obligé de considérer l'usage des produits dans le
bilan carbone. Dans le cas d'un shampoing notamment,
c'est lorsque le consommateur se lave les
cheveux que l'impact environnemental est le plus
important, car c'est à ce moment-là que de l'eau
chaude est utilisée. « Cela représente près de 50 %
des émissions de gaz à effet de serre liées à l'activité
du groupe, explique-t-il. En tant que CFO, il
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