NEOMA Alumni Mag - N°33 - Décembre 2022 - 29

cratiser » la haute joaillerie :
j'ai simplement
développé le concept d'accessibilité, déjà inscrit
dans l'ADN de la maison. L'accessibilité géographique
d'abord : nous distribuons aujourd'hui nos
produits dans 95 magasins répartis sur l'ensemble
du territoire. L'accessibilité financière est également
clé. Même si nos bijoux à 350 euros ne sont
pas abordables pour le plus grand nombre, ils
restent meilleur marché que d'autres. Enfin, j'ai
décliné l'accessibilité sur un plan créatif. Les bijoux
trophées n'ont aucun rapport avec l'identité des
femmes, qui ne se reconnaissent pas dans ces
objets encombrants et show-off. Les premières
bagues que j'ai créées sont conçues comme des
secondes peaux qui expriment les émotions de
celles qui les portent, à travers leurs couleurs
notamment. Le petit bijou est une déclaration de
liberté, aux antipodes du trophée qui renvoie à une
forme d'assujettissement. Évidemment, en tenant
ce discours-là, j'ai jeté un pavé dans la mare. Tout
comme lorsque j'ai dit qu'il vaudrait mieux installer
une piste cyclable pour déambulateurs place Vendôme.
C'était une provocation, mais pas seulement.
La provocation est au service du passage de l'idée.
Les bijoux que j'ai créés se sont ainsi progressivement
installés dans le paysage. Par chance, mon
premier solitaire, Chance of Love, a été un succès,
suivi par d'autres, comme Gueule d'Amour...
Vous travaillez avec vos fils, Franck (PGE 04)
et David (PGE 06), respectivement directeur
général adjoint et directeur Asie.
Souhaitez-vous continuer à faire de
Mauboussin une « maison familiale » ?
Mauboussin est une maison familiale dans le sens
où elle a été, depuis Rocher, dirigée par des
familles. J'en suis actionnaire minoritaire. Lorsque
Frémont a souhaité vendre en 2019, j'ai été content
de trouver les Galeries Lafayette - qui est aussi un
groupe familial - pour pouvoir continuer l'aventure.
Mais je n'ai aucune ambition de transmettre
capitalistiquement à mes fils. Franck travaille ici car
il est jugé compétent par l'actionnaire. Quant à
David, il vole désormais de ses propres ailes : il s'est
lancé avec ses associés dans la reprise d'une
chaîne de restaurants en Thaïlande.
Ma motivation suprême ne consiste
pas à accumuler de l'argent.
Vos fils sont également diplômés de NEOMA :
coïncidence ?
Oui - d'ailleurs ma fille a fait une autre école !
(rires) Et répondre le contraire signifierait que j'ai
eu valeur d'exemple pour mes enfants. Or ce n'est
pas moi, mais ma femme, socle de notre famille, qui
leur a transmis les valeurs ainsi que son interprétation
personnelle du combat que je menais pour
la survie. Elle leur a fait passer le message qu'il
fallait sourire quand le soleil brille, mais aussi
quand il disparaît. Quand j'ai revendu Tehen, au
prix qu'il m'avait coûté, j'ai dû rembourser mes
parents, auprès de qui j'avais emprunté : j'ai pris
trois jobs et travaillé 7 jours sur 7. En résumé,
depuis quarante-six ans, je ne me suis jamais
arrêté. NEOMA m'a bien formé ! J'ai le souvenir de
professeurs exceptionnels, notamment en droit,
qui m'ont fait aimer leur matière. Mais mon comportement
d'étudiant n'était pas irréprochable.
J'appartiens à la promotion historique de Rouen
qui a fait grève pendant cinq semaines sur le campus.
Vous voyez, rien d'exemplaire...
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NEOMA Alumni Mag - N°33 - Décembre 2022

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