NEOMA Alumni Mag - N°20 - Septembre 2019 - 63

À l'ESC, j'ai immédiatement trouvé l'ambiance très
agréable. Il y avait sur le campus une modestie et une
implication qui m'ont tout de suite plu.
SOUS VOTRE PRÉSIDENCE, L'ÉCOLE PASSE LA BARRE
DES 5 000 DIPLÔMÉS (EN 1992). QUELS SONT LES
AUTRES FAITS MARQUANTS DE VOTRE MANDAT ?
Ces années-là furent également la course à l'accréditation délivrée par des organismes internationaux, avec la création en
1998 du label Equis (pour European Quality Improvement System), qui venait renforcer les labels AMBA et AACSB existants
en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Cela a changé beaucoup
de choses car l'ensemble des écoles ont, à partir de ce moment-là,
voulu décrocher cette triple accréditation. La concurrence ne
s'en est donc trouvée que plus accrue. À l'international, celle-ci
se joue fortement sur la qualité académique des professeurs
recrutés et sur la recherche. Le fameux classement de Shanghaï
en 2003 est d'ailleurs largement venu renforcer cette approche
en s'appuyant exclusivement sur les seules publications professorales dans les revues anglo-saxonnes les plus prestigieuses.
À Rouen lorsque je suis arrivé, la force de frappe de la recherche
restait assez réduite, le modèle économique des ESC s'appuyant
largement sur des praticiens d'entreprise. Plus globalement, la
France a d'ailleurs été quelque peu handicapée par ce type de
classement qui ne favorisait pas du tout notre modèle des
Grandes Écoles, ce que je trouve un peu regrettable. Je me suis
donc efforcé de recruter des professeurs étrangers ayant publié
dans des revues internationales donc anglo-saxonnes. Malheureusement, cela n'a pas suffi dans un premier temps et nous
n'avons pas obtenu l'accréditation Equis en 1998, alors que nous
y avions beaucoup travaillé. Nous ne l'avons reçue qu'en 2001,
juste avant que je parte en retraite.
QUELLE EST LA PRINCIPALE DIFFICULTÉ À LAQUELLE
VOUS AVEZ DÛ FAIRE FACE ?
Un jour, une délégation américaine est venue visiter Rouen, sur
invitation de la CCI. Un des représentants fit remarquer qu'il
trouvait anormal que la ville ne disposât pas d'aéroport international. Le président de la CCI le prit au mot et décida d'agrandir
les pistes à cet effet. Beaucoup d'argent y fut investi et l'ESC se
retrouva mathématiquement avec un budget plus contraint. De
fait, nous avons dû freiner la cadence de recrutement des enseignants, ce qui, je pense, a ralenti l'école dans les classements. Le
déblocage de cette pénurie n'a malheureusement eu lieu
qu'après mon départ.
QUEL REGARD PORTEZ-VOUS AUJOURD'HUI SUR
NEOMA BUSINESS SCHOOL ?
Juste avant mon départ, le président de la CCI de Rouen m'avait
interrogé sur les possibilités de fusion de l'école avec une autre.
Je pensais que Reims était la plus adéquate pour cela car très
proche de niveau et de culture. J'ai donc été tout à fait satisfait
lorsque le mariage a été effectif. Les fusions d'écoles françaises
sont de toute façon obligatoires, les écoles n'ayant pas la capa-

cité de résister seules à l'évolution internationale. C'est donc
une performance d'avoir créé NEOMA, qui me semble être
aujourd'hui sur une belle voie de réussite.
Je reste plus interrogatif sur l'avenir, en revanche. Quelle va être
l'évolution des classes préparatoires avec le nouveau Bac ? Cela
aura-t-il un impact sur les écoles de commerce ? Corollairement,
les concours vont-ils perdurer sous la même forme ou va-t-on
basculer vers un système, disons à l'américaine, de recrutement
sur dossier et notes ? Gérard Morel, dans son entretien pour ce
même magazine [ndlr : voir notre numéro 18], soulignait avec
justesse l'importance de la sélectivité des écoles et j'abonde
dans son sens. Il va falloir faire preuve d'intelligence et de souplesse et ne pas s'arc-bouter sur un modèle unique qui risque
d'être obsolète à terme. Là est tout le défi de demain, selon moi. ❚

Les écoles n'ayant pas la
capacité de résister seules à
l'évolution internationale, c'est une
performance d'avoir créé NEOMA qui
me semble être aujourd'hui sur la voie
de la réussite.

À PROPOS DE GÉRARD MOREL, DIRECTEUR
DE L'ESC ROUEN DE 1968 À 1985
« C'était quelqu'un de très honnête, de très
impliqué dans l'ensemble de ses activités. Il
aimait foncièrement aider son prochain et
rendre service. Il l'a fait à chaque fois qu'il l'a pu.
J'avais pour lui une amitié et une affection
sincère. Je pense qu'on peut dire sans se
tromper qu'il a fait de l'école ce qu'elle est
devenue après lui et est encore aujourd'hui. »

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