MINES LA REVUE DES INGÉNIEURS #515 - Mars 2022 - 89

Hommage à Bernard Martinot (E61)
Par JACQUES NAQUET (E61)
Quelle n'a pas été notre surprise et notre émotion, lorsque
Monique, son épouse, nous a fait part de son décès, survenu le
9 décembre 2021. Nous le croyions indestructible, car il faisait
notre admiration à tous pour son dynamisme incroyable qu'il avait
gardé tout au long des années. Mais il se savait condamné en
raison d'une maladie cardiaque, qui n'était pas opérable suivant la
Faculté de médecine. Il n'en disait rien par respect et par amour
pour ses proches et ses amis. Quelle grandeur d'âme, qui nous a
fait à nouveau apprécier l'étendue de ses multiples qualités : la
gentillesse, le dynamisme lui permettant de surmonter toutes les
épreuves, une connaissance universelle de nombreux sujets pour
lesquels il était intarissable et, surtout, le charme qui émanait de
sa personnalité et lui permettait de convaincre tous ceux qui
l'approchaient.
Retraçons les étapes de son exceptionnel parcours de vie : il naît
à Laon (02) le 4 février 1942, où il fera ses études primaire et
secondaire, avant de rejoindre Ginette à Versailles pour la
préparation des concours. Il est reçu à l'École des Mines de
Saint-Étienne en 1961, où il choisira l'option Sidérurgie, animée
par le sous-directeur de l'École Claude GOUX. Au cours de ces
3 années, Bernard surprendra la plupart d'entre nous par son
dynamisme et ses qualités sportives, qui lui permettaient de
s'adonner à de nombreuses activités (hand-ball, rugby, ski...).
Voici ce que Jacques DARET, qui faisait partie des mêmes équipes,
en dit : " Je me souviens d'abord du sportif : c'est d'ailleurs ce qui
sautait aux yeux lorsqu'on le rencontrait pour la première fois.
Musclé, tonique, on le sentait " rugueux " , adjectif dont on pouvait
apprécier tout le contenu lors des matches de rugby interpromotions
que l'on organisait chaque année. Mais son sport préféré
était le hand-ball où il excellait avec un « bras » puissant, redouté
des gardiens. Oserai-je dire que nous avions eu l'irrévérencieuse
idée de l'appeler fraternellement " La Bête " ? Bien sûr, comme
quelques autres, il n'hésitait pas à toucher aux autres sports
collectifs, dans les championnats universitaires, lorsque l'effectif
s'avérait insuffisant ; on pouvait alors compter sur son énergique
engagement pour faire gagner l'équipe " .
Il va faire son service à la base aérienne de Doullens, où il sera
en charge des radars longue portée.
C'est ensuite une longue et belle carrière, qu'il va effectuer dans
l'industrie chimique et plus particulièrement dans le pétrole en
France et à l'étranger (Qatar, Maroc). Il débute en 1966 comme
ingénieur d'exploitation chez Ethylène-Plastique à Lillebonne, où il
est en charge de la production de polyéthylène. En 1971, à la suite
du rattachement de la société à CdF Chimie, il est détaché à
Carling dans un but d'y former le futur chef d'exploitation du
secteur PEBD (Polyéthylène à basse densité). Il revient à Lillebonne
en 1972 en tant que chef d'exploitation de 5 unités de
production jusqu'en 1975, où il est alors détaché au Qatar, pour y
réaliser le design d'une nouvelle ligne de polyéthylène. Les
résultats obtenus lui valent d'être nommé en 1976 chef du Secteur
Procédés Thermoplastiques en France. Il restera à ce poste au
Qatar jusqu'en 1984, où il s'occupera de nombreux projets et de
leur réalisation, notamment à Lillebonne et Dunkerque et, aussi, au
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Japon et aux USA. De 1984 à fin 1988, il revient à Carling, en tant
que Chef de Secteur Exploitation Pétrochimie, où il aura de
grandes responsabilités techniques (modernisation d'un vapocraqueur,
transformation de la distillerie de pétrole, lancement d'une
nouvelle unité de styrène...) et, aussi la lourde tâche de la
poursuite de la réduction des effectifs. En janvier 1989, il retourne
au Qatar, où il est nommé Directeur Général de QAPCO, avec un
contrat de 3 ans. Il va y engager d'importantes modifications, ce
qui conduira à une production en forte augmentation et à la
maximalisation des résultats financiers. En 1990, suite à la fusion, il
est rattaché à ATOCHEM. À l'issue de son contrat, il occupe, de
janvier à juillet 1992, la fonction d'expert technique et de conseiller
auprès de son successeur qatari comme DG de QAPCO. C'est le
retour en France à Vendin-Loison, où il prend le poste de directeur
de l'Usine Elf Atochem, spécialisée dans la distillation des
goudrons et la chimie fine. Mais il va avoir là encore la responsabilité
bien délicate de lancer un plan de restructuration avec la
réduction des effectifs et l'arrêt d'une grande partie des activités
de Vendin.
Dernière étape professionnelle, après la restructuration de Vendin,
il est muté, en décembre 1994, au Maroc chez Elf Atochem Maroc,
en tant que DGA. Plusieurs de nos camarades l'y ont rencontré
pendant ce séjour, notamment Jacques DARET, qui nous a confié
quelques mots sur leurs retrouvailles : " Nous nous étions perdus
de vue, comme avec la plupart de nos camarades de promotion,
lorsque, après le service militaire, nous avons rejoint nos entreprises.
Mais un jour, alors que je me trouvais en mission au Maroc,
j'ai eu la surprise de retrouver, bien par hasard, Bernard. C'était à
Casablanca, au Restaurant du Port, sorte de grande brasserie où
l'on pouvait déguster les produits de la mer dans une ambiance
agréable. À l'une des tables, un visage bien connu : c'est Bernard
avec son épouse Monique. Inutile de décrire les exclamations et
les souvenirs évoqués lors de ces surprenantes retrouvailles ! Nous
ne tarderons pas à nous rencontrer à nouveau, pour un projet
industriel commun, dans l'usine qu'il dirigeait à Casa. Lors de nos
réunions, j'ai pu apprécier le souci qu'il montrait du respect de
l'environnement et les relations chaleureuses qu'il avait créées
avec son personnel. "
En 2000, au retour du Maroc, il sera consultant pour SHELL,
jusqu'en 2002, date à laquelle il prendra une retraite bien méritée.
Pendant toutes ses années, il aura été accompagné et soutenu par
Monique, qu'il avait épousée en 1964 et qui lui avait donné un fils
et une fille. Ils ont eu 5 petits-enfants.
Nous avons eu le grand plaisir de les revoir tous les deux lors de
nos réunions de promo en 2012, 2014 et 2019. Nous y avions
retrouvé intact le Bernard, que nous avions connu à l'École,
toujours aussi dynamique, gentil et charmeur, celui que nous
aimions écouter pour ses propos dans de nombreux domaines, qui
nous enrichissaient.
À Monique et à ses enfants, nous voulons dire que nous partageons
leur peine immense. Nous n'oublierons pas notre ami
Bernard. 
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