Arts&MétiersMag - N°415 - Février 2020 - 58

Histoire&Patrimoine
Grandes figures

F

ils de Joseph Bonvillain, propriétaire viticulteur en Haut-Mâconnais, et de Marguerite Bernardet, Philibert Bonvillain naît à
Vérizet-Fleurville (Saône-et-Loire) le
12 avril 1851, année où son oncle Toussaint
émigre en Louisiane sur les traces d'un
aïeul. Il a une sœur aînée, Françoise, et un frère, François.
À 13 ans, il persuade son père de l'envoyer au collège de
Tournus d'où il intègre les Arts et Métiers à Aix-en-Provence en 1867 (1). Major d'une promotion de 100 en fin de
première année, il se retrouve 20e sur 86 l'année suivante,
taxé de «meneur» lors d'une révolte d'élèves. Il est diplômé
le 26 juillet 1870, une semaine après la déclaration de
guerre de la France au roi Guillaume de Prusse.
Son père ayant acheté un remplaçant pour lui éviter l'armée
l'année de ses 20 ans, Philibert est recruté comme chef de
travaux extérieurs aux Éts Genestre et Herscher où il exerce
pendant trois ans. Il apprend alors que Mindon Min, roi
de Birmanie, a demandé à l'Italie, puis à la France (2), une
«mission d'organisation» pour développer son pays ;
Philibert se porte candidat.

L'aventure birmane

Dans une équipe constituée en 1875 d'un préfet administrateur, d'un financier, d'un général et d'un évêque (le sabre
et le goupillon), le poste d'ingénieur lui échoit. Ses missions
sont vastes : travaux publics, routes, port, ateliers pour
construire 50 chaloupes pour la flotte royale sur le fleuve
Irrawaddy... Au contact des bonzes, il apprend le birman.
Il se met en ménage avec Mattie Calogreedy, jeune veuve
éduquée en Angleterre et dame de compagnie de la reine ;
de là, très lié avec le fils du roi Mindon, Thibaw, qui accédera au trône en 1878, il construit pour le palais royal de
Mandalay une imprimerie et un observatoire astronomique. Il est promu ingénieur en chef avec mission d'aug-

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Naissance
Le 12 avril 1851 à VérizetFleurville, aujourd'hui Viré
(Saône-et-Loire).

Carrière
1871-1874 Chef des travaux
extérieurs chez Genestre et
Herscher, Paris.
1875-1885 Ingénieur en chef du
Royaume de Birmanie et délégué
général en Birmanie de la Société
académique indochinoise de
France.
1892 Représentant commercial
puis ingénieur civil au sein de la
société en commandite Bonvillain.
1897 Embauche Eugène-Victor
Ronceray (Ch. 1885). En 1908, ils
sont associés dans la nouvelle SA,
la Société des Éts Bonvillain et
Ronceray.
1894-1906 Dépose en solo une
dizaine de brevets, notamment
aux États-Unis (puis avec son
associé Ronceray à partir de 1907).

Distinctions
1884 Médaille de vermeil de la
Société de géographie.
Décembre 1906 Membre de
The Institution of Mechanical
Engineers.
1906-1907 Membre du comité de
la Société des ingénieurs Arts et
Métiers.

Décès
Le 14 avril 1916 à son domicile
8, rue Cavendish, à Paris 19e.

1926
», DE MAX DE NANSOUTY,

1867

«OUTILLAGE MÉCANIQUE

Ai.

Ingénieur-explorateur,
Philibert Bonvillain a vécu deux vies.
La première, très aventureuse, en
Birmanie, qu'il achève totalement
ruiné ; la seconde en France, où, grâce
à ses inventions, il rebondit en
révolutionnant le secteur de la fonderie.

Bonvillain déposa de nombreux brevets,
dont celui d'une machine à mouler rotative qui
facilita grandement la vie des fondeurs
et fit le succès de son entreprise.

PHOTO EXTRAITE DE L'OUV
RAGE

COLLECTION FAMILLE BONVILAIN

Les deux vies de
Philibert Bonvillain

menter la production des mines de rubis (les plus grandes
au monde) et devient le premier Européen à explorer
plusieurs sites dont celui de Maghout-Kathley, dans la
célèbre vallée de Mogok.
Afin d'acheter le matériel d'extraction, Bonvillain doit se
rendre en France en 1882. En novembre, il se trouve
contraint de donner sa caution personnelle aux fournisseurs pour 118 000 roupies (3). En mars 1883, il a un entretien avec le ministre des Affaires étrangères Challemel-Lacour en vue d'obtenir l'ouverture d'un consulat à
Rangoon, capitale de la Birmanie anglaise. Le 31 mai de
la même année, à Lyon, il a le temps d'épouser Régina
Prévost, avec laquelle le voyage de noces est un retour en
Birmanie. Louis (dit Paul), l'aîné de leurs quatre enfants,
y vient au monde le 25 mars 1884. Le roi Thibaw, lancé
(1)
 Cluny est à 10 km de chez lui, mais la 4e école d'Arts et Métiers n'y
sera ouverte qu'en 1901.
(2)
 À lire : de Philippe Perchez, «les Relations entre la France et
la Birmanie (1723-1896)», édité par France Asie en 1967.
(3)
 Soit 240 000 F de l'époque. Cela causa sa ruine.
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