La revue RH&M - N°70 - Juillet 2018 - 26

Tendance RH / Étude
Point de vue d'experts
sur le baromètre
LAURENT TERMIGNON,

Directeur de l'activité Talent & Rewards
Gras Savoye Willis Towers Watson
Cabinet international de conseil, courtage
et de solutions logicielles

La DRH à l'avant-garde de la lutte
contre la cybercriminalité
La cybercriminalité a atteint des niveaux records en 2017. Selon
« Les Echos »1, 92 % des entreprises françaises ont subi au moins une
cyberattaque, contre 80 % en 2016. Aucune ne peut se considérer à
l'abri. Face à ce danger qui ne s'atténuera pas dans l'avenir - bien
au contraire, digitalisation oblige - leur première réponse consiste à
augmenter leur budget de cybersécurité. Ce qui dénote une méconnaissance des vecteurs de menace, particulièrement marquée chez
les DRH : l'édition 2018 du « Baromètre des DRH » démontre que
les Directions des ressources humaines sous-estiment totalement le
risque cyber, en le plaçant au dernier rang de leurs préoccupations.
Pourtant, les entreprises auront beau investir massivement dans des
technologies toujours plus sophistiquées, il reste un aspect auquel
elles pensent rarement, mais capable de mettre à mal tous leurs
efforts : le risque humain. Selon une enquête de Willis Towers Watson de 2016, 60 % des pertes ou fuites de données sont dues à des
erreurs humaines ou des mauvaises pratiques (par ex. se connecter
à un réseau wi-fi non sécurisé ou omettre de crypter une clé USB).
La cybersécurité n'est pas la chasse gardée de la direction informatique. Les entreprises ne doivent pas sous-estimer l'importance
de la formation, de la communication et de la sensibilisation. Souvent, les pratiques à risque des collaborateurs de bonne foi sont
liées à leur méconnaissance des bonnes pratiques. On remarque
parallèlement que les entreprises dont le niveau d'engagement des
salariés est faible sont plus souvent victimes de cyber incidents que
les autres : des collaborateurs sur le départ ou démotivés prennent
moins de précautions, voire peuvent être enclins avoir une attitude
malveillante.
La DRH a donc un rôle essentiel à jouer dans la lutte contre le cyber
risque. Elle doit faire en sorte que le niveau de sensibilisation des
salariés soit le plus haut possible. A travers des enquêtes, elle doit
évaluer scientifiquement les pratiques informatiques des collaborateurs, mais également leur engagement qui peut être un indicateur
de risque. L'analyse des résultats lui permettra d'engager des actions
qui complèteront avantageusement les investissements informatiques de l'entreprise.
1. Cybercriminalité : nette augmentation des attaques en France en 2017,
Les Echos 23/01/2018
2. The inside threat : Why employee behavior and opinions impact cyber risk, may 2016

P.26 | JUILLET 2018 | N°70 LA REVUE RH&M

La réallocation des coûts est la bonne
méthode pour optimiser les coûts et
la chaîne de valeur sociale le bon outil
au service des DRH
Une des surprises de ce Baromètre 2018 a été de constater que 60 %
des DRH ne sont pas du tout concernés ou jugent cette réallocation
peu importante.
C'est étonnant, car la réallocation est une approche très efficace pour
les DRH. Pour mesurer l'intérêt de cette approche, il faut mettre en
perspective l'ensemble des coûts sur lesquels le DRH a une influence
directe et indirecte. Pour cela, le DRH dispose d'un outil conceptuel
particulièrement bien adapté : la chaîne de valeur sociale.
A l'instar de la chaîne de valeur financière du DAF, la chaîne de
valeur sociale du DRH englobe les coûts directs et indirects sur lesquels le DRH et ses équipes peuvent avoir une influence et souvent
un pouvoir de décision. L'intérêt de regrouper ces coûts dans la
chaîne de valeur sociale est de délimiter un espace au-delà de l'espace comptable habituel. Elle permet aux dirigeants de prendre la
mesure de son importance en termes de coûts de la chaîne de valeur
sociale par rapport aux autres chaînes de valeur et de constater qu'il
s'agit bien souvent de la première chaîne des coûts. Ce qui importe
est que cette chaîne de valeur sociale soit en cohérence avec le projet
de l'entreprise et qu'elle mesure les moyens nécessaires pour l'optimiser en fonction des objectifs qui permettent de satisfaire la vision
générale. Elle doit, bien entendu, s'adapter à chaque entreprise pour
mieux coller aux situations et aux besoins. Ce cadre étant défini, il
devient alors possible de faire une analyse relative des coûts sociaux
entre eux et de réfléchir à leur optimisation relative. Elle permet
d'identifier les coûts qui peuvent être réduits ou optimisés afin de
dégager des ressources pour les réallouer à d'autres postes de la
chaîne de valeur sociale. Elle permet d'identifier l'évolution relative
de chacun des coûts, d'identifier les économies ou les optimisations
dans ce cadre en s'assurant que ces gains resteront à la disposition
de la DRH et qu'ils ne seront pas repris par la direction financière et
noyées dans les différents postes du compte d'exploitation. Le DRH
est l'animateur de sa gestion des coûts.
Au Comex, la chaine de valeur sociale permet au DRH de défendre
son budget, la réallocation montre sa capacité à apporter des solutions et de mettre en place les moyens pour capter les talents.

JOSÉ-MARIE JAEGER,

Dirigeant
ABV Group

Cabinet de conseil en management
stratégique des coûts

Table des matières de la publication La revue RH&M - N°70 - Juillet 2018