La revue RH&M - N°69 - Avril 2018 - 10

LE GRAND ENTRETIEN

En quoi la digitalisation et la robotisation vont-t-elles modifier
la stratégie RH et l'emploi chez
Michelin ?
Ces technologies conduiront certes à
terme à diminuer un certain nombre
de métiers, mais améliorent déjà les
conditions de travail. Sur les 110 000
personnes qui travaillent dans le
Groupe, 60 000 sont dans nos
usines. Michelin est resté avant tout
une manufacture. Nombre de nos
collaborateurs travaillent avec leurs
mains et les questions d'ergonomie
sont importantes. La robotisation, la
digitalisation et la cobotique, améliorent la qualité de vie au travail de
nos collaborateurs. Dans nos usines
4.0, le déploiement de montres et
lunettes connectées contribue à réduire le stress des opérateurs qui
peuvent repérer immédiatement les
pannes machines et résoudre le problème eux-mêmes plus facilement.
En réduisant la pénibilité des métiers
de la production, ces technologies
permettent aux salariés d'être plus
responsabilisés et plus polyvalents.
Avec ces objets connectés, vous
faites de vos salariés des robots ?
Au contraire, nos collaborateurs reprennent le pouvoir sur la machine !
Grâce aux outils digitaux, des personnes, longtemps mono-tâches, se
sentent investies de nouvelles responsabilités en matière de qualité :

elles peuvent intervenir directement
sur leurs machines, sans attendre
les personnels de maintenance. Nos
salariés, de toutes générations, adhérent massivement à ces nouvelles
technologies !
Michelin a une tradition sociale
forte. Pouvez-vous revenir sur
les expériences de fermeture
d'usines?
La fermeture de sites fait partie de
la vie de l'entreprise, mais c'est toujours un crève-cœur. A chaque fois,
la question clé, quand nous prenons une décision qui perturbe la
vie de salariés fidèles, est celle de la
confiance.
Il y a deux manières d'aborder la fermeture d'une usine. La première, cynique, est de se focaliser sur le montant du chèque accordé aux employés
licenciés, puis de « tourner la page ».
La seconde, innovante, mise en avant
par Michelin, est de s'investir pour
accompagner les salariés des sites
restructurés vers un nouvel emploi.
L'investissement dans les savoir-être
est alors, dans ces situations, un
atout important pour faciliter les
reconversions des salariés. Lorsque
nous avons fermé l'usine de Toul,
nous avons identifié les « emplois
en tension » dans le bassin d'emploi
et nous avons recréé des ateliers de
menuiserie, de ferronnerie... Nous
avons accompagné pendant 24 mois
nos salariés dans leur reconversion

dans leur bassin d'emploi. Nous
avons généralisé cette approche de
responsabilité sociale partout où
nous avons été amenés à fermer des
sites.
Avez-vous des partenariats avec
des start-up pour créer de l'agilité, de l'innovation ?
L'investissement sur la responsabilisation des collaborateurs permet
de développer l'intrapreneurship et
de susciter l'innovation. Mais nous
avions besoin aussi de mesures emblématiques pour montrer notre
volonté d'accélérer en matière d'innovation.
En 2014, nous avons lancé, auprès
de l'ensemble de nos salariés, un
concours mondial intitulé « Quelle
est votre idée pour le Michelin de demain ? ». Un processus de sélection,
continent par continent, a permis la
constitution d'équipes projet. Nous
avons retenu des projets provenant
de l'interne et de start-ups externes,
que nous avons intégrés dans un
incubateur à Clermont-Ferrand appelé « bivouac ».
Au final, comment caractériseriez-vous votre binôme?
Il est important que notre binôme
soit représentatif de l'entreprise. Ce
que j'apprécie chez Jean-Dominique,
c'est son authenticité, sa simplicité,
son humilité. Ces valeurs incarnées
apportent du sens, de la confiance et
fédèrent l'entreprise.

P.10 | AVRIL 2018 | N°69 LA REVUE RH&M

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