La revue RH&M - N°68 - Janvier 2018 - 44

RECHERCHES ACADÉMIQUES

PRENDRE LE RISQUE DE LA MOBILITÉ :
ÉTAT DE LA RECHERCHE

C

haque année, un cadre
sur quatre connait un
changement professionnel volontaire ou
involontaire. La mobilité externe concerne
entre 5% et 7% des
cadres et la mobilité
interne environ 20% des cadres
selon l'APEC. La mobilité interne
recouvre des réalités variées  :
changement de poste stricto
sensu (8% des cadres) ou d'autres
changements (de département,
de service, d'établissement ou
de contenu de poste). Ces mobilités fréquentes sont-elles pour
les salariés une source de risque
ou une opportunité ? Quelques
recherches apportent des éléments de réponse.
Parmi les travaux récents menés
en France, nous avons retenu cinq
recherches pour alimenter la réflexion
des DRH.
Les pulsations de la mobilité
Une thèse de doctorat en Sociologie
intitulée « Les pulsations de la mobi-

lité en entreprise : entre reconfiguration d'un marché interne et
constitution d'un régime d'épreuve à
la mobilité professionnelle » a été soutenue le 27-03-2017 à l'IEP Paris par
Christophe Claisse. Le nouveau docteur étudie un dispositif d'accompagnement à la mobilité professionnelle
au sein d'une ancienne administration
d'État devenue société anonyme : les
centres financiers de la Banque Postale. L'enquête ethnographique combine entretiens et observations pour
analyser conjointement la mobilité
en cours de carrière comme l'agencement subjectif des séquences d'une
vie, et la mobilité comme modalité de
gestion du personnel d'une entreprise
en transformation.
Dans un contexte où l'individualisation des politiques de l'emploi se
joint à celle des dispositifs de gestion
des ressources humaines, la thèse
propose une analyse de la mobilité
en contexte organisé, qui met en
évidence le caractère normatif d'une
injonction à la réalisation de soi par le
travail. Elle met en avant le caractère
multidimensionnel des transactions
qui se jouent, dans une épreuve de

JEAN-MARIE PERETTI,
Professeur à l'ESSEC Business School
et Titulaire de la Chaire ESSEC du changement

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mobilité, sur le plan biographique,
sur celui des usages et des détournements des dispositifs de gestion, sur le
rôle joué par les managers ou encore
le cadre collectif négocié par les organisations syndicales.
La mobilité signifiante
Caroline Arnoux-Nicolas a soutenu
le 02-12-2015 au CNAM une thèse de
psychologie sur « Sens du travail et
mobilité professionnelle : La mobilité
signifiante». Partant du constat que
dans le contexte d'incertitude actuel,
les questions d'orientation renvoient
de plus en plus à celles du « sens »
et que la nature même des carrières
se trouve modifiée, caractérisée par
de nombreux changements et ruptures, l'auteur analyse les relations
réciproques entre le sens du travail
et la mobilité professionnelle. Elle
propose une nouvelle échelle du sens
du travail auprès de salariés français,
l'Inventaire du Sens du Travail. Elle
montre globalement l'existence de
liens significatifs entre le sens du travail et la mobilité professionnelle, à
travers trois études distinctes.
Ses résultats soulignent l'importance
de la perception qu'a l'individu de
son expérience de mobilité professionnelle dans la compréhension du
sens du travail. Une étude quantitative auprès d'un échantillon de 336
salariés issus d'horizons professionnels diversifiés, montre l'influence du
sens du travail sur les intentions de
quitter son emploi et/ou sa structure,
de même que le rôle de médiateur du
sens du travail entre certains facteurs
d'insatisfaction professionnelle et ces
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