La revue RH&M - N°67 - Octobre 2017 - 44

RH À L'INTERNATIONAL

Politiques d'emploi en Europe
sécurité. A tel point qu'un retour vers
davantage de régulation apparaît, à
l'image du salaire minimal récemment
instauré en Allemagne.

MARC
DELUZET
Délégué général
de l'Observatoire
Social International
(OSI)

a réforme des marchés
du travail européens
sont au cœur des débats.
L'analyse des situations
nationales montre que
la législation sociale a moins
d'impact que les contextes socioéconomiques et les décisions
d'entreprise.
En juin dernier, le colloque IRES
a dressé un panorama complet des
réformes du marché du travail en
Europe, sur la base de travaux qui évaluaient leurs performances en termes
d'emploi. Deux enseignements en
ressortent : ces réformes ne sont pas
isolées, elles accompagnent d'autres
politiques dans des cadres d'action
spécifiques à chaque pays et l'impact
sur l'emploi est global ; par ailleurs, le
lien entre réforme du droit du travail
et création d'emploi est finalement
très incertain, et ce panorama souligne
que la flexibilité s'accompagne plutôt
de précarité et de pauvreté que de

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Un effet emploi davantage lié
au contexte socioéconomique
national
Les réformes radicales du marché du
travail espagnol n'ont guère entamé
sa segmentation et le taux de chômage
reste fort élevé. La baisse actuelle est
due au redémarrage conjoncturel de
l'activité. Aux Pays-Bas, l'hyper flexibilité a dopé le travail indépendant,
mais la baisse du chômage masque un
nombre important de salariés pauvres
et une croissance du temps partiel pour
les femmes, dont la durée moyenne
de travail est inférieure d'un tiers à
celle des hommes. La flexibilité s'accompagne du recul de la formation
continue qui menace à terme la productivité.
Exceptionnel, le cas allemand est
lui aussi très éclairant. Une récente
étude du Centre for European Reform
montre que les remarquables résultats enregistrés par nos voisins sur le
chômage sont davantage dus à leur
système de négociation sociale et à la
préférence de ses acteurs pour la flexibilité interne, car ces caractéristiques
ont favorisé formation et modération
salariale au moment où la croissance
des pays émergents redémarrait.
Notons aussi qu'une augmentation
sensible du taux de pauvreté et des inégalités dans l'accès à l'emploi, accompagne ces bons résultats.
La responsabilité croissante des
entreprises en matière d'emploi
Une dernière dimension ressort de
ces comparaisons européennes : la
prescription du droit du travail sur les
acteurs économiques est très relative.

" La flexibilité
s'accompagne
plutôt de
précarité et
de pauvreté que
de sécurité. "

Il apparaît que l'explication des mouvements d'emploi est d'abord à rechercher dans les choix de production des
entreprises qui décident in fine, de former, de stabiliser ou non, telle ou telle
catégorie de collaborateurs.
Dans cette perspective, la décentralisation dans l'entreprise de la négociation d'une partie des dispositifs
concernant les formes d'emploi et différents éléments de rémunération, est
stratégique. L'actuelle réforme du code
du travail va dans ce sens. Toutefois,
cette évolution va renforcer le poids de
la responsabilité du management et
des directions d'entreprise, qui devront
d'autant plus se montrer inventifs,
innovants et capables de négocier. Les
DRH ont un rôle essentiel à jouer.
De même, à côté des dispositifs liés au
marché du travail, l'accroissement des
compétences et du potentiel humain
constitue l'autre levier social important
pour lutter contre le chômage. Là aussi,
des formes nouvelles de dialogue social
et de coopération avec le système éducatif et les territoires, sont nécessaires
pour assurer l'employabilité de tous.

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