ParaMag - N°371 - Avril 2018 - 32

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dans ma chambre et passais de plus en
plus de temps avec eux.
J'avais l'impression d'être en colonie de
vacances. On était tous dans la galère,
mais ça nous rapprochait, on se donnait
à fond en rééduc et on essayait de passer du bon temps autour. Nos familles
nous rendaient tout le temps visite, ça
nous boostait. Après plusieurs visites,
ma fille acceptait le contact, redevenait
câline et ça, ça me faisait le plus grand
bien. Mon fils poussait, il devenait un
beau bébé. Ma femme gérait les enfants
et la maison avec l'aide de sa mère, ça
n'était pas facile, elle était crevée et je
culpabilisais de ne pouvoir rien faire pour
l'aider.
On se racontait aussi nos péripéties et la
raison qui nous avait amenés à vivre en
rééducation. Romain était passé maître
pour raconter mon accident avec chaque
menu détail sans oublier les bruitages de
la vidéo. J'étais le seul à avoir la vidéo de
mon accident et j'ai bien dû la voir plus
d'une centaine de fois.
Romain était de loin le champion toutes
catégories des accidentés de la Bourbonne, il avait tapé le top niveau. Je
pense être sur le podium. On avait des
critères pour juger les accidents entre
nous. La première question était de
savoir si le transfert à l'hôpital s'était fait
en hélico. La deuxième question était de
savoir s'il y avait eu séjour en réanimation. Si la réponse à ces deux questions
était négative, on ne pouvait pas parler
d'accident, mais plutôt de gros bobo.
Pour ne citer que quelques-uns des
patients de l'époque, il y avait Marcos,
Brésilien qui s'était crashé en parapente,
on a rapidement sympathisé avec nos
passions communes ; Amandine,

atteinte d'une maladie immunodéficiante,
elle était habituée des hôpitaux ;
Michel, diabétique qui avait un pied
amputé, il mangeait des sucreries le soir
comme il connaissait son taux de sucre
quotidien ; Max, gros fumeur, amputé
lui aussi à cause de son hygiène de vie,
il alternait entre terrasse et entrée pour
aller fumer ; Jenny, 24 ans, atteinte d'un
cancer qui lui avait attaqué la jambe,
amputée elle aussi ; Géraldine, polytraumatisée suite à un accident de moto ;
Mr Nazarian, il avait fait un AVC et était
hémiplégique ; Momo, gardien de foot
professionnel en Algérie, il avait failli y
mourir à cause d'une nécrose au pied,
il avait été transporté en urgence en
France et avait été amputé ; Yaya, tombé
d'un échafaudage, il s'était fracassé
une jambe ; Ghislaine, accident de
moto elle aussi...
On m'enleva mes plâtres 6 semaines
après mon accident. Déjà que je ne suis
pas bien épais à la base, j'avais maintenant des jambes de flamant rose. Je
ne pouvais pas reprendre appui tout de
suite et après les plâtres, j'eus droit à de
belles bottes de marche. Ça ressemble à
des boots de snow qui montent jusqu'au
genou version Birkenstock.
Au niveau médical, les évolutions étaient
bonnes. L'arthrodèse était bien en place,
elle n'avait pas bougé et mes vertèbres
commençaient tout doucement à
consolider. Les deux les plus touchées
aussi, mais une attention particulière y
était portée comme il faudrait peut- être
envisager une nouvelle intervention. Les
chevilles aussi consolidaient.
En décembre, je commençais à avoir
suffisamment d'appui pour passer en
hôpital de jour. Bizarrement, j'étais fou
de joie et en même temps j'appréhen-

dais le retour à la maison. J'avais comme
un syndrome de Stockholm. En centre
de rééducation, quand on progresse,
on a l'impression qu'on redevient autonome. On oublie rapidement tout le staff
médical qui nous entoure et nous aide
au quotidien.
La «colonie de vacances» touchait à sa
fin. J'allais aussi laisser mes acolytes
avec qui j'avais tissé des liens forts.

Retour à la maison

Le 13 décembre, le retour à la maison
fut intense, bien que perturbé par l'état
de santé de mon fils qui devait être hospitalisé à son tour pour une bronchiolite
aiguë avec complications.
Les débuts à la maison étaient assez
compliqués, mais les choses finirent par
rentrer dans l'ordre et début janvier je
pouvais commencer à lâcher progressivement les béquilles.
J'avais rééducation tous les matins à
l'hôpital de jour de la Bourbonne. Je
montais voir mes acolytes tous les jours
comme ils y étaient toujours à temps
plein. Le matin je passais prendre un
café avec Philou et ensuite je montais au
gymnase voir Romain.
Mi-janvier, j'avais rendez-vous à Toulon
avec mon chirurgien qui m'expliqua qu'il
fallait renforcer T12 qui ne consolidait
pas suffisamment. Elle avait été
quasiment broyée.
Je serai de nouveau opéré sur Toulon,
la semaine suivante. Le chirurgien
m'avait expliqué le processus, on allait
m'ouvrir sur le flanc gauche, écarter les
côtes, dégonfler un poumon, le décoller,
pousser les organes pour accéder à la

Remerciements

Je tiens à remercier ma femme, mes enfants, ma belle-mère, ma sœur,
ma mère et les autres membres de ma famille.
Mon ange gardien qui a évité le pire le jour de l'accident, mon chirurgien dont
l'humanité n'a d'égales que ses compétences; le personnel soignant de l'hôpital
Sainte-Anne à Toulon, celui de la Bourbonne à Aubagne et du centre méditerranéen
du sport à Marseille, Marianne qui a veillé sur moi à distance, le Professeur Delarque
et toutes les blouses blanches qui œuvrent au quotidien pour le bien-être des patients.
Les amis qui sont venus me rendre visite, ceux qui étaient présents à distance
et ceux qui ne l'étaient pas. Thomas pour les tenues OM.
Avril18:371
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Les patients de la Bourbonne avec qui on a partagé de bons moments
et des moins bons. Philou et Romain, mes frères de galère.
Les commerçants de Saint Barnabé, le Royaume de la Chantilly
pour ses bons fromages, Lisa pour ses bons cookies.
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