ParaMag - N°370 - Mars 2018 - 55

UN PEU D'HISTOIRE...
Par Bruno Passe

MATÉRIEL

Pourquoi utiliser un parachute équipé
d'un système de sécurité passif R.S.L.,
alors que la plupart des parachutes
sont déjà équipés d'un déclencheur
automatique de sécurité de type A.A.D.
(automatique opening device) ?
En dehors des motivations et aspects
techniques exposés dans cet article, il
y a aussi la question du budget et des
mentalités, face à l'emport d'un R.S.L.
Laissons de côté ce qui concerne le
budget, ça reste une considération
personnelle, pour nous intéresser
davantage aux mentalités. Car elles
peuvent influencer aussi certains choix
de pratiquants.
En 2003, la F.F.P., fédération française
de parachutisme, a rendu obligatoire
l'emport d'un déclencheur A.A.D. pour
tous les pratiquants. Depuis quinze
ans, en France, les mentalités parachutistes se sont donc habituées à utiliser
en permanence, quels que soient leur
expérience et leur niveau technique, un
système de sécurité. Tel n'a pas toujours
été le cas. Durant des décennies, ces
systèmes n'étaient obligatoires que pour
les élèves, les tandems et les militaires.
C'est l'arrivée sur le marché d'une
nouvelle génération d'appareil qui a fait
évoluer les mentalités des dirigeants
français : ce nouvel appareil était le
Cypres, commercialisé en 1992 par le
fabricant allemand Airtec. Le déclencheur automatique de sécurité était
devenu si fiable, si précis et de faible
encombrement, qu'il devenait intolérable
à leurs yeux de laisser des parachutistes
confirmés se tuer alors qu'un appareil
aurait pu leur sauver la vie.
Les précédentes générations de déclencheurs automatiques de sécurité, dans
les années 70 et 80, avaient un fonctionnement barométrique et mécanique,
ils étaient moins précis et provoquaient
parfois des déclenchements intempestifs. Rares étaient les parachutistes
confirmés qui acceptaient de les utiliser
en pratique sportive ou de loisir.

Avant l'arrivée des A.A.D. modernes sur
le marché, les fabricants de sac-harnais
préconisaient largement l'utilisation des
R.S.L. pour les confirmés. En 1991, le
fabricant Parachutes de France déclarait
que 64 % des sacs-harnais Atom étaient
commercialisés avec le L.O.R.2 (contre
33 % en 1990) et Parachute Shop
(autre fabricant français à l'époque)
annonçait le chiffre de 84 % pour le
Stevens équipant ses sacs-harnais (ces
chiffres ne concernaient que les parachutes personnels, hors école).
En continuant de remonter dans le
temps, nous allons voir que des fabricants et concepteurs français ont redoublé d'ingéniosité pour maintenir au goût
du jour et faire évoluer un concept très
ancien : le système américain Stevens.
Le Stevens est tout aussi ancien que le
système de libération de la voilure principale. Il est apparu sur les parachutes
de type «dorsal-ventral» peu de temps
après que les systèmes de libération
apparaissent. Le Stevens répondait à la
peur de ne pas réussir à ouvrir ou de ne
pas voir un élève ouvrir son parachute
de secours après une libération de la
voilure principale. Repartir en chute
libre après avoir ouvert son parachute
principal n'était pas encore ancré dans
les mentalités, les voilures étant encore
majoritairement hémisphériques, il
semblait moins risqué d'ouvrir le secours
sans libérer la principale. Tout a changé
avec l'arrivée des voilures ailes, dans les
années 70.
Le premier système Stevens était
constitué d'une simple sangle reliant

Photos ci-dessus
Le premier système Stevens, nommé S.C.S.
(Stevens cutaway system), étaient vendu en kit
à installer. Il était ainsi constitué d'une simple
sangle reliant un groupe d'élévateurs du parachute
principal à la poignée qui commande l'ouverture du
parachute de secours, en position ventrale.
Document catalogue ParaGear 1984-85
Archives Guy Sauvage

un groupe d'élévateurs du parachute
principal à la poignée qui commande
l'ouverture du parachute de secours,
en position ventrale.
En cas de libération, cette sangle se
mettait en tension et tirait automatiquement la poignée de secours, idéalement
placée dans le prolongement de l'axe
des élévateurs. Simple et ingénieux,
c'est ce principe de base qui est encore
utilisé de nos jours sur les Stevens, mais
en débrayant directement l'aiguille de
verrouillage du conteneur de secours, et
non plus la poignée d'ouverture. Depuis
le passage au «tout dans le dos» jusqu'à
la miniaturisation des parachutes, le
système Stevens a été adapté et il a suivi
l'évolution des équipements.
Mais nous avons vu que le Stevens a lui
aussi ses limites : en cas de décalage
entre les deux groupes d'élévateurs, durant la libération, il peut y avoir déclenchement de l'ouverture du parachute de
secours alors que le parachute principal
est encore connecté à un groupe d'élévateurs.
Le système français L.O.R. a été breveté
et commercialisé par Parachutes de
France dans le début des années 80.
L'idée était de pallier à ce risque de
déclenchement automatique prématuré
en cas de dissymétrie dans la libération
avec un Stevens. La première version du
L.O.R. a été inventée et mise au point
par le français Michel Auvray, directeur
de Parachutes de France et de son
bureau d'étude. Le principe du L.O.R.1
était similaire à celui du Stevens,

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Tout aussi modernes et performants
soient-ils, les déclencheurs A.A.D. ne
couvrent pas tous les risques. Dans le
cas d'une procédure de libération, suite
à un incident sur la voilure principale,
il faut attendre que le parachutiste
atteigne de nouveau une certaine vitesse
avant d'obtenir la mise en œuvre du déclencheur. Ce paramètre de vitesse est
nécessaire à la sécurité, afin d'éviter les
déclenchements sous voilure principale
correctement ou partiellement ouverte
(risque d'interférence).

Dans cette configuration où l'A.A.D. ne
fonctionne pas, le R.S.L. reste efficace.
C'est pour cette raison que les systèmes
de sécurité passif de type R.S.L. sont
obligatoires sur les parachutes école et
sur les tandems. Et que certains confirmés les utilisent également.

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