Clefs - Le système politique de l'Union européenne -9 - (Page 103)

LE DROIT EUROPÉEN ET LA COUR DE JUSTICE bilité directe de principe. Pour le démontrer, la Cour considère d'abord l'objectif du traité, puis replace dans cette perspective le cadre institutionnel et notamment judiciaire qu'il prévoit : « l'objectif du traité CEE (...) est d'instaurer un marché commun dont le fonctionnement concerne directement les justiciables de la Communauté » ; dès lors, le traité « constitue plus qu'un accord qui ne créerait que des obligations mutuelles entre les États contractants... (et) la Communauté constitue un nouvel ordre juridique... dont les sujets sont non seulement les États membres mais également leurs ressortissants » 6. C'est sur ce point, sans doute, que l'Union se rapproche le plus d'un État fédéral. Et un arrêt Costa du 15 juillet 1964 est venu ajouter que « l'ordre juridique communautaire s'est intégré au système juridique des États membres ». Une telle jurisprudence comporte deux conséquences : - l'application immédiate (sous réserve de ce qui a été mentionné pour les directives) du droit communautaire du seul fait de sa publication au Journal offıciel de l'Union européenne (JOCE) ou, s'agissant des décisions, de leur notiﬁcation ; - l'invocabilité du droit communautaire par les particuliers devant les juridictions nationales, appelées en vertu d'un dédoublement fonctionnel à le faire respecter et à le faire appliquer. La primauté à l'égard du droit interne Aucune disposition du Traité de Rome n'explicite la supériorité du droit communautaire sur le droit interne. C'eût été souscrire à l'un des principes structurels de l'État fédéral selon lequel : « le droit fédéral brise le droit local ». Ici encore, la jurisprudence de la Cour a donc joué un rôle décisif. Deux arrêts de principe illustrent sa prise de position en faveur de la primauté du droit communautaire. D'une part, l'arrêt Costa c/ENEL du 15 juillet 1964 déduit cette primauté de l'application directe du droit communautaire, du caractère inconditionnel des obligations souscrites par les États membres et de l'existence de procédures spéciﬁques permettant à ceux-ci d'obtenir exceptionnellement des dérogations. D'autre part, l'arrêt Simmenthal du 9 mars 1978, dont la formulation est on ne peut plus claire, déclare : « le juge national chargé d'appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit communautaire, a l'obligation d'assurer le plein effet de ces normes en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu'il ait à demander ou à attendre l'élimination préalable de celle-ci par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel ». Le Traité constitutionnel, conﬁrmait cette jurisprudence. Son article I-6 reconnaissait que le droit adopté par les institutions de l'Union prime les droits 6 Guy Isaac et Marc Blanquet, Droit communautaire général, 9e éd., Masson, 2006. 103

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