Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 98)

80 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS B. LA DIMENSION TEMPORELLE 235. Selon de nombreux auteurs, la permanence caractérise la règle générale. Ainsi Émile Bouvier et Gaston Jèze affirment-ils que « la loi est générale à un double point de vue : générale quant à sa portée d’application, la loi régit tout un ensemble d’êtres ou de phénomènes sans en excepter aucun ; générale quant à sa durée, la loi apparaît comme devant être d’une durée indéfinie » 230. Maurice Hauriou écrit, dans son Précis de droit administratif et de droit public231 : « Que la loi soit une règle générale signifie plusieurs choses : d’abord, qu’elle s’adresse également à tous, à ce point de vue, elle entraîne le corollaire de l’égalité devant la loi ; ensuite, qu’elle s’applique aussi bien aux temps à venir qu’au temps présent, ce qui fonde la stabilité des situations légales (…) ». Pour Michel Virally232, « la règle, parce qu’elle est abstraite, peut donner lieu à des applications répétées et créer des relations juridiques en nombre indéterminé. D’où il apparaît qu’un caractère fondamental de la règle est d’être permanente ». Selon François Terré, « la loi est une règle générale, (…) donc abstraite et permanente »233. 236. La permanence sera appréhendée d’abord négativement puis positivement : après avoir cerné ce que n’est pas la permanence (1), il conviendra de distinguer les différentes configurations du champ d’application des règles du point de vue temporel, afin d’identifier celles qui présentent un caractère général (2). 1. La définition négative de la permanence 237. La permanence correspond à la dimension temporelle du champ d’application d’une règle générale, laquelle est distincte de la durée d’existence de la norme elle-même (a). Elle doit par ailleurs être dissociée de la structure hypothétique de la norme (b). a) La distinction entre la dimension temporelle du champ d’application et la durée de l’existence de la règle elle-même 238. La permanence est difficile à appréhender. Il faut tout d’abord veiller à ne pas confondre la dimension temporelle du champ d’application et celle de la norme elle-même. L’existence d’une norme s’inscrit en effet dans le temps : une norme naît, vit et meurt. L’ordre juridique contient des méta-normes – des normes relatives à d’autres normes – qui déterminent les conditions devant être remplies pour qu’on puisse considérer qu’une norme existe. Dans l’ordre juridique français, la naissance de la norme peut s’effectuer en plusieurs temps. Ainsi, s’agissant des lois, celles-ci entrent en vigueur à deux conditions qui doivent être successivement satisfaites : leur promulgation par le président de la République234 puis leur publication au Journal officiel de la République française235. Elles cessent d’exister à compter de leur abrogation. Un acte administratif n’entre en vigueur qu’à compter de l’accomplissement de certaines formalités de publicité 230. É. BOUVIER et G. JÈZE, « La véritable notion de la loi annuelle de finances », Revue critique de législation et de jurisprudence, t. XXVI, 1897, p. 428. 231. M. HAURIOU, Précis de droit administratif et de droit public, op. cit., p. 564. 232. M. VIRALLY, La pensée juridique, op. cit., p. 46. 233. F. TERRÉ, « La “crise de la loi” », op. cit., ici p. 17. 234. V. art. 10, al. 1er de la Constitution. 235. L’art. 1er, C. civ. prévoit que la loi entre en vigueur à la date qu’elle fixe, ou, à défaut, le lendemain de sa publication. La date d’entrée en vigueur est donc désormais la même dans tout le territoire français depuis l’ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004.

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