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58 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS ministre135. A été également annulé le décret modifiant le statut de la ComédieFrançaise, en vue de permettre au ministre de la Culture (André Malraux) de se soustraire à l’obligation de réintégrer l’administrateur de la Comédie, dont il avait illégalement provoqué la révocation136. 156. La sanction du détournement de pouvoir correspond dans ces cas à la prise en compte par le juge des effets réels de la règle de droit. Il faut néanmoins souligner que cela ne le conduit pas à requalifier l’acte. Celui-ci est simplement censuré. Seule la généralité formelle entre en considération dans l’opération de qualification de l’acte. C’est ce qui différencie d’ailleurs, sur ce point, le juge français du juge de l’Union européenne. 157. La requalification des règlements formellement généraux en décisions par le juge de l’Union européenne. En principe, le juge de l’Union européenne ne tient compte que de la généralité formelle pour qualifier un acte, à l’instar des juges constitutionnel et administratif français. Les spécialistes parlent d’« abstract terminology test » ou « test de terminologie abstraite »137 pour signifier que le juge s’en tient à la façon dont l’acte est rédigé pour déterminer sa nature. Les juridictions de l’Union européenne reconnaissent donc la portée générale d’un acte dès lors que ses « dispositions s’adressent en termes138 abstraits et généraux à des catégories de personnes indéterminées et s’appliquent à des situations déterminées objectivement »139 ou que cet acte « est rédigé en termes généraux et abstraits et applicables dans tous les États membres sans tenir compte de la situation d’importateurs individuels »140. Dans l’affaire KSH, le Conseil avait édicté une réglementation relative à l’octroi de subventions accordées aux fabricants d’isoglucose. Or, au moment de l’adoption de l’acte, il n’existait dans la Communauté que quatre fabricants. La Cour est restée indifférente à cette considération et a maintenu la qualification de règlement, rejetant par conséquent le recours en annulation formée par la société requérante141. 135. CE, 13 janv. 1995, Syndicat autonome des inspecteurs généraux de l’administration, Leb., p. 23, RDP 1995, p. 1091, note X. Prétot : le décret attaqué, en date du 31 décembre 1992, ramenait de 50 ans à 45 ans, l’âge minimal pour les nominations d’inspecteurs généraux de l’administration et dispensait le gouvernement de procéder au préalable à trois nominations au tour intérieur. Le Conseil d’État relève que, « si le gouvernement a justifié cette dernière réforme par la nécessité de pourvoir à trois vacances d’emplois alors qu’aucun inspecteur de l’administration ne possédait l’ancienneté requise pour être promu inspecteur général au tour intérieur, il résulte du dossier que deux inspecteurs devaient acquérir cette ancienneté dès le 1er janvier 1993 [soit le lendemain de la publication du décret !] et que, compte tenu des mouvements affectant les inspecteurs généraux placés en position de détachement, la persistance d’une troisième vacance devait être regardée comme purement hypothétique ; que dans ces conditions et l’abaissement de l’âge minimal de 50 à 45 ans n’ayant eu, en réalité, d’autre objet, comme les dispositions qui viennent d’être analysées, que de permettre la nomination (…) d’une personne déterminée, l’ensemble du décret est entaché de détournement de pouvoir ». 136. CE, Ass., 13 juill. 1962, Bréart de Boisanger, Leb., p. 484 ; AJDA 1962, p. 549, chron. J.-M. Galabert et M. Gentot ; D. 1962, p. 664, concl. J.-F. Henry. 137. L’expression a été lancée par P. CRAIG, « Legality, Standing and Substantive Review in Community Law », Oxford Journal of Legal Studies, vol. 14, 1994, p. 507-537, ici p. 513. V. P. CASSIA, L’accès des personnes physiques ou morales au juge de la légalité des actes communautaires, préf. de P. Manin, Paris, Dalloz, coll. « Nouvelle bibliothèque des thèses », 2002, p. 344 et s. 138. Souligné par nous. 139. CJCE, ord., 5 nov. 1986, Unión de Federaciones Agrarias de España (UFADE) c/ Conseil et Commission, Rec. p. 3255 (pt 11). 140. TPI, 9 avr. 1997, Terres Rouges Consultant SA e.a. c/ Commission, aff. T-47/95, Rec. p. II-481 (pt 41). 141. CJCE, 5 mai 1977, Koninklijke Scholten Honig NV c/ Conseil et Commission, aff. 101/76, Rec. p. 797 (pt 23).

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