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LES RÈGLES GÉNÉRALES, DES RÈGLES CATÉGORIELLES 51 est absent de la Constitution de la Ve République : celle-ci utilise les vocables de « pouvoirs publics constitutionnels », d’« institutions de la République »108 et attribue des compétences aux diverses autorités de l’État, président de la République, ministres, Assemblée nationale, président du Sénat, etc. sans se prononcer sur leur personnalité juridique. Même en ce qui concerne l’organisation administrative de la France, le texte constitutionnel consacre le caractère « décentralisé » de l’« organisation » de la République109 et l’existence des collectivités territoriales110, sans reconnaître expressément leur personnalité juridique, alors que celle-ci est considérée unanimement par la doctrine administrativiste comme une condition essentielle de la décentralisation. D’ailleurs, le Code général des collectivités territoriales ne consacre pas non plus explicitement la personnalité juridique des collectivités territoriales. La personnalité juridique apparaît comme une notion d’abord doctrinale, très peu utilisée par le constituant et le législateur111. 135. Quoi qu’il en soit, si ces entités, non dotées expressément de la personnalité juridique, disposent de droits et obligations limités, elles seront traitées, dans la suite de nos développements, comme de véritables personnes, dans le sens où elles sont le point d’imputation de normes juridiques, « l’unité d’un complexe de normes », selon l’expression de Kelsen112. § 2. IDENTIFICATION DES RÈGLES IMPERSONNELLES 136. Les règles générales ne s’adressent pas directement aux individus mais ont pour point d’imputation des personnes juridiques. C’est en ce sens qu’elles sont impersonnelles, même si ces personnes juridiques ne sont que des fictions : derrière elles, il y a toujours les êtres humains, les seuls réellement capables d’adopter les comportements dictés par les règles juridiques. Si le caractère général est spontanément attribué aux règles visant des catégories qui correspondent à des individus nombreux – les citoyens, les femmes, les mineurs, etc., il est moins évident pour les règles qui concernent dans les faits un petit nombre d’individus (A) et pour celles qui visent des personnes juridiques uniques, c’est-à-dire des catégories de personnes dont il n’existe qu’un exemplaire à la fois (B). 108. Art. 16 de la Constitution. 109. Art. 1er de la Constitution. 110. Art. 72 de la Constitution. 111. V. Cass. civ., 28 janv. 1954, Comité d’établissement de Saint-Chamond c/ Ray, D. 1954, note G. LEVASSEUR, p. 217 : la Cour de cassation se reconnaît compétente pour consacrer la personnalité juridique d’une entité dans le silence du texte législatif. Elle justifie cette compétence en expliquant que la personnalité juridique n’a pas besoin de l’intervention du législateur pour exister : « attendu que la personnalité civile n’est pas une création de la loi ; qu’elle appartient, en principe, à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêts licites, dignes, par suite, d’être juridiquement reconnus et protégés ; que si le législateur a le pouvoir, dans un but de haute police, de priver de la personnalité civile telle catégorie déterminée de groupements, il en reconnaît l’existence en faveur d’organismes créés par la loi elle-même avec mission de gérer certains intérêts collectifs présentant ainsi le caractère de droits susceptibles d’être déduits en justice ». Cette jurisprudence illustre le fait que très souvent, la personnalité juridique n’est pas reconnue explicitement par les textes normatifs. 112. H. KELSEN, Théorie pure du droit, op. cit., p. 175.

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