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44 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS de déjeuner avec une personne physique qu’avec une personne morale. La personne physique est, à l’instar de la personne morale, une personne juridique, c’est-à-dire une construction du droit, un point d’imputation, une convention du langage qui permet de désigner certaines personnes naturelles : c’est par une fiction que certains êtres humains – pas nécessairement tous – sont considérés comme des personnes juridiques physiques. Par cette fiction, on attribue à certains êtres humains certains comportements traduisant l’exercice d’un droit ou l’exécution d’une obligation. La convention « personne physique » varie d’ailleurs d’un système juridique à un autre. Certains systèmes ont une conception restrictive de la personne physique, excluant certains êtres humains – les esclaves, les étrangers, les femmes, etc. À l’inverse, la convention « personne physique » peut renvoyer à un plus grand nombre de singuliers : êtres humains, embryons, animaux. On peut même imaginer un système où les personnes juridiques physiques ne désignent pas des êtres humains : « Le cheval de Caligula peut toujours devenir un consul (donc un sujet de droit en tant qu’auteur des actes consulaires reconnus comme valides), tandis qu’à côté de lui un esclave, tout homme qu’il est, peut ne pas accéder à cette qualité »63. Les personnes physiques constituent une catégorie, un universel du langage juridique : « La qualité de sujet de droit que cette curieuse personne possède, n’est pas due à son caractère humain, mais lui est octroyée par le droit, et constitue donc une catégorie spécifiquement juridique, et non pas une quelconque propriété naturelle »64. 122. La distinction des personnes morales et des personnes physiques se fond donc dans une catégorie commune des personnes juridiques. b) L’assimilation de certaines entités non personnalisées à des personnes juridiques 123. Les règles de droit peuvent viser des entités dépourvues de personnalité juridique telles que les préfets, le président de la République, le préfet de police de Paris, les conseils municipaux65. Ainsi la Constitution de la Ve République prévoit-elle que « le président de la République nomme le Premier ministre »66 ou encore que « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation »67, que « le Premier ministre dirige l’action du Gouvernement »68, que « la loi est votée par le Parlement »69. Certaines et la personne naturelle, l’être humain, est complètement rompu. Il ne peut pas en être autrement, compte tenu du gouffre infranchissable entre l’« être » et « devoir être », entre deux modes radicalement distincts de connaissance, l’une causale et explicative, l’autre juridico-normative ». 63. C. GRZEGORCZYK, « Le sujet de droit : trois hypostases », APD, t. 34, Le sujet de droit, 1989, p. 9-24, ici p. 22. L’auteur poursuit : « Il est vrai qu’il y a quelque chose de choquant dans ce dernier exemple, et tout le monde sait que Caligula était fou. Ce côté étrange ou inacceptable s’explique, à notre avis, par le fait que les concepts juridiques modernes tiennent leurs racines dans la perception dite « naïve » du monde, et qu’à leur origine, ils correspondraient presque totalement à la simple description des réalités. » La réalité naturelle exerce incontestablement des contraintes sur la réalité juridique, sur le pouvoir de création de catégories par le droit (V. 2e partie). 64. Ibid., p. 12, et aussi, à la même page : « Il ne faut pas prendre la notion de personne au sens restrictif d’être humain, car le droit connaît maints sujets qui ne sont pas des hommes. Et même, lorsqu’il s’agit de ces derniers, ce n’est pas vraiment de l’homme qu’il est question, mais d’une curieuse contradiction, typiquement juridique, que l’on a pu baptiser Homo juridicus ». 65. Soulignons que ces solutions sont propres au droit français. En Allemagne et aux États-Unis par exemple, les conseils municipaux ont la personnalité morale. 66. Art. 8 de la Constitution. 67. Art. 20 de la Constitution. 68. Art. 21 de la Constitution. 69. Art. 34 de la Constitution.

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