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LES RÈGLES GÉNÉRALES, DES RÈGLES CATÉGORIELLES 43 règle peut acquérir un caractère abstrait. S’agissant de catégories de personnes, l’abstraction se muera en impersonnalité. L’impersonnalité est donc une forme particulière d’abstraction : c’est l’abstraction envisagée du point de vue des personnes. 2. Les personnes juridiques, points d’imputation des règles générales 118. La règle générale est impersonnelle lorsqu’elle vise une catégorie de personnes, une catégorie personnelle. Cependant, le mot « personne » est extrêmement confus dans la mesure où il existe deux types de personnes : les personnes naturelles, c’est-à-dire les êtres humains, et les personnes juridiques. Les personnes juridiques englobent aussi bien les personnes physiques que les personnes morales, traditionnellement distinguées par la doctrine juridique (a). Par ailleurs, il importe de prendre en considération non seulement les personnes juridiques « officielles », celles qui ont expressément reçu le label de « personne juridique », mais aussi les personnes juridiques « officieuses », qui sont, à l’instar des premières, sujets de droits et d’obligations, mais qui ne sont pas labellisées comme telles (b). a) Le caractère juridique des personnes aussi bien physiques que morales 119. Les règles générales visent les personnes juridiques, abstraction faite des êtres humains. Elles imputent un comportement à une ou plusieurs personnes juridiques59. Ceci étant, n’ayant aucune existence dans la réalité empirique, les personnes juridiques, qu’elles soient physiques ou morales, sont bien incapables d’obéir aux règles juridiques, d’adopter les comportements prescrits par les règles juridiques. Ce ne sont pas les personnes juridiques qui obéissent aux règles de droit mais les êtres humains. Tout système juridique établit donc des correspondances entre les personnes juridiques et les personnes naturelles. Grâce au procédé de la fiction, les comportements des secondes seront imputés aux premières. 120. On distingue traditionnellement deux catégories de personnes, les personnes physiques et les personnes morales, en expliquant que les premières sont les êtres humains, et les secondes, des groupes d’êtres humains, voire des patrimoines. La notion de personne morale, « peut-être l’une des notions les plus controversées qui soit »60, a violemment divisé les membres de la doctrine au sujet de sa nature, les uns défendant sa réalité, les autres, son caractère fictif61. On connaît la phrase fameuse de Gaston Jèze, qui déclarait n’avoir jamais déjeuné avec une personne morale. 121. Pourtant, les personnes physiques ne doivent pas être confondues avec les êtres humains eux-mêmes. Comme l’a mis en valeur Kelsen, les personnes physiques sont tout aussi fictives que les personnes morales62, et il est tout aussi impossible 59. Cette conception des règles juridiques sera par la suite élargie. Dans le chapitre suivant, on verra en effet que toutes les règles n’imputent pas un comportement à une ou plusieurs personnes juridiques. 60. M. VIRALLY, La pensée juridique, op. cit., p. 128. 61. La bibliographie est particulièrement fournie sur ce sujet. V. J. VANCOMPERNOLLE, « La personnalité morale : fiction ou réalité ? », Les présomptions et les fictions en droit, Travaux du centre national de recherches de logique, Études publiées par C. Perelman et P. Foriers, Bruxelles, Bruylant, 1974, p. 318-338 ; L. SILANCE, « La personnalité juridique – réalité ou fiction ? », dans Les présomptions et les fictions en droit, op. cit., p. 278-317, et les nombreuses références citées par ces auteurs. 62. H. KELSEN, Théorie pure du droit, op. cit., p. 173-175 : « Une analyse plus approfondie fait apparaître que c’est en réalité la « personne physique » qui est, elle aussi, une construction artificielle de la science du droit ». V. aussi Stanley S. PAULSON, « Hans Kelsen et les fictions juridiques », Droits, n° 21, 1995, pp. 65-81, p. 66 : « dans la théorie pure du droit, le lien entre la personne juridique http://www.61.La

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