Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 475)

LA DÉROGATION AUX RÈGLES GÉNÉRALES 457 1325. En revanche, si elle admet la normativité des dispositions non impératives, une très grande majorité de la doctrine reste attachée à la conception impérativiste de la normativité puisqu’elle ne cesse de déplorer la prolifération de ces normes molles, affirmant que le droit est par essence contraignant409. 1326. Le choix de telle ou telle conception de la normativité dépend avant tout des acteurs du système juridique à qui revient le pouvoir de trancher définitivement, de dire le dernier mot, c’est-à-dire, essentiellement, les juridictions suprêmes. Or, il est clair que le Conseil constitutionnel, et plus encore le Conseil d’État, assimilent la normativité et l’impérativité. B. L’ABSENCE DE NORMATIVITÉ DES DISPOSITIONS NON IMPÉRATIVES EN DROIT POSITIF 1327. Qu’il s’agisse des dispositions des lois fixant des objectifs (1) ou encore des recommandations émises par le législateur ou l’administration (2), la normativité est, pour le juge constitutionnel comme pour le juge administratif, indissociable de l’impérativité. 1. Les lois fixant des objectifs 1328. La Constitution a expressément prévu deux catégories de « lois à suivre », selon l’expression du Doyen Carbonnier, c’est-à-dire des lois qui, par opposition aux « lois closes » ne suffisent pas à elles-mêmes mais annoncent d’autres lois410. Il s’agit d’abord des lois de programme, prévues par l’article 34 de la Constitution411 et devenues depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, les lois de programmation412. En outre, l’article 70 de la Constitution de l’État, les normes qu’ils véhiculent sont peu, voire ne sont pas- susceptibles de prendre véritablement rang dans la gradation des règles de Droit. En effet, aucune norme ne peut être déclarée illicite à raison de ce qu’elle disconviendrait à un conseil ». 409. V. par ex. : C. ATIAS, « Normatif et non-normatif dans la législation récente du droit privé », RRJ 1982, p. 29-224 ; « Les maux du droit et les mots pour le dire », D. 1997, chron. p. 231-233 ; J.-L. AUTIN, « Illusions et vertus de l’État de droit administratif » L’État de droit, sous la dir. de D. Colas, Travaux de la mission sur la modernisation de l’État, Paris, PUF, 1987, p. 145-170 ; G. CARCASSONNE, « Société de droit contre État de droit », Mélanges en l’honneur de Guy Braibant, L’État de droit, Paris, Dalloz, 1996, p. 37-45 ; J.-P. HENRY, « Vers la fin de l’État de droit ? », RDP 1977, p. 1207-1235 ; N. MOLFESSIS, « La distinction du normatif et du non-normatif », RTD civ. 1999, p. 729-734 ; B. MATHIEU, La loi, Paris, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 2e éd., 2004, p. 97 et s. ; A.-L. VALEMBOIS, La constitutionnalisation de l’exigence de sécurité juridique en droit français, préf. de B. Mathieu, Paris, LGDJ, coll. « Bibliothèque constitutionnelle et de science politique », t. 122, 2005, spéc. p. 120-123. Au contraire, certains auteurs soulignent les avantages de cette normativité molle : A. PELLET, « Le “bon droit” et l’ivraie - Plaidoyer pour l’ivraie (Remarques sur quelques problèmes de méthode en droit international », Mélanges Charles Chaumont, Paris, Pedone, 1984, p. 465-493 ; G. TIMSIT, « Pour une nouvelle définition de la norme », DS chron. XLII, p. 267-269. 410. J. CARBONNIER, Droit civil-Introduction, op. cit., p. 213. 411. J. MOLINIER, « Les lois de programme », RFFP 1987, n° 17, p. 157-175 ; W. SABÈTE, « La conception matérielle de la loi. L’exception de la loi de programme », À propos des décisions du Conseil constitutionnel n° 2005-512 DC du 21 avril 2005 (Loi d’orientation et de programmation sur l’avenir de l’école) et n° 2005-516 DC du 7 juill. 2005 (Loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique), RFDA, sept.-oct. 2005, Dossier Déclin ou renouveau de la loi ?, p. 930-934 ; « L’exigence de « portée normative » de la loi dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel et la notion de loi de programme – Décisions du Conseil constitutionnel des 21 avr. et 7 juill. 2005 », RRJ 2005-4 (II), p. 2237-2256. 412. Art. 34 : « (…) Des lois de programmation déterminent les objectifs de l’action de l’État. Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ».

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