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448 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS une « codification des motifs »367. Le juge a néanmoins refusé d’y voir l’exercice d’un pouvoir réglementaire, malgré les sollicitations de la doctrine368 et des commissaires du gouvernement. Nicole Questiaux, dans ses conclusions sur l’arrêt Société Distillerie Brabant, avait en effet tenté de faire reconnaître par le juge un pouvoir réglementaire autonome au profit du ministre compétent en matière d’incitations économiques369, afin que l’autorité administrative investie d’un pouvoir discrétionnaire d’attribution ou de refus d’un avantage fiscal ou financier, puisse limiter elle-même, par avance, ce pouvoir, en définissant et en publiant, même sans habilitation législative expresse, les conditions auxquelles elle entend subordonner l’attribution de cet avantage et les critères en fonction desquels elle sera en principe tenue de sélectionner les demandes370. Ce refus de qualifier la directive d’acte réglementaire s’explique ainsi peut-être moins par le respect des exigences constitutionnelles, comme l’ont affirmé certains auteurs, que par la volonté de respecter le pouvoir discrétionnaire de l’administration. À défaut d’un pouvoir réglementaire, les autorités administratives se sont donc vues reconnaître un pouvoir d’orientation. 1295. Les directives ne sont légales que dans la mesure où les autorités administratives ne renoncent pas à leur pouvoir d’appréciation. Autrement dit, la directive est nécessairement assortie d’une possibilité de dérogation en cas de motif d’intérêt général ou de circonstances particulières. 1296. La directive est perçue par certains auteurs comme un « embryon de règle de droit »371, « un phénomène très curieux de pseudo-règle de droit »372, « un acte hybride »373. Pourtant, la distinction entre la directive et l’acte réglementaire est ténue. En effet, un acte réglementaire peut tout aussi bien être assorti d’une possibilité de dérogation pour tel ou tel motif. La seule différence avec la directive est que cette possibilité de dérogation doit être expressément prévue, elle n’est pas systématique, tandis que la faculté de dérogation est un élément de définition de la directive. Autrement dit, pour les règlements, le pouvoir de dérogation est contingent, tandis qu’il est essentiel pour les directives. 1297. La distinction entre directive et règlement apparaît donc très artificielle et donne un pouvoir considérable au juge. Dans ses conclusions sur l’arrêt Crédit foncier de France, le commissaire du gouvernement Bertrand affirme que « l’instruction n° 46 de la Commission nationale d’amélioration de l’habitat a en effet, par son contenu autant que par la terminologie, toutes les apparences Crédit foncier de France - La jurisprudence des interventions économiques de l’État », AJDA 1971, p. 196-199 ; P. PAVLOPOULOS, La directive en droit administratif, préf. de P. Weil, Paris, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit public », t. CXXVIII, 1978. 367. L’expression est employée par le commissaire du gouvernement Bertrand dans ses conclusions sur l’arrêt Crédit foncier de France (Leb., p. 757). 368. V. thèse C. WIENER ; M. DELMAS-MARSALET, « Le contrôle juridictionnel des interventions économiques de l’État », EDCE 1969, p. 153. 369. N. QUESTIAUX, concl. sur CE, 23 mai 1969, Société Distillerie Brabant, Leb., p. 264 ; AJDA 1969, p. 640. 370. V. H.T.C. : « De l’arrêt société « maison Génestal » à l’arrêt Crédit foncier de France - La jurisprudence des interventions économiques de l’État », AJDA 1971, p. 196-199, ici p. 197. 371. J. BOULOUIS, « Sur une catégorie nouvelle d’actes juridiques : “les directives” », Recueil d’études en l’honneur de Charles Eisenmann, Paris, CUJAS, 1975, p. 191-203, p. 192. 372. M. WALINE, note sous CE, Sect., 11 déc. 1970, Crédit foncier de France, RDP 1971, p. 1229 et s., ici p. 1231. 373. M. CLIQUENNOIS, « Que reste-t-il des directives ? », op. cit., ici p. 3.

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