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LA DÉROGATION AUX RÈGLES GÉNÉRALES 433 1252. De même, en matière de contraventions de grande voirie, le juge administratif se limite à la censure de l’erreur manifeste d’appréciation lorsqu’il contrôle la légalité du refus du préfet de poursuivre l’auteur d’une contravention de grande voirie. Depuis l’arrêt Ministre de l’Équipement c/ Association des amis des Chemins de ronde, les autorités chargées de la police de la conservation du domaine public maritime sont tenues de poursuivre les contrevenants devant le juge administratif. Mais cette obligation trouve ses limites « dans les autres intérêts généraux » dont ces autorités « ont la charge, et notamment dans les nécessités de l’ordre public »301. Or, dans l’arrêt Cacheux302, rendu à propos du naufrage du pétrolier Erika, le Conseil d’État se borne à observer que « c’est sans erreur manifeste d’appréciation que le préfet (…) a pu ainsi refuser de faire droit à la demande de M. Cacheux » de dresser un procèsverbal de contravention de grande voirie. Selon le professeur Sylvie Caudal Sizaret, le contrôle aurait dû être au moins normal dans la mesure où « on est en présence d’une dérogation à une obligation de principe pour l’autorité administrative, justifiée par l’impératif de protection du domaine public et par le fait que, à la différence des poursuites devant le juge pénal, seul l’État a ici la possibilité de les engager »303. 1253. En outre, toutes les mesures de police administrative ne font pas l’objet d’un contrôle maximum. En matière de police des étrangers, les mesures visant les ressortissants de l’Union européenne font l’objet d’un contrôle normal de la qualification304 tandis que celles visant les ressortissants des États non membres ne font l’objet que d’un contrôle restreint de la qualification305. Le juge n’opère aucun contrôle de l’adéquation des mesures prises. 1254. Il convient également de souligner que le contrôle exercé avec la technique du bilan coûts-avantages, initié par la jurisprudence Ville Nouvelle Est en matière d’expropriation pour cause d’utilité publique306, ne concerne pas, à notre connaissance, les dérogations de portée générale, au sens absolu de la généralité. Si le contrôle du bilan s’est généralisé, il ne porte que sur des dérogations particulières : permis de construire dérogeant à un plan d’urbanisme307, destruction de tel ouvrage public par dérogation au principe de l’intangibilité des ouvrages publics308, dérogations concernant tel ou tel acte administratif au principe du caractère rétroactif de l’annulation contentieuse309 ou aux « règles de droit commun » concernant l’entrée en vigueur des actes administratifs310. 301. CE, Sect., 23 févr. 1979, Ministre de l’Équipement c/ Association des Amis des Chemins de ronde, Leb., p. 75, concl. Bacquet ; JCP G 1980. II. 18329, note J.-F. Davignon ; RDP 1979, p. 1157, note M. Waline. 302. CE, 30 sept. 2005, M. Cacheux, Leb., p. 407 ; AJDA 2005, p. 2473, concl. P. Collin, p. 2469. 303. S. CAUDAL SIZARET, « Actualité des contraventions de grande voirie en matière de protection de l’environnement », Mélanges en l’honneur de Jacqueline Morand-Deviller, Paris, Montchrestien, p. 735-746, ici p. 739-740. 304. V. par ex. : CE, 24 oct. 1990, Ragusi, Leb., p. 290 : pour un refus de carte de séjour. 305. V. par ex. : CE, 3 févr. 1975, Pardov, Leb., p. 83 : annulation d’un arrêté d’expulsion en raison d’une erreur manifeste d’appréciation de la part du ministre. Il y a néanmoins contrôle normal lorsqu’il y a contestation des conditions permettant le prononcé (sans procédure) d’une expulsion en « urgence absolue » (CE, Ass., 18 mars 1955, Hamou… dit Paci, Leb., p. 168) ou de la désignation du pays de destination de l’étranger éloigné (CE, Ass., 6 nov. 1987, Buayi, Leb., p. 348 ). 306. CE, Ass., 28 mai 1971, Ministre de l’Équipement c/ Fédération de défense des personnes concernées par le projet actuellement dénommé « Ville Nouvelle Est », Leb., p. 409, concl. G. Braibant ; GAJA. 307. CE, Ass., 18 juill. 1973, Ville de Limoges, Leb., p. 530. 308. CE, Sect., 29 janv. 2003, Syndicat départemental de l’électricité et du gaz des Alpes maritimes et Commune de Clans, Leb., p. 21, concl. C. Maugüé. 309. CE, Ass., 11 mai 2004, Association AC ! et autres, Leb., p. 197, concl. Devys ; GAJA. 310. CE, Ass., 24 mars 2006, Société KPMG et autres, Leb., p. 154 ; GAJA.

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