Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 445)

LA DÉROGATION AUX RÈGLES GÉNÉRALES 427 et une durée limités, au principe d’égalité devant la loi, il doit en définir de façon suffisamment précise l’objet et les conditions et ne pas méconnaître les autres exigences de valeur constitutionnelle ». Ainsi, le législateur « ne pouvait, sans méconnaître l’article 37-1 de la Constitution, renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de fixer la durée de cette dérogation »271. 1234. En ce qui concerne la jurisprudence administrative, le Conseil d’État est souvent incompétent pour sanctionner des habilitations trop imprécises dès lors qu’elles ont valeur législative. En revanche, si la norme d’habilitation est une norme administrative, la Haute Juridiction a les mêmes exigences que le Conseil constitutionnel. Par exemple, dans l’arrêt Fédération nationale des syndicats de police, une loi de février 1960 habilitait le gouvernement à prendre pendant un délai limité des « mesures normalement comprises dans le domaine de la loi et nécessaires pour assurer le maintien de l’ordre et, par conséquent à fixer par ordonnance prise en vertu de l’article 38 de la Constitution, les garanties fondamentales reconnues aux personnels de la police de la Sûreté nationale ». Selon le Conseil d’État, les dispositions attaquées de l’ordonnance « loin de déterminer ces garanties, donnent au gouvernement tout pouvoir de régler par décrets en Conseil d’État, le statut de ces personnels, les dispositions (…) du statut général ne demeurant applicables à ceux-ci que dans la mesure où le gouvernement aura choisi de n’y pas déroger ». L’ordonnance opère donc un transfert de compétence au gouvernement, contraire à l’article 34 de la Constitution272. 1235. L’autorité normative habilitante se trouve donc tenue au minimum de fournir les motifs à même de justifier les dérogations qui seront prises en vertu de la norme d’habilitation qu’elle édicte. Par exemple, en matière de procédure administrative contentieuse, le pouvoir réglementaire est habilité à prévoir des cas de compétence directe du Conseil d’État par dérogation à la compétence de droit commun des tribunaux administratifs en premier ressort. Le législateur a pris soin de préciser que ces dérogations sont justifiées soit par l’objet du litige, soit par l’intérêt d’une bonne administration de la justice273. Le pouvoir constituant a également précisé les motifs qui justifient le recours par le président de la République aux pouvoirs exceptionnels. Selon l’article 16, il faut que « les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux [soient] menacées d’une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels [soit] interrompu ». De même, le législateur habilite le pouvoir réglementaire à édicter pour les corps reconnus comme ayant un caractère technique, un statut particulier qui déroge à certaines dispositions du statut général des fonctionnaires, il précise là encore les motifs de ces dérogations, à savoir les « besoins propres de ces corps » et les « missions que leurs membres sont destinés à assurer »274. 271. CC, décision n° 2009-584 DC, 16 juill. 2009, Loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, JO du 22 juill. 2009, p. 12244, cons. 38 et 39. 272. CE, Ass., 24 nov. 1961, Fédération nationale des syndicats de police, Leb., p. 658. 273. Art. L. 311-1, CJA : « Les tribunaux administratifs sont, en premier ressort, juges de droit commun du contentieux administratif, sous réserve des compétences que l’objet du litige ou l’intérêt d’une bonne administration de la justice conduisent à attribuer au Conseil d’État ». 274. Art. 10 de la loi n° 84-16 du 11 janv. 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, JO du 12 janv. 1984, p. 271. http://www.271.CC

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