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26 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS voleur, il est possible de dire que sa justification est rationnelle, car respectueuse des règles de la logique formelle. Simplement, il faut garder à l’esprit que la sentence n’est pas valide parce qu’elle est logiquement déduite de la règle générale mais parce qu’elle a été émise par un interprète authentique. 68. La théorie réaliste de l’interprétation, si elle présente l’inconvénient de se focaliser sur l’interprétation authentique, c’est-à-dire principalement celle des juridictions suprêmes, ignorant la vie des énoncés normatifs avant leur arrivée dans le prétoire, a pour immense mérite de permettre une description du droit tel qu’il est réellement : un ensemble de rapports de force, de jeux de pouvoir. Il nous semble en effet essentiel d’être conscient du fait qu’un interprète authentique comme le Conseil d’État, est juridiquement libre de décider ce qu’il veut dans la mesure où aucune juridiction supérieure ne peut casser ses arrêts. S’il ne le fait pas, c’est parce qu’il est contraint de composer avec les autres autorités du système juridique. Contrairement à une idée répandue, la théorie réaliste ne cherche pas à démontrer que les cours suprêmes décident comme elles l’entendent, mais à expliquer pourquoi elles ne peuvent pas décider comme elles l’entendent. 69. La règle de droit, traditionnellement définie comme une « règle de conduite dans les rapports sociaux, générale, abstraite et obligatoire, dont la sanction est assurée par la puissance publique »125 ou plus largement, comme « une espèce de modèle (…) [permettant] de déterminer comment les choses doivent être »126, sera ici simplement entendue comme l’expression d’un acte de volonté et, plus précisément, le résultat d’une interprétation authentique, plus ou moins contrainte. 70. Les termes « norme » et « règle » seront utilisés indistinctement, dans la mesure où l’on a reconnu la normativité des solutions d’espèce. Réserver le terme « règle » aux normes générales ferait de l’expression « règle générale » une tautologie. 71. Muni de cette conception de la règle de droit, il s’agit donc d’analyser le discours juridique et de voir la ou les acception(s) qu’y reçoit l’expression « règle générale ». Il n’est pas question de définir a priori la règle générale mais de reconstituer, à partir de l’ensemble du discours juridique, celui des autorités normatives du système juridique complété par celui de la doctrine, la ou les définition(s) de la règle générale. L’identification préalable de ce que sont les règles générales permettra ensuite de s’interroger sur leur rôle et leur place au sein du système juridique. § 2. PRÉSENTATION DU PLAN 72. Pourquoi parle-t-on, dans le discours juridique, de règles générales ? On peut supposer que l’emploi de l’épithète « générale » à côté du nom « règle » résulte d’une décision d’« individuation » des normes juridiques127, c’est-à-dire de la décision d’isoler, parmi l’ensemble des règles juridiques, certaines d’entre 125. Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 15e éd., 2005, p. 532. 126. A. JEAMMAUD, « La règle de droit comme modèle », D. 1990, chron. XXXIV, p. 199-210. 127. Sur l’individuation des normes juridiques, v. G. TUSSEAU, Les normes d’habilitation, op. cit., p. 45-53.

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