Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 420)

402 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS 1169. En définitive, s’il est certain que les normes les plus générales font l’objet d’un contrôle restreint et servent finalement peu à censurer des lois ou des actes administratifs, il reste difficile d’affiner l’analyse en distinguant plusieurs degrés de contrôle au sein même de ces normes. Pour ne reprendre que l’exemple de la Charte de l’Environnement, tous les principes et droits qu’elle consacre doivent être mis sur le même plan et soumis au même régime contentieux. Leur généralité leur confère certes une portée moindre mais il semble vain de chercher à dresser une hiérarchie entre eux en fonction de leur portée. *** 1170. Les règles très générales ne sont pas dépourvues de portée normative. Elles peuvent être invoquées par les requérants dans le cadre d’un contentieux objectif qui englobe le contrôle de constitutionnalité des lois et les recours pour excès de pouvoir contre les actes administratifs réglementaires, la jurisprudence France Terre d’asile étant désormais obsolète. En revanche, dès lors qu’un droit subjectif est en cause, la généralité s’avère un obstacle : le juge refuse de s’appuyer sur les règles trop générales tant qu’elles n’ont pas été précisées par des règles d’application. Au-delà de cette analyse, il paraît difficile de distinguer plusieurs degrés de contrôle qui seraient fonction des degrés de généralité de la norme. § 2. L’ENCADREMENT CROISSANT DU POUVOIR D’ÉDICTER DES RÈGLES GÉNÉRALES 1171. Si certaines règles ne sont dotées que d’une portée normative faible en raison de leur trop grande généralité, on constate de façon concomitante que le pouvoir d’édicter des règles générales est de plus en plus encadré. En effet, on critique à la fois l’adoption de dispositions législatives trop vagues et celles de lois beaucoup trop détaillées165. Ces dernières, souvent qualifiées de lois réglementaires, fixent elles-mêmes les détails de leur application, encadrant ainsi strictement le pouvoir réglementaire. De même, le droit de l’Union européenne lie étroitement le législateur national et le pouvoir réglementaire : de très nombreux textes se contentent de transposer mécaniquement les directives. 1172. Désormais, le pouvoir d’édicter des règles générales se trouve également lié non plus seulement par les législateurs national et européen mais par le juge, qu’il s’agisse du juge constitutionnel ou du juge administratif. Ces derniers exigent que les dispositions normatives possèdent un certain degré de précision, ce qui les conduit à dénier toute normativité aux dispositions trop générales (A). Par ailleurs, l’étude de la jurisprudence récente révèle un accroissement considérable des pouvoirs du juge, lequel n’hésite plus à imposer au pouvoir législatif ou réglementaire une obligation d’agir dans un sens déterminé (B). 165. V. notamment le Rapport public 1991 du Conseil d’État (De la sécurité juridique, La Documentation française, Études et documents, n° 43). S’il fustige le développement d’un droit « à l’état gazeux », le Conseil d’État critique aussi l’excès de précision du législateur (p. 24) : « Alors que le législateur du 19e siècle s’en tenait en effet aux grands principes et, par voie de conséquence, à des rédactions assez générales pour permettre des interprétations évolutives (voir, notamment, la souplesse et la longévité de l’article 1382 du Code civil ou de la loi de 1901 sur les associations), le législateur moderne incline à la précision et cède volontiers au charme des énumérations limitatives ou même, sous l’influence anglo-saxonne, à la tentation des définitions – si contraires à l’esprit du droit français ».

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