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386 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS non seulement qu’il n’[était] pas d’application directe mais encore que son imprécision lui interdi[sait] d’accéder au rang de règle de droit ». Pourtant, dans sa décision sur la loi « sécurité et liberté » des 19 et 20 janvier 1981 (n° 80-127 DC), le Conseil constitutionnel en a fait « une application inattendue » en interdisant au législateur d’enfreindre la règle plus douce (lex mitior), découlant du principe de nécessité des peines puisque lorsque le législateur édicte une peine plus douce, il reconnaît en même temps le caractère non nécessaire de la peine plus sévère94. Ainsi, le degré d’imprécision de la norme constitutionnelle « n’empêche nullement qu’elle serve de base à la censure de la loi ou du règlement qui lui est contraire (…) [mais a] pour seul effet d’ouvrir au législateur, à l’Administration ou au juge un pouvoir d’appréciation plus ou moins étendu »95. S’agissant des principes particulièrement nécessaires à notre temps énoncés dans le Préambule, le Conseil constitutionnel en a fait application pour la première fois dans la décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, IVG, en invoquant le principe énoncé dans le préambule de la Constitution de 1946 selon lequel la nation garantit à l’enfant la protection du droit à la santé. Par la suite, il a appliqué tous les principes particulièrement nécessaires à notre temps qui ont été évoqués devant lui. 1117. La jurisprudence administrative est plus ambiguë que celle du Conseil constitutionnel : si certaines dispositions sont jugées suffisamment précises pour être susceptibles d’être appliquées telles qu’elles sont et servir de base à une action en justice, d’autres ne semblent au contraire être utilisables qu’après avoir été précisées par une loi d’application96. 1118. Ainsi le Conseil d’État a-t-il décidé que l’alinéa 12 du préambule de 1946 selon lequel « la nation proclame la solidarité et l’égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales » ne pouvait être invoqué à l’appui d’un recours tant qu’une loi n’aurait pas précisé ses modalités d’application97 : « si, en vertu du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 auquel se réfère la Constitution du 4 octobre 1958, “la nation proclame la solidarité et l’égalité de tous les Français devant les charges résultant de calamités nationales ”, le principe ainsi posé, en l’absence de disposition législative précise en assurant l’application, ne peut servir de base à une action contentieuse en indemnité »98. 1119. De même, l’alinéa 4 selon lequel « tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur les territoires de la République » n’a pas été considéré comme suffisamment précis : par suite, il « ne s’impose au 94. G. VEDEL, « La place de la Déclaration de 1789 dans le “bloc de constitutionnalité” », La déclaration des droits de l’homme et du citoyen et la jurisprudence, colloque des 25 et 26 mai 1989 au Conseil constitutionnel, PUF, 1989, p. 35-64, ici p. 55. 95. Ibid., p. 56. 96. Sur l’application de la Constitution par le juge administratif, v. notamment : F. BATAILLER, Le Conseil d’État, juge constitutionnel, préf. de G. Vedel, Paris, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit public », t. LXVIII, Paris, 1966 ; K. BUTÉRI, L’application de la constitution par le juge administratif, sous la dir. de P. Gaïa, thèse (dactylographiée), Aix-Marseille, 2000 ; R.-É. CHARLIER, « La Constitution et le juge de l’administration », Mélanges Stassinopoulos, Paris, LGDJ, 1974, p. 39-46 ; M. WALINE, « La violation de la Déclaration des droits de l’Homme, moyen d’excès de pouvoir », note sous CE, 7 juin 1957, Condamine, RDP 1958, p. 99-101. 97. CE, 10 déc. 1962, Société Indochinoise de constructions électriques, Leb., p. 676 ; CE, 29 nov. 1968, Tallagrand, Leb., p. 606, D. 1969, p. 386, note V. Silvera ; RDP 1969, p. 686, note M.Waline ; JDI 1969, note D. Ruzié, p. 382 ; conf. TA Marseille, 9 juill. 1965, Leb., p. 768. 98. Arrêt Tallagrand, préc.

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