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22 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS le contrat est une norme, ce n’est pas en raison de l’échange des volontés, mais parce que la loi – l’article 1134 du Code civil109 – fait de cet échange la condition pour qu’un contrat lie les parties. Seul le droit – et non un fait comme la volonté – produit le droit, le droit règle sa propre création. 58. Que la relation soit dynamique ou statique, la norme supérieure constitue toujours un cadre pour la norme inférieure. Certes, dans son chapitre sur l’interprétation qui clôt la deuxième version de la Théorie pure du droit, Kelsen récuse l’idée que les lois ne peuvent jamais fournir qu’une seule décision correcte et que l’interprétation est un acte de connaissance qui permet de connaître le sens véritable de la loi. Mais la loi demeure un cadre, qui fournit non pas une seule mais une série de décisions correctes : « Dire qu’un acte juridictionnel, un jugement ou un arrêt, est fondé sur la loi ne signifie pas qu’il est la norme qui peut être créée dans le cadre de la norme générale, mais seulement qu’il est l’une des normes individuelles qui pourraient toutes également l’être ; en somme, cela signifie que la décision se tient à l’intérieur du cadre que représente la loi »110. L’édiction de la norme inférieure est donc à la fois un acte de volonté – dans les vides laissés par le cadre – et acte de connaissance – des limites déterminées par le cadre : « Dans l’application du droit par un organe juridique, l’interprétation du droit à appliquer, par une opération de connaissance, s’unit à un acte de volonté par lequel l’organe applicateur de droit fait un choix entre les possibilités révélées par l’interprétation à base de connaissance »111. La création d’une norme inférieure est donc toujours prédéterminée, même s’il peut s’agir d’une prédétermination extrêmement réduite dans le cas d’une relation dynamique entre deux normes : « Les normes générales ne sont jamais qu’un cadre à l’intérieur duquel les normes individuelles doivent être créées. Seulement, ce cadre peut être plus étroit ou plus large. Il atteint la largeur maximum lorsque la norme générale positive ne contient que l’habilitation à créer la norme individuelle, sans déterminer par avance son contenu »112. Ainsi Kelsen est-il amené à distinguer l’interprétation scientifique, qui consiste à déterminer les différentes significations possibles d’un texte et qui est une fonction de connaissance, de l’interprétation authentique, par laquelle un organe de l’ordre juridique choisit la signification qui s’imposera et qui est un acte de la volonté. 2. La distinction des cas clairs et des cas difficiles selon Herbert L.A. Hart 59. Juriste et philosophe, Herbert L.A. Hart reprend les apports de la théorie du langage ordinaire ainsi que de nombreux éléments de la théorie kelsénienne113. Ainsi explique-t-il qu’il existe, en droit, des cas clairs (easy cases) d’application des règles juridiques, lorsque les règles juridiques écartent, selon les conventions sémantiques et syntaxiques utilisées, tout doute réel. Dans ces cas, la règle qui doit être appliquée, la prémisse majeure du syllogisme est donnée au juge, lequel doit alors l’appliquer mécaniquement. La norme est prête à l’emploi, elle prédétermine de façon univoque la solution de la controverse, sans laisser au juge aucun espace de discrétion. 109. « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ». 110. H. KELSEN, Théorie pure du droit, op. cit., p. 338. 111. Ibid., p. 340. 112. H. KELSEN, Théorie pure du droit, op. cit., p. 244-245. 113. V. H. L.A. HART, Le concept de droit, trad. de l’anglais par M. Van de Kerchove, Bruxelles, Publications des facultés universitaires de Saint-Louis, 1976.

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