Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 391)

L’APPLICATION DES RÈGLES GÉNÉRALES 373 A. LA SPÉCIFICITÉ DES RÈGLES DE CONCRÉTISATION 1076. C’est pour les règles de concrétisation que le lien d’application est le plus évident. L’utilité de distinguer au sein des règles d’application les règles de concrétisation apparaît clairement avec les lois que le Conseil constitutionnel qualifie de « mesures d’application », qualification qui entraîne l’application d’un régime spécifique. Ces lois relèvent de la catégorie des règles de concrétisation : elles font application de règles législatives générales à un cas particulier. Ainsi, dans la décision du 25 janvier 1985 relative à l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie39, le Conseil constitutionnel était saisi d’une loi déclarant que l’état d’urgence proclamé par l’arrêté du Haut-commissaire de Nouvelle-Calédonie le 12 janvier était rétabli jusqu’au 30 juin 1985, la prorogation de l’état d’urgence au-delà de douze jours ne pouvant être autorisée que par la loi (article 2 in fine de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence). Le juge a considéré cette loi comme une « mesure d’application » de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence et de la loi du 6 septembre 1984 portant statut de la Nouvelle-Calédonie et plus particulièrement de son article 119 qui permet au Haut-commissaire de « proclamer l’état d’urgence dans les conditions prévues par les lois et les décrets »40. 1077. Tout d’abord, le Conseil constitutionnel admet tout à fait que le législateur puisse prendre une mesure d’application de la loi. Déjà, dans la décision du 23 mai 1979, toujours à propos de la Nouvelle-Calédonie, le Conseil avait estimé que les dispositions législatives mettant fin aux mandats de l’Assemblée territoriale et du Conseil de gouvernement « n’entraient pas dans le champ d’application des articles 34 et 37 de la Constitution. En d’autres termes, l’article 34 est considéré comme limitant le législateur seulement pour la fixation de règles ou la détermination des principes. Il ne le limite en rien pour l’édiction d’actes qui ne sont pas considérés comme fixant des règles ou déterminant des principes, mais qui ont simplement pour objet d’appliquer des règles ou des principes préexistants41. 1078. La qualification de mesure d’application par le Conseil constitutionnel entraîne deux conséquences. 1079. D’abord, la loi prorogeant l’état d’urgence pouvait être décidée sans la consultation de l’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie, contrairement à ce que soutenaient les requérants. Certes, l’article 74 de la Constitution prévoit que l’organisation particulière des territoires d’outre-mer est définie et modifiée par la loi après consultation de l’assemblée territoriale intéressée. Néanmoins, ce n’est pas la loi prorogeant l’état d’urgence qui modifie l’organisation du territoire, c’est la loi prévoyant l’état d’urgence. 39. CC, décision n° 85-187 DC, 25 janv. 1985, État d’urgence en Nouvelle Calédonie, JO du 26 janv. 1985, p. 1137 ; Sur cette décision, V. notamment : L. FAVOREU, chronique constitutionnelle, RDP 1986, p. 439 ; F. LUCHAIRE, note, D.-S. 1985, Jurisprudence, p. 361-367 ; C. FRANCK, Observations, JCP G 1985. II. 20355. 40. V. F. LUCHAIRE, D.-S. 1985, Jurisprudence, p. 361-367, ici p. 363. L’auteur qualifie la loi prorogeant l’état d’urgence d’« acte-condition » dont l’intervention déclenche l’application des règles déterminées par la loi de 1955. 41. CC, décision n° 79-104 DC, 23 mai 1979, Territoire de Nouvelle-Calédonie, JO du 25 mai 1979. V. aussi : CC, décision n° 82-126 L, 12 oct. 1982, Nature juridique des dispositions des articles 1106-16 et 1162 du Code rural, JO du 13 oct. 1982, p. 3062. http://www.39.CC http://www.41.CC

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