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348 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS § 2. LE PRINCIPE D’ÉGALITÉ 1011. Si, selon l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, « la loi doit être la même pour tous », le principe d’égalité n’est pas et d’ailleurs, ne peut pas, être interprété comme impliquant que les règles juridiques aient un champ d’application universel162. La généralité de la règle juridique sécrète en son sein son propre poison : parce qu’elle ne se confond pas avec l’universalité, elle implique l’existence de règles spéciales (A). Néanmoins, s’il ne fait pas obstacle à l’édiction de règles spéciales, le principe d’égalité interdit certaines dérogations (B). A. LE PRINCIPE D’ÉGALITÉ N’IMPLIQUE PAS L’UNIVERSALITÉ DE LA RÈGLE DE DROIT : LA DISTINCTION DE LA GÉNÉRALITÉ ET DE L’UNIVERSALITÉ 1012. Le principe d’égalité, norme de valeur constitutionnelle n’interdit pas les dérogations législatives. Certaines dispositions constitutionnelles, et notamment l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen selon lequel « la loi doit être la même pour tous », auraient pourtant pu être interprétées comme prescrivant l’universalité de la loi. On peut donc considérer que la définition catégorielle de la généralité est contraire au principe d’égalité consacré par la Constitution. Comme l’écrit le professeur Olivier Jouanjan dans ses « Réflexions sur l’égalité devant la loi »163, « si la généralité signifie que la norme délimite des catégories, qu’elle utilise pour ce faire des critères, on voit mal comment cette simple opération garantirait une égalité reconnue à tous les citoyens. Elle ne garantit qu’une identité formelle de traitement entre les membres d’une même catégorie. Admettons que cette identité puisse être qualifiée d’égalité, elle n’est tout au plus qu’une égalité intra-catégorielle. Mais la phrase « tous les citoyens sont égaux devant la loi » ne peut être logiquement traduite par la phrase « tous les membres d’une même catégorie, librement déterminée par le législateur, sont traités de manière identique ». C’est l’universalité des citoyens qui est visée par l’égalité. Ce que voyait encore parfaitement Esmein en 1896 : l’égalité “consiste en ce que tous les citoyens ne forment qu’une classe unique de sujets à l’égard desquels la loi statue uniformément et indistinctement” ». 1013. Cependant si l’on peut trouver dans la Constitution un impératif d’universalité de la loi, celui-ci reste une utopie. Les normes ne peuvent être universelles, c’est une question de bon sens164. Seules les lois naturelles pourraient être uni162. Le principe d’égalité trouve également son fondement dans d’autres dispositions constitutionnelles, telles que celles de l’article 13 de la Déclaration des droits de 1789 et celles de l’article 1er de la Constitution de 1958. Néanmoins, c’est l’article 6 de la Déclaration de 1789 qui présente le plus d’intérêt pour notre sujet. 163. O. JOUANJAN, « Réflexions sur l’égalité devant la loi », Droits 1992, n° 16, p. 131-139, spéc. p. 135. 164. C’est ce que souligne C. LEBEN dans son étude sur « Le Conseil constitutionnel et le principe d’égalité devant la loi », RDP 1982, p. 295- 353, spéc. p. 299-300 : « Il n’est pas concevable que le principe d’égalité tel qu’il est mentionné dans un grand nombre de Constitutions ou de Déclarations de droits puisse signifier que la loi (ou toute norme générale) ne peut opérer aucune distinction entre les êtres auxquels elle s’applique. Cela voudrait dire, en effet, que dans un système juridique donné, tous les sujets posséderaient exactement les mêmes droits, et seraient soumis aux mêmes obligations. En réalité, aussi bien l’étude historique que la simple réflexion montrent à l’évidence que la loi n’est

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