Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 332)

314 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS une autorité normative hiérarchiquement supérieure, que cette règle soit spéciale ou générale. Quant au critère chronologique, il entraîne l’application de la règle postérieure aux dépens de la règle antérieure, qu’elle soit générale ou spéciale3. 921. En droit public français, le critère de spécialité s’incline devant le critère organique mais prévaut sur le critère chronologique (§ 1). Par ailleurs, le droit administratif fait place à un autre critère, le critère matériel de généralité, dans la mesure où il consacre le principe selon lequel un règlement pris pour l’application d’un autre règlement doit être conforme à ce dernier, quel que soit son rang dans la hiérarchie organique (§ 2). § 1. L’APPLICATION DU CRITÈRE DE SPÉCIALITÉ À DES NORMES DE MÊME VALEUR JURIDIQUE 922. Les règles spéciales dérogeant aux règles générales ne sont légales que si ces dernières ont une valeur juridique identique ou inférieure. Or, la valeur juridique d’une norme dépend du rang qu’occupe l’autorité qui l’édicte dans la hiérarchie des organes (A). Le critère de spécialité s’incline ainsi devant le critère organique mais prévaut par ailleurs sur le critère chronologique. En effet, la possibilité de déroger par une règle spéciale à une règle générale – lex specialia generalibus derogant – est protégée par le principe d’intangibilité de la règle spéciale – generalia specialibus non derogant4 – qui signifie que la règle générale postérieure ne remet pas en cause l’existence de la règle spéciale antérieure (B). A. LA SUPÉRIORITÉ DU CRITÈRE ORGANIQUE SUR LE CRITÈRE DE SPÉCIALITÉ 923. Le critère organique signifie que la valeur juridique d’une norme dépend du rang qu’occupe l’autorité qui l’émet dans la hiérarchie des organes. Il englobe le critère procédural ou formel5, qui permet de hiérarchiser les actes émanant d’un même organe en fonction de la solennité de la procédure (nature de l’organe consulté, modalités de la consultation). Le critère organique est parfois désigné par les membres de la doctrine comme étant le critère hiérarchique6, ce qui peut prêter à confusion, car le critère de spécialité et le critère chronologique conduisent tout autant que le critère organique à une hiérarchisation des normes. Cette assimilation du critère hiérarchique et du critère organique met bien en lumière l’attachement des juristes à ce dernier : la majorité de la doctrine considère que la hiérarchie des normes résulte de la hiérarchie des organes. 924. Le plus fervent défenseur du critère organique, qui a emporté la conviction de toute une génération de juristes, est Raymond Carré de Malberg. Selon lui, 3. V. aussi : A. SIRI, « Des adages lex posterior derogat priori & specialia generalibus derogant. Contribution à l’étude des modes de résolution des conflits de normes en droit français », RRJ 2009-4, p. 1781. 4. Ou encore : Lex posterior generalis non derogat priori speciali. 5. G. VEDEL, « Les bases constitutionnelles du droit administratif », EDCE 1954, n° 8, p. 21-53 et Pages de doctrine, Paris, LGDJ, 1980, p. 129-176, spéc. p. 27 : « Le point de vue organique (…) est englobé dans le point de vue formel (…) si l’on prend en considération les procédures, on est par là même obligé de faire place aux considérations tirées de la nature des organes intervenant dans ces procédures ». 6. N. BOBBIO, « Des critères pour résoudre les antinomies », op. cit., p. 37.

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