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256 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS 759. Sans dresser un panorama complet de l’évolution du contentieux administratif français246, il est clair que les deux classifications traditionnelles des recours contentieux, la classification formelle systématisée par Aucoc247 puis Laferrière248, fondée sur les pouvoirs du juge et la classification matérielle de Duguit qui prend en considération la nature de la question posée au juge ne sont plus, ni l’une ni l’autre, pertinentes. D’une part, le juge de l’excès de pouvoir est aujourd’hui doté de pouvoirs importants (pouvoir d’injonction, pouvoir de substitution de motifs, pouvoir de modulation des effets dans le temps de l’annulation), ce qui mine la classification formelle. D’autre part, ces nouveaux pouvoirs sont mis au service des justiciables. En particulier, le pouvoir d’injonction permet au juge de vider le litige en précisant bien quelle est la situation individuelle de l’administré, à la date où il statue249. Le juge de l’excès de pouvoir ne se contente donc plus de réparer une atteinte portée à la légalité par l’administration. Comme l’affirme Fabrice Melleray, la conception classique du recours pour excès de pouvoir est morte avec la loi du 8 février 1995 : « Un nouveau recours pour excès de pouvoir »250 est né, qui « n’est plus un simple contentieux de l’acte juridique querellé (…) [mais] un contentieux de la situation juridique litigieuse »251. 2. La réduction du recours pour excès de pouvoir aux recours formés contre les actes administratifs réglementaires 760. Même si « l’heure est à la défense et à la promotion des droits subjectifs des administrés »252, le recours pour excès de pouvoir est susceptible de conserver son originalité dans un certain domaine : lorsqu’il est formé contre les actes réglementaires, les actes porteurs de règles générales. Même Jean-Marie Woerhling qui n’a de cesse de souligner les limites du recours pour excès de pou246. Pour un tel panorama, v. notamment : F. MELLERAY, Essai sur la structure du contentieux administratif français, op. cit. V. aussi : F. BLANCO : « Entre l’annulation et la conservation de l’acte », Les états intermédiaires en droit administratif, sous la dir. de J.-M. Pontier, PUAM, coll. « Centre de Recherches Administratives », 2008, p. 119-147 ; S. BOUSSARD, « La classification des contentieux à l’épreuve de la métamorphose du juge de l’excès de pouvoir », Regards sur l’histoire de la justice administrative, Journées d’études du Centre d’histoire du droit de l’Université de Rennes I, sous la dir. de G. Bigot et M. Bouvet, Litec, coll. « Débats et colloques », 2006, p. 305-331 ; S. DAËL, « Les métamorphoses de la distinction des contentieux : Essai d’une histoire vraisemblable d’un concept évolutif », Mélanges en l’honneur de Daniel Labetoulle, Juger l’administration, administrer la justice, Paris, Dalloz, 2007, p. 209 et s. 247. L. AUCOC, concl. sur CE, 13 mars 1867, Bizet, Leb., p. 272 : dans le recours pour excès de pouvoirs, « la juridiction suprême ne statue plus dans les mêmes conditions que sur les matières de contentieux administratif ; elle ne peut plus substituer sa décision à celle de l’administration ; elle joue le rôle de Cour de cassation », cité par S. BOUSSARD, « La classification des contentieux à l’épreuve de la métamorphose du juge de l’excès de pouvoir », op. cit., p. 306. 248. É. LAFERRIÈRE, Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux, 1re éd., 1888 et 2e éd., 1896. 249. Peu de temps après l’adoption de la loi du 8 févr. 1995, le juge administratif a en effet décidé que lorsqu’il prononce des injonctions sur le fondement de cette loi, il doit se placer à la date où il statue, comme dans le contentieux de pleine juridiction, et non à la date où la décision attaquée a été prise, comme dans le contentieux de l’excès de pouvoir : CE, 4 juill. 1997, Leveau, RFDA 1997, concl. J.-H. Stahl, p. 819 ; AJDA 1997, chron. D. Chauvaux et T.-X. Girardot, p. 584 ; CE, 4 juill. 1997, Époux Bourezak ; RFDA 1997, concl. R. Abraham, p. 815 ; AJDA 1997, chron. D. Chauvaux et R.-X. Girardot, p. 584 ; RDP 1998, note P. Wachsmann, p. 271 ; CE, Sect., avis, 30 nov. 1998, Berrad, Leb., p. 451 ; RFDA 1999, concl. F. Lamy, p. 511 et note C. Guettier, p. 520. 250. F. MELLERAY, « La distinction des contentieux est-elle un archaïsme ? », op. cit., ici. p. 1236. 251. Ibid., p. 1238. 252. F. MELLERAY, « Déclaration de droits et recours pour excès de pouvoir », op. cit., ici p. 1098.

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